Citation
Doctrine
La préparation opérationnelle des unités
de défense sol-air
par la brigade d’artillerie
EN INTERVENANT DANS LE MILIEU COMPLEXE DE LA TROISIÈME DIMENSION, LES UNITÉS DE DÉFENSE SOL-AIR MOYENNE PORTÉE
(SAMP/HAWK), COURTE ET TRÈS COURTE PORTÉES (SACP/ROLAND ET SATCP/MISTRAL) ONT POUR MISSION PRINCIPALE D’ASSURER
LA DÉFENSE ANTIAÉRIENNE DES UNITÉS D’UNE FORCE PROJETÉE, AINSI QUE DE ZONES VULNÉRABLES. DANS LE CADRE DES PLANS DE LA
DÉFENSE AÉRIENNE DU TERRITOIRE, DES MISSIONS COMPLÉMENTAIRES DE CELLES ASSURÉES PAR LES MOYENS DE L'ARMÉE DE L'AIR PEUVENT
ÉGALEMENT ÊTRE CONFIÉES AUX UNITÉS DE DÉFENSE SOL-AIR DE L'ARMÉE DE TERRE, EN MÉTROPOLE (SAMP/HAWK), MAIS ÉGALEMENT
OUTRE-MER. POUR MAINTENIR LEUR NIVEAU OPÉRATIONNEL, CES UNITÉS SUIVENT UN ENTRAÎNEMENT SPÉCIALISÉ, ELLES DOIVENT CONNAÎTRE
PARFAITEMENT L'ENVIRONNEMENT INTERARMES, ET MAÎTRISER DES PROCÉDURES SPÉCIFIQUES AUX NIVEAUX INTERARMÉES, ET MÊME
INTERALLIÉS. LA PRÉPARATION OPÉRATIONNELLE ET L'ÉVALUATION DES UNITÉS SOL-AIR RELÈVENT DE LA RESPONSABILITÉ DE LA BRIGADE
D’ARTILLERIE, QUI LEUR FIXE UN CONTRAT D’OBJECTIF. CELUI-CI S'APPUIE SUR UN CYCLE À 24 MOIS AU COURS DUQUEL CHAQUE UNITÉ
FAIT L’OBJET D'AU MOINS UNE ÉVALUATION AUX PLANS TECHNIQUE ET TACTIQUE.
SPÉCIFICITÉ DES
UNITÉS DE DÉFENSE
SOL - AIR
Les unités de défense sol-air coordonnent étroitement leur action avec
les unités au sol qu’elles
défendent, ainsi qu’avec l’ensemble des intervenants dans la
troisième dimension, en particulier
l’Armée de l’air, tant dans le
processus de planification que pour
la conduite des opérations.
Deux types de missions
Au titre de la défense antiaérienne
d’une force projetée et déployée, la
brigade d’artillerie maintient en
permanence des éléments en alerte
dans le cadre des unités "GUEPARD". Selon leur importance, leur
commandement peut être assuré par
un "détachement de liaison et de mise
en œuvre" (DLMO) dérivé de l’étatmajor de la brigade, à moins qu’elles
ne soient directement adaptées au
PC de la grande unité, qui leur
donnera ses ordres par l’intermédiaire d’un "détachement de
liaison" (DL). Dans le cadre d’une
mission de défense aérienne (défense
de points ou de zones sensibles), les
unités passent sous TACON/
OPCON de l’Armée de l’air. Sur le
territoire métropolitain, cette mission est dévolue à la composante
SAMP, actuellement équipée du
système d’armes HAWK, qui doit
pouvoir être déployée dans un délai
de 96 heures. A Djibouti et en
Guyane (site de KOUROU), des
unités SATCP sont également
engagées en permanence dans des
missions de défense aérienne.
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Il est à noter que le SATCP/
MISTRAL équipe en double
dotation chaque formation sol-air (y
compris le SAMP/HAWK) ce qui
apporte aux unités mises à contribution, une diversification dans leurs
missions et dans leur mode d’entraînement.
L’unité sol-air n’agit jamais seule
Les unités sol-air mettent en œuvre
des liaisons importantes et nom-
Objectif Doctrine•N°31•p.14
breuses. Ainsi, dans le domaine
interarmes, la coopération est constante à tous les niveaux, que ce soit
pour l’occupation des points hauts
ou pour la coordination de la
manoeuvre, avec les formations
appuyées, voire de la défense rapprochée des lanceurs sol-air qui sont
déployés isolément sur des distances
pouvant aller jusqu’à 20 km.
En liaison permanente avec l’Armée
de l’air, l’unité sol-air met en place
des moyens de transmissions
phoniques et de données, ainsi que
des détachements de liaison auprès
des organismes AIR, responsables du
"contrôle tactique" (diffusions des
alertes, des codes IFF, des consignes
et des ordres de tir, activation de
couloirs aériens, etc…). Il en va de
même avec la marine nationale dans
le cadre d’une opération amphibie.
