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Cette cinquième journée d’audience s’est ouverte avec l’audition de Laetitia Husson, juriste pour les Nations Unies qui a travaillé de 2004 à 2015 pour le TPIR. Elle a expliqué avoir travaillé du côté des juges. Elle a tout d’abord rappelé l’histoire et le contexte de la création du TPIR. L’objectif était de participer au rétablissement et au maintien de la paix dans la région. Elle a également rappelé l’étendue de la compétence du tribunal ainsi que son fonctionnement. S’agissant du déroulement des procès devant le TPIR, elle a expliqué que le système accusatoire des pays anglo-saxons prédominait sur le système inquisitoire : le procès est une confrontation entre deux adversaires (l’accusé et le procureur) dont les juges en sont les arbitres. Il n’y avait aucune partie civile, les victimes n’existaient qu’au travers de leur qualité de témoin. Laetitia Husson a également expliqué la possibilité pour les accusés de plaider coupable, ce qui pouvait aboutir à une modification des charges ou à une peine moindre. L’accusation devait dans tous les cas prouver la culpabilité de l’accusé « au-delà de tout doute raisonnable ». Au total, 93 personnes ont été inculpées, 61 condamnées et 14 ont été acquittées. Ensuite, le témoin a présenté les conclusions majeures des juges du TPIR. Une décision de juin 2006 considère notamment que le génocide des Tutsi est un fait établi qui ne pouvait raisonnablement être contesté. Le même constat a été fait s’agissant des attaques massives ou systématiques à l’encontre des Tutsi en 1994. Ces deux constats judiciaires ont pour conséquence que le procureur n’a plus à les démontrer devant le TPIR. Laetitia Husson précise également que si peu d’accusés ont été condamnés pour entente en vue de commettre un génocide ou un crime contre l’humanité, les jugements du tribunal ont révélé le caractère coordonné et organisé des événements en 1994. Elle donne l’exemple de l’affaire Bagosora pour expliquer que souvent les juges avaient pour but de juger de la culpabilité d’un accusé et que donc prouver l’existence d’un plan concerté n’était pas leur but.
Le Président lui a demandé comment est-ce que les juges procédaient pour juger la preuve testimoniale lors de ces procès. Elle a répondu qu’ils prenaient les témoignages à la lumière du dossier, en prenant en compte l’écoulement du temps et les possibles traumatismes. Le Président cite ensuite l’affaire Jean Kambanda, qui avait plaidé coupable mais qui a été condamné à la perpétuité. Le Président se demande donc pourquoi, s’il a plaidé coupable, il n’a pas eu une peine moins élevée. Laetitia Husson a ainsi répondu que les juges avaient estimé que les faits étaient d’une telle gravité que cela justifiait la peine maximale. De plus, les négociations sont confidentielles, on n’en connait pas le contenu. Le Président a ensuite mentionné le jugement dit de Butare, que le témoin a expliqué.
Me Gisagara l’a interrogée sur la question de savoir si elle avait observé au TPIR des cas de subordination de témoins, de témoins corrompus. Elle a expliqué que certains avaient reconnu devant le TPIR avoir fait de faux témoignages, soit par pression des autorités, corruptions par des tiers, ou par vengeance. Au procès de Butare, 3 témoins sur les 189 ont reconnu avoir menti. Le TPIR n’a en tout poursuivi qu’une seule personne pour faux témoignage. Celle-ci disait avoir menti car il avait été payé par un membre de la défense. Ses déclarations n’ont pas été jugées crédibles et il n’a pas été condamné. En, revanche, le membre de la défense a été condamné pour avoir communiqué des informations confidentielles au témoin. Également, elle explique que devant le Mécanisme, il y a eu des cas de condamnations de proches d’un accusé pour avoir incité un témoin à retirer son témoignage. Me Gisagara a insisté et a demandé s’il s’agissait donc plutôt d’une pratique de la défense. Elle a répondu que factuellement, seuls des membres de la défense ou des proches de l’accusé ont été condamnés. Me Gisagara l’a ensuite interrogé sur la fiabilité du système judiciaire rwandais. Elle a expliqué qu’après un refus en 2007 du TPIR de renvoyer des affaires aux autorités rwandaises, les changements effectués au Rwanda ont été jugés suffisants pour pouvoir revenir sur cette décision en 2011.
