Avec notre correspondante à Bruxelles, Laure Broulard
Michèle Hirsch s’est focalisée sur le cas de Séraphin Twahirwa, poursuivi pour les viols d’au moins douze femmes, mais aussi d’un nombre indéterminé d’autres femmes tutsis non identifiées. Des viols commis par lui ou par des miliciens sous ses ordres entre janvier et juin 1994 selon l’acte d’accusation. Des viols comme «
crime de masse », comme «
arme génocidaire » pour l’avocate des parties civiles, qui estime que c'est une première dans le cadre d’un procès de compétence universelle sur le génocide des Tutsis en Belgique.
«
Il y a eu précédemment une incrimination de viol comme crime de guerre dans le procès d’Ephrem Nkezabera (surnommé le Banquier du génocide) en 2009. Mais les victimes n’avaient pas témoigné. Or, ça a été le cas ici. La cour a entendu de nombreuses victimes de viol, parfois en audience publique, mais le plus souvent à huit-clos. Par le viol, l’accusé procédait en réalité à une sorte de nettoyage ethnique. »
L’avocate replace les faits dans le cadre de la propagande raciste des années 1990 au Rwanda, qui présentait les femmes tutsies comme des espionnes hypersexualisées au service de leur communauté, celle des rebelles du FPR, mais aussi de l’ennemi tutsi de l’intérieur. Dans la salle, l’atmosphère est lourde, plusieurs rescapées du génocide ont les larmes aux yeux.
Félicité Lyamukuru a assisté à la plaidoirie. «
Vu la manière dont on a dépeint la femme tutsi, c’est très important qu’aujourd’hui, dans un procès comme celui-ci, on puisse comprendre comment elle était diabolisée, humiliée, détruite dans sa matrice… Et ça laisse sans mots. »
De son côté, Séraphin Twahirwa conteste les faits qui lui sont reprochés. Ses avocats questionnent la crédibilité des témoins et l’équité de la procédure.