Citation
REPUBLIQUE
FRANCAISE
PROCES VERBAL
MINISTERE DE L'INTERIEUR
DIRECTION GENERALE
DE LA POLICE NATIONALE
DIRECTION CENTRALE
DE LA POLICE JUDICIAIRE
DIVISION NATIONALE
ANTI-TERRORISTE
L'an deux mille un
Le vingt-deux juin à neuf heures vingt-cinq
NOUS, Frédéric PIWOWARCZYK, lieutenant de police
en fonction à la division nationale anti-terroriste de la
direction centrale de la police judiciaire
n° 144/,4-Z-2
AFFAIRE:
C/...X
Assassinat en relation avec
une entreprise terroriste
OBJET
Déposition de monsieur
Jean-Jacques MAURIN, 53 ans,
colonel (E.R.) de l'armée de terre
française.
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Officier de police judiciaire en résidence à PARIS, ------------------------------------ Agissant en vertu et pour l'exécution de la commission rogatoire délivrée
le 3 octobre 2000 par monsieur Jean-Louis BRUGUIERE, Premier viceprésident chargé de l'instruction et monsieur Jean-François RICARD,
Premier juge d'instruction au tribunal de grande instance de PARIS, relative
à l'information n° 1341 suivie contre X... du chef d'assassinat en relation
avec une entreprise terroriste, --------------------------------------------------------------- Vu les articles 81, 151 et suivants du code de procédure pénale, ------------- Avis préalablement donné à monsieur le procureur de la République
territorialement compétent,-------------------------------------------------------------------- Nous trouvant dans les locaux de la brigade territoriale de gendarmerie
de CAMBO-LES-BAINS (Pyrénées Atlantiques),--------------------------------------- Avons mandé et constatons que se présente monsieur Jean-Jacques
MAURIN, lequel connaissance prise de la délégation judiciaire en notre
possession et après avoir prêté serment dans les formes de droit, dépose
comme suit: -------------------------------------------------------------------------------------
--- "Je me nomme Jean-Jacques MAURIN, je suis né le 17 mai 1948 à
ESCOUSSANS (Gironde), je suis de nationalité française, je suis colonel en
retraite de l'armée de terre depuis le 16 mai 1998,------------------------------------ Vous me faites part des dispositions des articles 62-1, 78 et 153 du code
de procédure pénale, par souci de sécurité ou pour empêcher toutes
pressions ou représailles envers moi ou ma famille, j'élis domicile au siège
de votre service et mon adresse sera répertoriée sous le numéro 18 de
votre registre spécial. --------------------------------------------------------------------------- En ce qui concerne cette enquête, j'ai été entendu à trois reprises par la
commission d'enquête parlementaire française, le 3 juin 1998 puis en
octobre de la même année,------------------------------------------------------------------- J'ai été chargé d'une mission particulière par l'amiral Jacques LANXADE,
chef d'état-major des armées, en tant que adjoint à l'attaché défense et
adjoint opérationnel conseiller du chef d'état-major de l'armée rwandaise. ----- Mes fonctions ont pris effet le 24 avril 1992, date de mon arrivée au
Rwanda jusqu'au 14 avril 1994. Mon supérieur direct était le colonel de
gendarmerie Bernard CUSSAC. Auprès des "Forces armées rwandaises",
de par ma fonction, j'avais des contacts quasi quotidiens avec le général
Déogratias NSABIMANA, exceptionnels avec le colonel Théoneste
BAGOSORA et le général Augustin NDINDILIYIMANA (lorsque ces derniers
assistaient aux réunions de crise à l'état-major des F.A.R.), inexi ants avec
les deux ministres de la Défense. ---------------------------------------- ------------- Pour m'assister dans cette mission, j'avais comm adjoint le
commandant Grégoire de SAINT QUENTIN, conseiller du cl1e ^e bataillon
parachutistes le major Alois NTABAKUZE.-------------------------- ¢- I
V
Suite au procès-verbal numéro 144/---------------------------------------Feuillet numéro DEUX-------------------------------------------------------------------------- A l'occasion de mes fonctions auprès des "Forces armées rwandaises",
j'ai eu l'occasion de constater que celles-ci disposaient effectivement de
moyens d'écoute et d'interception, en FM et AM et j'ai personnellement
visité deux de leurs centres à KIGALI et GISENYI dont le responsable à
l'époque, pour GISENYI, était le colonel Anatole NSENGYUMVA.---------------- QUESTION : Durant votre séjour au Rwanda, avez vous eu
connaissance que des aéronefs des F.A.R. aient été abattus par des tirs de
missilessol-air ?---------------------------------------------------------------------------------- REPONSE : Non, pas à ma connaissance. J'ai simplement entendu dire
qu'un hélicoptère de type "Gazelle" s'était écrasé, en mars 1993, sur la
commune CYERU. Par contre de par la lecture des rapports des F.A.R. mis
à disposition, je peux vous dire que dès octobre 1990, le "Front patriotique
rwandais" disposait de missiles sol-air, car des moyens aériens rwandais
avaient été abattus lors du premier conflit d'octobre 1990.