Le deuxième témoin à avoir été entendu par la Cour est Ignace Muyemanzi, témoin entendu au titre du pouvoir discrétionnaire du président à la demande de la défense. Il dit d’emblée être ici pour défendre Philippe Manier. Réfugié en France depuis 1998, il explique l’avoir rencontré à Rennes en 1999. Il a également mentionné son travail d’enquêteur pour la défense au TPIR de 2000 à 2004 pour une affaire. Ayant eu sa famille assassinée pendant le génocide, il a insisté sur la souffrance des rwandais encore aujourd’hui. Il dit avoir vécu une expérience traumatisante lors de son premier témoignage en première instance. Suite à cela, le Président l’a interrogé sur l’association qu’il a créée avec l’accusé à Rennes, Amizero. Il explique ainsi que le but était de s’entraider entre réfugiés. Il affirme que l’accusé est quelqu’un qui souhaitait « soigner le mal », il était bienveillant, très empathique, notamment avec les enfants. C’est également quelqu’un de très sensible, qui pleure, alors que cela ne se fait pas normalement dans la culture rwandaise. Le Président lui demande s’il y avait des Hutus et des Tutsi dans cette association. Il explique que pour lui, les ethnies n’ont jamais été une préoccupation, lui même venant d’une famille Hutu et Tutsi. Interrogé par le Président, le témoin explique que Philippe Manier ne parlait pas beaucoup de son passé, seulement que c’était un gendarme et qu’il avait des problèmes avec des gendarmes du Nord.
Le Président évoque ensuite que la plainte du CPCR avait fait suite à une lettre anonyme qu’ils avaient reçue et qui évoquait la présence de Philippe Manier en France. Le témoin a indiqué que cette lettre avait d’abord été envoyée par fax au Président de l’Université de Rennes 2, où travaillait l’accusé à l’époque. Cette lettre était signée Ibuka. Plus tard, ils auraient appris que la lettre venait en fait d’une certaine personne, dont il ne veut au départ pas donner le nom. Il finit par dire qu’il s’agit d’un ancien membre de l’association du nom d’Epiphane. Celui-ci aurait détourné des fonds de l’association. Ils auraient alors porté plainte et maintenant il souhaiterait se venger. Ignace Muyemanzi a affirmé avoir appris devant la Cour lors de son premier témoignage en première instance que son nom figurait dans cette lettre et que lui aussi était accusé d’être un criminel. Il ajoute qu’en décembre dernier, au moment du décès de sa mère, des membres de sa famille l’ont informé que des personnes étaient venues chez lui pour les convaincre de raconter qu’il se trouvait aux barrières pendant le génocide. On l’a donc prévenu que certains pouvaient faire de faux témoignages. Il se dit que cela a surement pu arriver à Philippe Manier.
Le Président a ensuite donné la parole à la défense. Les avocats l’ont interrogé sur les persécutions qu’il aurait subi au Rwanda en cas de retour (étant donné qu’il a obtenu le statut de réfugié en France). Il a ainsi mentionné un certain Faustin Twagiramungu, un proche parent qui était Premier Ministre du Rwanda au moment du multipartisme et qui l’est redevenu au sein du gouvernement de réconciliation. Le Président a précisé à ce moment-là qu’il ne souhaitait pas que l’on rentre dans le parcours de ce Faustin car il est très compliqué. Le témoin raconte que celui-ci lui aurait envoyé un message après le génocide pour lui dire de ne pas revenir car le FPR massacrait les intellectuels. La défense l’a interrogé ensuite sur les menaces qu’aurait subis Philippe Manier par des gendarmes du Nord. Il confirme que c’est bien ce qu’il s’est passé, il y avait une scission à ce moment-là entre le Nord et le Sud et Manier était considéré comme un complice des « ennemis du pays ».
