Fiche du document numéro 33995

Num
33995
Date
Dimanche 7 avril 2024
Amj
Taille
420862
Titre
Génocide des Tutsis : la reculade d’Emmanuel Macron dans son message vidéo
Sous titre
Après avoir renoncé à se rendre à Kigali pour la trentième commémoration du génocide des Tutsi du Rwanda, Emmanuel Macron avait fait savoir qu’il s’exprimerait ce dimanche « par une vidéo qui sera publiée sur ses réseaux sociaux ». Sa teneur en avait été en partie dévoilée par l’Elysée. Le chef de l’Etat y déclarait que « la France, qui aurait pu arrêter le génocide avec ses alliés occidentaux et africains, n’en a pas eu la volonté ». Sauf que cette phrase a été retirée de la vidéo entre samedi et dimanche. A Kigali, ce revirement a été vécu comme une mauvaise surprise au moment le plus sensible.
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Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
Dimanche 7 avril 2024 à Kigali pour la 30ème commémoration du génocide des Tutsis © JFD

À l’occasion de la 30e commémoration du génocide des Tutsi rwandais le dimanche 7 avril, Emmanuel Macron avait prévu de se rendre à Kigali. Puis y avait renoncé, officiellement en raison d’un agenda mémoriel trop chargé. Stéphane Séjourné, ministre des Affaires étrangères, et le secrétaire d’Etat chargé de la Mer Hervé Berville – rescapé du génocide au Rwanda – étaient chargés de le remplacer. Les autorités rwandaises cachaient mal leur déception, alors que de nombreux chefs d’Etat (présents ou passés) et des chefs de gouvernement étaient annoncés. A commencer par l’ancien président américain Bill Clinton à la tête d’une forte délégation nord-américaine.

Afin de compenser son absence, le président français avait décidé de s’exprimer par une vidéo sur Youtube. Pour faire bonne mesure, l’Elysée en avait révélé dès jeudi des extraits. Après avoir reconnu en 2021 les « responsabilités lourdes et accablantes » de la France dans le génocide des Tutsi, Emmanuel Macron précisait que Paris « aurait pu arrêter » les massacres » mais « n’en a pas eu la volonté ».

« Le chef de l’État rappellera notamment que, quand la phase d’extermination totale contre les Tutsi a commencé, la communauté internationale avait les moyens de savoir et d’agir, par sa connaissance des génocides que nous avaient révélée les survivants des Arméniens et de la Shoah, et que la France, qui aurait pu arrêter le génocide avec ses alliés occidentaux et africains, n’en a pas eu la volonté », a rapporté un membre de la présidence à l’AFP.

Selon l’Elysée, « ce 7 avril 2024, le chef de l’État réaffirmera que la France est aux côtés du Rwanda, du peuple rwandais, en souvenir d’un million d’enfants, de femmes et d’hommes martyrisés parce que nés Tutsi. Il redira l’importance du devoir de mémoire mais aussi du développement des savoirs de référence et de leur diffusion, en particulier par l’éducation des jeunes générations en France ».

Ce dimanche au mémorial de la capitale rwandaise, l’absence d’Emmanuel Macron n’était pas officiellement commentée, mais, selon nos informations, les autorités rwandaises avaient été tenues au courant du caviardage des propos présidentiels sur Youtube. Ce qui explique le discours offensif du président Kagame. Stéphane Séjourné, ministre des Affaires étrangères, et Hervé Berville, secrétaire d’Etat chargé de la Mer, s’efforçaient d’attirer l’attention alors que les regards étaient plutôt tournés vers Nicolas Sarkozy, chaleureusement accueilli par Paul Kagame.

En février 2010, Nicolas Sarkozy, alors président, avait reconnu à Kigali de « graves erreurs » et « une forme d’aveuglement » des autorités françaises ayant eu des conséquences « absolument dramatiques ». Les relations diplomatiques avaient été renouées. Une relation d’amitié s’était tissée entre Nicolas Sarkozy et Paul Kagame.

Ce dimanche 7 avril 2024, les centaines d’invités arrivés plusieurs heures avant le début de la cérémonie avaient été autorisées à conserver leurs portables et « l’affaire de Youtube » finit par filtrer et par provoquer l’incrédulité, puis des rumeurs. Ce pas de clerc du président français a semblé polluer en quelques minutes les efforts réalisés ces dernières années.

Rappelons qu’un rapport d’historiens commandé par l’Elysée et publié en avril 2021 sous la direction de Vincent Duclert avait conclu à des « responsabilités lourdes et accablantes » de la France et à l’ « aveuglement » du président socialiste de l’époque, François Mitterrand, et de son entourage face à la dérive raciste et génocidaire du gouvernement hutu que soutenait alors Paris en dépit de nombreux lanceurs d’alerte.

Venu au Rwanda en mai 2021 à la suite de ce rapport, Emmanuel Macron avait marqué les esprits par un discours nouveau sur le génocide des Tutsi du Rwanda. « Alors que des responsables français avaient eu la lucidité et le courage de le qualifier de génocide, la France n’a pas su en tirer les conséquences appropriées », avait-il dit. « Nous avons, tous, abandonné des centaines de milliers de victimes à cet infernal huis clos ».

Cependant Emmanuel Macron avait tenu à préciser les limites du genre : Paris n’avait « pas été complice » des génocidaires hutu. Le président français n’avait pas prononcé le mot « excuses » à la différence de chefs d’Etat américain, britannique et belge.

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fgtquery v.1.9, 9 février 2024