Citation
CONCLUSIONS DU COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT
165521 – CUSSAC
Monsieur CHANTEPY, Commissaire du gouvernement
Lecture du 26 juillet 1996
7ème et 10ème sous-sections réunies
ORIGINAL
Monsieur Bernard CUSSAC, colonel de gendarmerie, a été désigné le 22 octobre 1990 par le ministre
de la défense pour exercer à compter de 1991 les fonctions d’attaché de défense à KIGALI, au
RWANDA. Par un « ordre de disposition pour servir outre-mer » [?] du 7 mai 1991, le ministre lui a
donné l’affectation ainsi libellée : « Ministère de la coopération et du développement – Mission
d’assistance militaire de la République du Rwanda – Attaché de défense auprès de l’ambassade de
FRANCE au RWANDA à KIGALI ».
Monsieur CUSSAC a servi au RWANDA du 15 juillet 1991 au 12 juillet 1994. Dès son retour en
FRANCE, il a demandé la réévaluation de l’indemnité de résidence qu’il avait perçue pendant son
séjour au RWANDA. Il vous demande d’annuler le refus qui lui a été opposé et de condamner l’Etat à
lui verser un complément d’indemnité qu’il chiffre à 900 000 F ; il demande les intérêts sur cette
somme et leur capitalisation.
Monsieur CUSSAC a demandé à bénéficier d’une indemnité réévaluée par lettre du 6 septembre 1994
adressée simultanément aux ministres de la défense et de la coopération. Il a attaqué dans les délais les
refus implicites qui lui ont été opposés, sa requête ayant été enregistrée le 14 février 1995.
Mais le ministre de la défense oppose une fin de non-recevoir, tirée de ce que ces décisions implicites
seraient purement confirmatives d’un précédent refus opposé à une demande formulée par Monsieur
CUSSAC le 10 janvier 1992. Cependant, à cette dernière date, Monsieur CUSSAC a simplement
adressé à sa hiérarchie, en sa qualité d’attaché de défense, un rapport sur « la situation du poste
d’attaché de défense ». Si Monsieur CUSSAC mentionne la position de la rémunération attribuée au
poste d’attaché de défense, il ne formule que des remarques générales et n’articule aucune demande en
son nom propre. Nous vous proposons donc de considérer que sa première demande tendant à ce que
lui soit versé un complément de rémunération date du 6 septembre 1994.
Les dispositions du décret du 28 mars 1967, qui fixent les modalités de calcul des émoluments des
personnels de l’Etat et des établissements publics de l’Etat à caractère administratif en service à
l’étranger, ont été étendues aux personnels militaires par un décret du 19 avril 1968. L’article 11 de
l’arrêté du 29 avril 1968 pris en application de ce décret dispose : « Les personnels militaires visés par
le présent arrêté sont répartis ainsi qu’il suit entre les différents groupes énumérés par l’arrêté prévu
à l’article 5 du décret du 28 mars 1967 susvisé fixant par pays et par groupes les taux de l’indemnité
de résidence :
A) Personnels affectés dans les postes d’attachés de défense (…) Groupe 4. Officier général, colonel
et personnel militaire de rang correspondant (...)
B) Autres personnels militaires (...) Groupe 9. Colonel et personnel militaire de rang correspondant ».
Monsieur CUSSAC a bénéficié de l’indemnité correspondant au groupe 9 du paragraphe B. Il estime
qu’il devait être classé dans le groupe 4 du paragraphe A, en raison des fonctions d’attaché de défense
qu’il occupait. Nous vous proposons de lui donner raison.
Le ministre de la défense fait d’abord valoir que le poste budgétaire d’attaché de défense auprès de
l’ambassade à KIGALI avait été supprimé et que Monsieur CUSSAC était rémunéré comme chef de la
mission d’assistance militaire. Mais l’indemnité prévue par les décrets des 28 mars 1967 et 19 avril
1968 est liée à l’exercice de certaines fonctions, sans que puisse être opposée l’absence de poste
budgétaire. Or il n’est pas contesté que Monsieur CUSSAC exerçait les fonctions d’attaché de défense,
ce qui lui donnait droit à l’indemnité correspondant au groupe 4 du paragraphe A, même si, à titre
principal, il était affecté à la mission d’assistance militaire à la République du RWANDA (voyez, pour
une affaire similaire, dans laquelle vous avez jugé qu’un militaire exerçant ses fonctions au sein d’un
poste d’attaché militaire avait droit à l’indemnité du paragraphe A : [CE,] 15 janvier 1992, Graziana,
[n° 100650, sous-sections 10 et 4 réunies]).
Par ailleurs, le ministre fait valoir que Monsieur CUSSAC aurait dû être nommé par décret pour
exercer les fonctions d’attaché de défense. Mais c’est un décret postérieur à la nomination de
Monsieur CUSSAC qui impose une telle formalité.
Enfin, le moyen tiré du manque de crédits ne saurait être retenu.
Nous vous proposons d’annuler les décisions refusant à Monsieur CUSSAC le bénéfice de l’indemnité
de résidence au taux du groupe 4 du paragraphe A, et de lui accorder une indemnité couvrant la
différence entre l’indemnité à ce taux [et celle qu’il a effectivement perçue], et les intérêts sur cette
indemnité à compter du 7 septembre 1994, date de réception par l’administration de sa demande. Il a
demandé le 12 septembre 1995 la capitalisation de ces intérêts, que vous lui accorderez, puisqu’à cette
date il était dû plus d’un an d’intérêts.
Enfin, nous vous proposons de condamner l’Etat à lui verser une somme de 12 000 F au titre de
l’article 75-I [de la loi du 10 juillet 1991].
Par ces motifs nous concluons :
- à l’annulation des décisions implicites refusant à Monsieur CUSSAC la réévaluation de son
indemnité de résidence ;
- à ce que Monsieur CUSSAC soit renvoyé devant l’administration pour que soit liquidée
l’indemnité calculée sur les bases indiquées il y a un instant, indemnité assortie des intérêts à
compter du 7 septembre 1994, ces intérêts étant capitalisés à la date du 12 septembre 1995 ;
- à la condamnation de l’Etat à 12 000 F [au titre de l’article] 75-I [de la loi du 10 juillet 1991].