Me Philippart pour le CPCR lui a demandé s’il pensait vraiment que tous les témoins à charge contre Philippe Manier étaient manipulés. Il a répondu que non, il a simplement fait un parallèle avec son histoire. Il se dit que c’est possible. Me Quinquis pour la LICRA a posé une question relative à la part de l’association Amizero dans le travail du mémoire du génocide des Tutsi au Rwanda. Il répond qu’ils ne sont jamais allés jusque-là car ils n’avaient pas les compétences. En revanche, s’agissant des commémorations, chacun le fait dans son cœur. Lui, dit le faire tous les jours. Répondant à une question de Me Karongozi sur les victimes et les bourreaux du génocide, il a répondu que ce sont les Tutsi qui étaient massacrés par des criminels. En revanche, ces criminels n’avaient pas d’ethnies.
L’avocat général l’a ensuite interrogé sur le fax reçu par le président de l’Université à Rennes. Il lui demande s’il l’a lu. Il lui répond que oui. L’avocat général est surpris car dans ce fax seul figure le nom de Philippe Manier, pas le sien. Il se dit surpris et répond qu’apparemment ce ne sont pas les mêmes lettres. Le Président a rappelé les preuves qu’Ibuka n’est pas à l’origine de ce fax.
Un extrait du journal télévisé de France 2 du 28 janvier 1993 a ensuite été visionné par la Cour. On y voit notamment un témoignage de Jean Carbonare, président de l’association Survie, qui témoigne de l’organisation des massacres. Il explique que ce ne serait pas seulement un affrontement ethnique, ce serait plus que ça. Il prévient qu’un mécanisme est en train de se mettre en route et que la France a la responsabilité de peser sur cette situation.
Après une suspension, l’audience a repris par l’audition du général Jean Varret. Le Président l’a interrogé en premier lieu sur sa rencontre avec le chef d’Etat major de la gendarmerie au Rwanda, Rwagafilita. Il raconte ainsi qu’il était de 1990 à 1993 général détaché au Ministère de la coopération, donc le but était d’aider les anciens pays coloniaux à retrouver leur indépendance. 26 pays étaient concernés et dans chacun d’entre eux se trouvait un colonel qui était son correspondant sur place. Celui du Rwanda, le colonel René Galinié, l’a averti des difficultés qu’il rencontrait avec le régime. Il a décidé de s’y rendre. C’est à ce moment-là qu’il a rencontré Rwagafilita. Spontanément, celui-ci va lui demander d’envoyer à la gendarmerie rwandaise des armes lourdes, telles que des mitrailleuses et des mortiers. Quand le général refuse, il lui demande un tête à tête. C’est là qu’il va lui expliquer c’est pour la « liquidation » des Tutsi, femmes et enfants compris. Il lui dit que ça ira très vite, car ils ne sont pas nombreux. Avant de rentrer en France, le général raconte avoir rencontré Juvénal Habyarimana, pour lui parler de la demande de Rwagafilita. Il était furieux. Il lui a dit : « il vous a dit ça ce con là ». Le général dit ne pas savoir s’il disait ça car Rwagafilita mentait ou car c’est quelque chose qu’il ne devait pas partager.
Le Président a ensuite voulu en savoir plus sur les réactions françaises. Le général dit en avoir parlé à son ministre, qui lui a dit d’en parler au ministre de la défense. Il en a également parlé au Chef d’État-major des armées. Ils ont voulu attendre de voir comment cela allait évoluer. Il est ensuite retourné au Rwanda et a remarqué le soutien massif de l’armée et de la gendarmerie à la politique du gouvernement. Il dit avoir toujours exprimé des craintes vis-à-vis du soutien de la France à Juvénal Habyarimana. Mais il a refusé d’employer le mot de génocide, car il ne voulait pas en faire un problème international qui obligerait la France à intervenir. Il dit ne pas avoir eu d’autre solution que de démissionner.
Me Bernardini l’a ensuite fait parler du « clan des extrémistes Hutu du Nord » dont il parle dans son livre « Souviens-toi : Mémoires à l’usage des générations futures ». Il a ainsi précisé que Galinié avait déterminé l’importance de clan dans l’encouragement de l’armée et de la gendarmerie à participer à l’extermination des Tutsi. Me Bernardini l’a également interrogé sur les raisons d’un tel soutien inconditionnel du président Mitterrand aux Hutus. Le général a ainsi expliqué qu’il ne voulait pas perdre un certain contrôle qu’il avait en Afrique, au profit notamment des anglo-saxons. Tout l’entourage de Mitterrand, y compris le Chef d’État-major particulier du président, ont défendu Juvénal Habyarimana contre les Tutsi.