--- QUESTION : A votre connaissance, les F.A.R. disposaient-elles de
missiles sol-air et certains de ses membres avaient-ils été formés à leur
utilisation
--- REPONSE : A ma connaissance l'armée rwandaise ne disposait pas de
missiles sol-air et d'autre part, toujours à ma connaissance, aucune
formation française n'a été dispensée pour l'utilisation de ce type de
munitions. Je peux vous préciser que j'avais sous mes ordres un sousofficier français spécialiste en munitions petits et gros calibres plus
spécialement chargé de gérer le stock de l'armée rwandaise et nous avions,
à ce titre, accès à ce stock en permanence et il n'y a jamais été constaté la
présence de missiles sol-air.------------------------------------------------------------------ QUESTION : Pouvez vous nous résumer les événements que vous avez
constatés pour la journée du 6 avril 1994 ?---------------------------------------------- REPONSE : Comme chaque matin, à 7 heures 30, j'ai eu la réunion à
l'état major des F.A.R. qui ce jour là était conduite par le lieutenant-colonel
Ephrem RWABALINDA, conseiller du chef d'état-major, en raison de
l'absence du général Déogratias NSABIMANA.
--- Ce matin là, il a été fait état en ma présence, de l'interception dans les
secteurs démilitarisés de BYUMBA et TUMBA, par des militaires des F.A.R.,
d'unités du F.P.R., ce qui laissait présager ou présumer une possibilité
d'attaque sur la ville de KIGALI étant donné la position haute de BYUMBA et
TUMBA. En réaction, l'état-major des F.A.R. a mis en alerte ses
commandants d'unités des régions concernées.--------------------------------------- Suite à cette réunion à l'état-major et en l'absence du colonel CUSSAC,
j'ai rédigé un compte rendu journalier à l'intention des destinataires
habituels faisant état des éléments donnés lors de la réunion. Le restant de
la journée, je l'ai passé à mon bureau puis à mon domicile. ---------------------A 21 heures 20, le commandant de SAINT QUENTIN m'a téléphoné pour
me rendre compte que l'avion présidentiel rwandais s'était écrasé dans la
résidence privée du président HABYARIMANA, à proximité du camp de
"Kanombe". M'ayant sollicité l'accord de se rendre sur place, j'ai autorisé de
SAINT QUENTIN à s'y rendre sachant que cet avion était piloté par des
Français avec qui j'avais d'excellentes relations. A ce moment là, j'ignorais
qui se trouvait à bord de l'avion, ce n'est que tard dans la /nàit que nous
avons eu les identités des victimes et à ma grande surprise que le
général NSABIMANA en faisait partie.-----------------------------/--.r.-7--------------------------------------
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---------------------------------Suite au proces-verbal numero 144/
Feuillet numéro TROIS -----------------------------------------------------------------------
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--- Durant cette nuit, de par mes responsabilités, l'attaché de défense étant
absent, j'ai donné comme consigne à tous les coopérants français de rester
à leur domicile et d'éviter tous déplacements. Quant à moi, j'ai rejoint
l'ambassade de France vers 21 heures 40 où je me suis mis à disposition
de l'ambassadeur. Avec l'autorisation de celui-ci, je me suis rendu, un peu
avant minuit, à l'état-major des F.A.R. à KIGALI pour présenter mes
condoléances et m'enquérir de la situation.-------------------------------------------Pour en revenir aux instants qui ont suivi le crash, dans la nuit du 6 au 7
avril 1994, le commandant de SAINT QUENTIN s'est rendu à deux reprises
sur les lieux du crash, en compagnie du major rwandais Alois NTABAKUZE.