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Enfin, dans un cadre multinational,
les unités sol-air doivent pouvoir être
placées directement sous contrôle
d’un organisme AIR allié, voire de
prendre elles-mêmes sous leur
contrôle des unités sol-air amies.
Doctrine
L’unité sol-air évolue dans un  
milieu contraignant
L’ennemi aérien se caractérise par la
permanence de sa présence et sa
fugacité. Par ailleurs, la menace
évolue constamment, en particulier
au plan technologique, notamment
dans le domaine des contre-mesures
électroniques et de la lutte antiradar
(missions SEAD1), dont l’importance 
s’est avérée lors des conflits
récents. Une unité de défense sol-air
doit en conséquence, assurer une
veille permanente, disposer de délais
de réaction extrêmement brefs,
notamment pour les unités SACP/
SATCP. C’est l’une des raisons pour
lesquelles le contrôle tactique relève
de l’Armée de l’air, de manière à
réduire les risques de tirs fratricides,
à optimiser l’emploi des moyens
(éviter "l’overkill"), et surtout à
accroître les délais disponibles pour
réagir, en bénéficiant de l’apport
complémentaire des senseurs de
l’Armée de l’air ou des alliés, qu’ils
soient embarqués ou déployés au sol.
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UN CYCLE DE PRÉPARATION
OPÉRATIONNELLE SPÉCIFIQUE
Le cycle
Compte-tenu de la permanence de
leurs missions opérationnelles à
Djibouti et en Guyane, des missions
d’alerte, de la participation à
l’entraînement des grandes unités
interarmes, et des états-majors de
l’Armée de terre comme de l’Armée
de l’air, les unités de défense sol-air
se préparent sur un cycle à 24 mois
au cours duquel elles sont évaluées
deux fois dans leur aptitude au tir, et
une fois dans leur aptitude à
manœuvrer. Elles participent égale-
ment à des campagnes de tir
annuelles pour permettre l’entraî-
nement d’un maximum d’équipages, et en particulier de ceux
appelés à effectuer une mission
opérationnelle dans le courant de
l’année.
Une "commission nationale d’évaluation de l’artillerie sol-air"
(CNEASA), relevant du Commandement de la Force d’Action
Terrestre, délivre aux unités leur label
d’aptitude au tir, à travers deux types
de contrôles :
- les "évaluations d’aptitude technique
en position" (EATP) dont
l’objectif est de vérifier la
connaissance du personnel dans
la mise en œuvre de son système
d’armes. Le principe est directement inspiré des méthodes
d'évaluation en vigueur dans
l’Armée américaine et appliquées
depuis les années soixante dans
l’artillerie sol-air française, à
travers le HAWK ;
- les "évaluations d’aptitude au
combat antiaérien et au tir"
(EACAT) qui évaluent sur
simulateur la capacité des équipes
de tirs à mener des engagements
dans un environnement 3D
complexe.
Tout équipage, toute unité, doit
satisfaire un niveau seuil minimum
pour être autorisé à participer à une
campagne de tir.
Trois campagnes de tir sont
organisées chaque année (deux
campagnes SACP/SATCP, une pour
le SAMP), qui permettent aux
équipages de tirer au moins une fois
tous les deux ans compte-tenu du
1 SEAD : "Suppression of enemy air defense".
Objectif Doctrine•N°31•p.16
taux d’activité des unités. Le réalisme
est obtenu à travers des thèmes de
tirs prenant en compte des cibles
multiples et manœuvrantes, ainsi
qu’en incluant des éléments de
coordination avec l'Armée de l'air.
Le label opérationnel d’une unité
n’est attribué qu’à l’issue d’une
campagne de tir et il n’est valable
qu’un an. Le contrôle de l’aptitude à
la manœuvre ("ANTARES") s’effectue 
lors de l’espace d’entraînement
annuel de la brigade d’artillerie
(FTX BRIGARTI), auquel tous les
régiments participent, y compris les
régiments LRM. L’évaluation formelle 
de chaque unité n’a toutefois
lieu qu’une année sur deux. C’est
une manœuvre en terrain libre,
exclusivement, se déroulant sur
plusieurs jours et sur de grandes
élongations, au cours de laquelle il
est également procédé à un exercice
de largage opérationnel de l’unité
SATCP/MISTRAL aéroportée.
*
Elle est conduite par le "centre de
mise en œuvre" (CMO) de la brigade
d’artillerie et les unités bénéficient
d’un environnement réaliste, avec le
déploiement d’un maillage RITA
conséquent (5 à 6 Centres Nodaux),
la mise à disposition d’un important
plastron aérien (ALAT et Armée de
l’air), ainsi que de moyens de
détection air et de contrôle, au sol ou
aéroportés (SDA/AWACS).