L’avocat général l’a ensuite interrogé sur Michel Roberdey, lieutenant-colonel en charge de former les gendarmes rwandais. Le général dit s’être opposé à lui car il avait peur que les gendarmes locaux aient accès au fichier central du CRCD. C’était une demande de la gendarmerie locale soutenue par certains gendarmes français. Me Bernardini a demandé que soit donné acte de ce que vient de dire le général Jean Varret à ce sujet.
L’audition de Michela Wrong, en visio depuis Londres, a ensuite démarré avec difficulté. En effet, la défense a remis à la Cour des conclusions ; il s’agissait de centaines de tweets qu’aurait reçus le témoin la veille au soir. Il s’agirait de menaces et d’intimidations proférées à son encontre du fait de son témoignage devant cette Cour. Me Altit a donc demandé à ce que le Président prenne des mesures pour s’assurer qu’elle ne subisse pas de pression. Le Président est surpris et répond qu’il n’a qu’un pouvoir limité à ce qu’il se passe au sein du tribunal. Cette demande est apparemment très inhabituelle. L’avocat général ajoute que la France n’est sûrement pas compétente pour ces faits dont rien ne prouve qu’ils ont un lien avec la France. Me Guedj affirme qu’il y a une compétence universelle de la France lorsque le message est diffusé en France. C’est un peu la cacophonie à ce moment-là dans le tribunal, tout ça se passant devant les autorités anglaises et le témoin qui attendent. Michela Wrong affirme être victime d’une campagne d’intimidation depuis hier soir. Elle parle de plus de 3800 tweets de citoyens rwandais sur le fait que c’est inacceptable qu’elle témoigne aujourd’hui. Cette campagne viendrait de Kigali. Ce n’est pas la première fois qu’elle est la cible du gouvernement selon elle. Le Président répond qu’il ne peut pas y faire grand-chose.
Michela Wrong explique ensuite avoir été journaliste en 1994 à Kinshasa pour Reuters. En juillet, elle se rend à Goma à l’Est du pays. Tout de suite, elle remarque des traces de massacres partout et une tentative de cacher les corps. Il y avait beaucoup de morts dans les églises et les écoles où les Tutsi, victimes principales du génocide, s’étaient réfugiés en masse. Elle a rencontré lors de ses différents voyages plusieurs membres du FPR et des membres de l’ancien gouvernement de Juvénal Habyarimana. Elle a rencontré ensuite Paul Kagame et son gouvernement une fois celui-ci établi. A l’époque, elle l’admirait. Elle se dit crédule à l’époque. Beaucoup de gens ont changé de perspective après avoir suivi la situation au Rwanda. Elle mentionne l’attaque de camps de réfugiés en RDC en 1996/1997 par le groupe armé par le FPR. Elle a également parlé du rapport Mapping de 2010, qui mentionne 617 « incidents » créés par le FPR et l’AFDL. Plus de doute pour elle après ça que le FPR commettait des massacres. Kagame lui-même est devenu impopulaire auprès de ses collègues Tutsi. La politique au Rwanda est bien plus complexe que ce qu’est présenté au monde. Elle ne croit pas en un affrontement entre les « bons » d’un côté et les « méchants » de l’autre. Kagame et son gouvernement travaillent toujours pour présenter une vision simpliste des choses. Dès qu’on parle de la question des droits de l’homme au Rwanda, Kagame parle toujours du génocide pour culpabiliser la communauté internationale, qui n’a rien fait pour l’arrêter. Il exploiterait les procès de ce genre pour faire diversion sur ce qu’il se passe au Rwanda et au Congo. Elle dit également avoir rencontré un témoin qui lui aurait avoué avoir pris des cours avec d’autres témoins au Rwanda afin de se préparer pour un procès dans un pays étranger dont elle ne veut pas donner le nom.
Le Président l’a ensuite interrogé sur si pour elle le Rwanda était une dictature. Elle répond que c’est évident que les élections sont truquées, que les opposants sont opprimés, que les journalistes sont assassinés, exilés. Pour elle, c’est simple : c’est une dictature. Interrogé par le Président sur la manipulation des témoins, elle dit mettre en garde la Cour sur ces faux témoignages.
