Fiche du document numéro 35678

Num
35678
Date
Mardi 1er septembre 2015
Amj
Taille
89885
Titre
Lettre à François Rebsamen, maire de Dijon
Lieu cité
Source
Type
Lettre
Langue
FR
Citation
IBUKA France Mémoire, Justice et Soutien aux rescapés
Association Loi 1901

Kabanda Marcel
Président d'Ibuka France
Maison des Associations
23, rue Greneta

75002 Paris

e-mail : contact@ibuka-france.orq

Monsieur François Rebsamen
Maire de Dijon

Mairie de Dijon

Place de la Libération,

21000 Dijon

Monsieur le Maire,

Ce 24 aout, j'ai appelé votre mairie pour la finalisation des invitations officielles pour
l'inauguration de la stèle en hommage aux victimes du génocide des Tutsi. J'ai appris
que le projet était purement et simplement abandonné. Cette année d'échanges et de
rencontres avec Alain Millot et ses collaborateurs pour l'édification de cette stèle était
brutalement interrompue.

Encore sous le choc de cette nouvelle, Je reviens vers vous pour vous exprimer au nom
d'IBUKA France et de moi -même notre profonde déception, notre tristesse, et nos
demandes d'explications.

Alors que la terre sur la tombe de votre prédécesseur n'est pas encore sèche, vous avez
annulé sa décision de rendre hommage au million de victimes d’un génocide.

Aucun d'entre nous n'avait imaginé cela : aucune des associations impliquées, la LICRA et
IBUKA France, n’a été informée par vos soins de ce terrible revirement. La Licra ainitié ce
projet dans le cadre de son travail de sensibilisation du public à l'unité du genre humain. Une
telle initiative ne méritait-elle pas de votre part un geste d'encouragement plutôt qu’un
cinglant désaveu ?

Je songe à la stupéfaction et la douleur aux rescapés qui avaient pris leurs dispositions pour

venir à Dijon, et à tous ceux qui se préparaient à accompagner cet événement : l’université de
Bourgogne qui préparait un colloque et avait dès le début de l'été invité les intervenants, un
cinéma de la ville qui envisageant de projeter des films sur le génocide des Tutsi avait pris
contact avec les producteurs et les réalisateurs.

Sur le fond, nous aimerions savoir ce qui vous a posé problème.

Le calendrier ? Nous aurions pu trouver ensemble une autre date.

Une question budgétaire ? Nous aurions pu chercher ensemble d'autres ressources ?

Une question politique et morale ? La désinvolture de la décision nous renvoie à l’incroyable
thèse suivant laquelle dans « ces pays-là, un génocide ce n’est pas important » !

Nous le ressentons comme un nouveau coup de poignard dans une plaie que le temps, le
déni persistant et l'inertie de la justice n’ont pas encore permis de refermer.

Vous êtes un ministre de la République. Si notre impression était avérée, l’un de vos premiers
actes à la tête de la Mairie de Dijon jetterait de l'ombre d'un doute sur l'attitude du
gouvernement auquel vous appartenez à l'égard du génocide des Tutsi. L’inauguration de la
stèle avait été fixée à la date du 21 septembre parce que c'est la journée internationale de la
paix. Le but était de transmettre le message du vivre ensemble. En rejetant si violemment la
mémoire des victimes de la haine sans considération aucune pour les rescapés, ne confortez-
vous pas les tueurs - sans exigence pour eux de s'amender - et ne niez-vous pas ainsi
l'universalité du message du 11 janvier 2015 ? Nous croyons, quant à nous, à l'obligation de
dénoncer, pour qu'il n'y ait "plus jamais ça".

En espérant vos explications,

Marcël Kabanda

Président d'IBUKA France

CC

Monsieur François Hollande, président de la République

Monsieur Manuel Valls, premier Ministre
Monsieur Alain Jakubowicz, Président de la Licra

Monsieur Alain David, président de la Commission Mémoire, Histoire et droits de l'homme de
la Licra

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