Des moyens aéroportés de guerre
électronique de l'OTAN (brouillage
actif ) seront mis pour la première
fois en œuvre en 2002, afin
d’exploiter les enseignements tirés
des conflits récents (missions
"SEAD"), au même titre que les
moyens NBC, ainsi que ceux de
simulation et d’évaluation de
déploiements.
Doctrine
L’exercice permet ainsi une
évaluation réaliste des PC 
régimentaires et des détachements de
liaison (ces derniers étant eux-mêmes
régulièrement mis en oeuvre dans le
cadre de leur participation aux
exercices AURIGE des BIA). Enfin,
l’importance, le coût élevé des
moyens mis en œuvre, ainsi que les
difficultés évidentes pour les inscrire
en programmation et les rassembler
au même moment, en un même lieu,
font que ces exercices doivent être
rentabilisés au maximum, d’où leur
ouverture "à la carte" à d’autres
unités interarmes.
Défis à relever
La composante sol-air de la brigade
d’artillerie est confrontée à une
nouvelle restructuration avec la
dissolution d’un régiment annoncée
pour 2003. Assumant en permanence des missions de métier à
Djibouti et en Guyane, ses formations participent également aux
autres projections extérieures et intérieures des unités interarmes de
l’Armée de terre (MCD "TTA" ou
RCS"). Cela complique l’exécution
du cycle de préparation opérationnelle, car à l’instar des autres
brigades d’appui spécialisé, et
contrairement aux brigades interarmes, la brigade d’artillerie ne
bénéficie pas de phase de remise en
condition opérationnelle. Les
méthodes d’évaluation sont donc
régulièrement adaptées aux circonstances et la commission d’évaluation procède aujourd’hui à des
évaluations de sections, voire de
pièces, plus souvent qu'à des
évaluations d’unités constituées. Par
ailleurs, des équipements nouveaux
entrent en service : le système
HAWK valorisé "PIP3" qui préfigure
le SAMP futur, le réseau de "maillage
antiaérien des radars tactiques contre
hélicoptères et aéronefs à voilure
fixe" (MARTHA) sont livrés aux
formations, ou le seront dans les
mois à venir. Le MIDS2 complétera
ensuite cette architecture du réseau
d’alerte, de coordination des feux et
de la manœuvre.
Outre les capacités opérationnelles
modernisées et nouvelles qu’ils
offrent, ils impliquent un effort
important d’adaptation du personnel qui les sert et doit se remettre en
cause, ils engendrent des procédures
nouvelles et la plupart du temps une
refonte en profondeur des manuels
d’emploi, comme des modalités
pratiques d’évaluation des unités.
Dans le cadre des campagnes de tir, il
est également envisagé d’équiper les
cibles existantes de moyens de
brouillage ou de leurrage, domaine
jusqu’à présent inexploré en raison
des contraintes techniques et bien
sûr, des coûts induits.
L’effort de la brigade d’artillerie
porte actuellement sur l’accroissement de l’interopérabilité avec les
Alliés. Ainsi, les unités de défense
sol-air sont amenées à mettre sur
pied des modules complémentaires à
partir de différents systèmes d’armes,
nationaux ou multinationaux,
2 MIDS : Multifunctional Information & Distribution System.
3 NMD : National Missile Defense (ou couverture antimissile du territoire des Etats-Unis d'Amérique).
Objectif Doctrine•N°31•p.18
dénommés "clusters SAMP/SACP/
SATCP" et que favorise la
participation à de grands exercices
nationaux (ODAX) ou OTAN
(CLEAN HUNTER) à dominante
3ème dimension. De tels exercices
conduisent à harmoniser les procédures et à trouver, ou à valider, des
solutions techniques innovantes,
permettant le contrôle direct des
unités (en particulier, la transmission
de données par "liaison 16").
L’entrée en service du système de
coordination en temps réel MARTHA
va notoirement accroître cette capacité à l’interopérabilité et il est
probable que le futur SAMP/T, doté
d’une capacité antimissile de théâtre
(ATBM), constituera à terme la clef
de voûte de l’ensemble. C’est un défi
majeur supplémentaire qui attend les
unités de défense sol-air et son enjeu
suppose une réflexion en termes de
stratégie et de missions, plus qu’en
termes de format et d’effectifs. A
l’heure de la NMD3 américaine, il y
a une opportunité pour l’Armée de
terre de revenir avec le SAMP
(ATBM) dans une dimension
stratégique qu’elle a perdue depuis le
retrait du service de sa composante
nucléaire ■