Me Altit pour la défense lui a d’abord posé une question sur Paul Rusesabagina. Elle dit que c’est l‘ancien directeur de l’hôtel des Mille Collines à Kigali, qui a négocié avec les Interahamwe pour protéger les Tutsi venus s’y réfugier. Il l’a également interrogé sur la purification ethnique dont elle a parlé. Elle explique qu’elle se fonde sur l’ouvrage de Judi Rever « Rwanda, l’éloge du sang » ainsi que sur le rapport Gersony. Les avocats des parties civiles et le ministère public ont renoncé à poser des questions au témoin car le juge anglais présent pendant le témoignage a indiqué qu’il y avait un horaire à respecter et qu’il ne pouvait pas rester.
Le Président a ensuite lu les conclusions rédigées par la défense sur les tweets reçus par Michela Wrong. Les avocats généraux et les conseils des parties civiles ont relevé que ces tweets n’étaient en aucun cas des menaces à son encontre, mais plutôt des personnes qui regrettent son témoignage en tant que proches de certains négationnistes notoires. Le Président affirme que ce qui est demandé est hors de son champ de compétence. Me Guedj demande au parquet d’envoyer un message fort à tous les prochains témoins qui pourraient subir des pressions. Le Ministère public répond que dans tous les cas ce n’est pas à eux de se saisir mais au parquet de Paris. Me Gisagara dit avoir versé au dossier une analyse du discours du témoin faite par une experte.
Pour terminer cette journée très dense, un dernier témoin est entendu. Il s’agit d’Erasme Ntazinda, partie civile entendue depuis le Rwanda. Me Bernardini, son conseil, a expliqué qu’il avait souhaité le faire entendre si tôt dans le procès car il a participé à un rapport sur le génocide à Nyanza. En effet, Erasme Ntazinda explique avoir été élu maire de Nyanza en 2016. Il n’était pas présent, en revanche lors du génocide, il a fui le 19 avril au Burundi. Des membres de sa famille ont été tués sur les collines de Ntyazo. Il raconte avoir fait appel à des experts pour établir un rapport sur le génocide à Nyanza. Au total, 109 personnes vont témoigner, y compris des participants au génocide. Il répond à une question du président qui souhaitait savoir pourquoi les témoins étaient tous anonymisés et explique que c’était pour éviter qu’il y ait des conséquences pour eux. Le Président donne la parole à Me Bernardini pour lui poser des questions car il ne comprend pas bien ce que le témoin est venu raconter. Il lui pose ainsi une question sur le bourgmestre de Nyabisindu, du nom de Gisagara. Le Président intervient pour rappeler que ces faits ont fait l’objet d’un non-lieu. Me Bernardini semble surpris et renonce à poser une question dessus. Il l’a ensuite interrogé sur les raisons de sa fuite du Rwanda. Il a expliqué qu’en tant qu’universitaire, il se savait menacé avant le génocide. Quand les massacres ont commencé, il s’est dit qu’il devait s’enfuir. Me Jean Simon l’a ensuite fait parler des discriminations qu’il a connues en tant que Tutsi dans son parcours scolaire.
Me Scialom l’a interrogé sur le rôle des forces de l’ordre et notamment des gendarmes dans le génocide. Il répond que les gendarmes avaient en charge le maintien de l’ordre mais que dans le contexte de guerre, ils étaient amenés à intervenir en soutien des militaires. Mais pendant le génocide, partout où il y avait de la résistance, les militaires et les gendarmes sont intervenus pour « épauler les attaquants ». Elle l’a également interrogé sur les conséquences aujourd’hui du génocide. Il a insisté surtout sur les conséquences mentales du génocide sur les populations.
La défense l’a interrogé sur le fait qu’il a été membre du FPR, ce qu’il a affirmé. Me Guedj a insisté sur le contenu du rapport sur le génocide à Nyanza. Il répond qu’il n’en était pas l’auteur, il a simplement signé l’éditorial. Me Guedj répond que la cour prendra note du fait qu’il ne connaît ni l’accusé ni le rapport en question.
Le Président a ensuite résumé la déposition de Jacques Semelin, historien mais trop âgé pour venir témoigner, avant de clôturer la journée.
Par Léna Jaouen, Stagiaire Commission Justice Ibuka France