La première fois, arrivé vers 22 heures dans la résidence du président
HABYARIMANA, il n'a pu s'approcher immédiatement des débris de l'avion
en raison de la nervosité de la Garde présidentielle puis après négociations
a pu finalement s'en approcher sans réussir toutefois à identifier les corps
de l'équipage français. Il a quitté les lieux vers 3 heures, le 7 avril, pour y
revenir vers 8 heures et a pu, cette fois-ci, identifier les corps des trois
membres de l'équipage. Il a tenté, en vain, de retrouver, la "boite noire" de
l'appareil. A ce jour, nous ignorons en fait si l'avion disposait d'une "boite
noire" . ---------------------------------------------------------------------------------------- QUESTION : De par vos relations personnelles avec les membres de
l'équipage de l'avion présidentiel, étiez vous informé de leurs
déplacements? ---------------------------------------------------------------------------------- REPONSE : Non, jamais mais, à posteriori, lors de nos discussions
informelles, j'en étais généralement avisé et je dois vous dire que le copilote
Jean-Pierre MINABERRY m'avait fait part de ses craintes dues à
l'interdiction qui avait été imposée par le F.P.R. du survol du "Conseil
national du développement", obligeant l'ensemble des aéronefs civils ou
militaires à utiliser le même axe d'approche de l'aéroport de "Kanombe" en
empruntant le couloir de "Masaka". Au cours d'une discussion, Jean-Pierre
MINABERRY m'avait fait part de sa conviction que le F.P.R. disposait de
missiles sol-air dans l'enceinte du C.N.D.------------------------------------------------- En ce qui concerne la présence du bataillon du F.P.R. dans l'enceinte du
C.N.D., je n'ai aucune information particulière à vous rapporter aujourd'hui
en dehors de ce que la M.I.N.U.A.R. nous disait.--------------------------------------- QUESTION : De par vos fonctions auprès de l'état-major des F.A.R.,
avez vous eu connaissance, dans la journée du 7 avril 1994, de messages
ayant eu un lien avec l'attentat commis la veille ?-------------------------------------- REPONSE : Non, pas dans la journée du 7 avril, par contre vers le 10
avril, à l'état-major des F.A.R., j'ai eu connaissance d'un message
dactylographié. Après m'avoir présenté et avoir lu copie du message
annexé à votre procès-verbal numéro 144/152 en date du 22 juin 2000, je
peux dire qu'il s'agit du document que j'ai lu vers le 10 avril à l'état-major,
celui-ci étant daté du "07-8h45-B-Avril 94".----------------------------------------------- QUESTION : Après l'attentat du 6 avril, avez vous eu l'impression que
les F.A.R. étaient préparées à l'élimination du chef de l'Etat et du chef
d'état-major, pensez vous que les F.A.R. pouvaient être à l'origine d'une
tentative de coup d'Etat ?----------------------------------------------- - ------------------ REPONSE : Certainement pas, les F.A.R. n'étaient b olument pas
préparées à ce type d'événement même si elles étaient pr occupées par
les accords d'ARUSHA qui prévoyaient la diminution de fnoftié des effectifs
en vue de la création de la nouvelle armée. ----------------- -- V------------------
D3is^
Suite au procès-verbal numéro 144/JI+Q
Feuillet numéro QUATRE ----------------------
-
--- Ma conviction personnelle est que le F.P.R. avait très bien préparé son
coup. Une infiltration, même de jour, à partir du C.N.D. vers la plaine de
"Masaka" était tout à fait réalisable par une équipe aguerrie. ---- ------------------ Je ne vois rien d'autre à ajouter à ma déposition".-------------MAURIN,
Après lecture faite par lui-même, monsieur Jean-Jacqu
Après
persiste et signe le présent avec nous à douze heures.--------Le lieut n int de police
Monsieur Jean-Jacques MAURIN
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