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Jeudi 25 mai, dixième jour d’audience, la journée s’ouvre sur l’audition de Monsieur Albert Kabera, dernier assaillant entendu au sujet des barrières. Il commence sa déclaration en disant qu’il a travaillé au service de Philippe Hategekimana : « Ils m’ont utilisé pendant le génocide ». Il poursuit rapidement en lisant les crimes commis par l’accusé dont il a eu connaissance. Le Président commencera ses questions en demandant à l’intéressé de présenter sa situation en 1994. Ce dernier était agriculteur au moment où on lui a demandé de cesser son activité et de se rendre sur les barrières. Le témoin parle ensuite rapidement de Biguma, le Président lui demande donc de le décrire. Il dira que ce dernier était « de teint clair, gros et de petite taille ». Il est intéressant de noter que tous les témoins décrivent Monsieur Manier comme quelqu’un de gros. La défense soutient cependant à chaque fois que cet élément est étonnant, l’accusé étant un « grand sportif » à l’époque des faits. Monsieur Kabera poursuit en déclinant les différences entre les galons des adjudants et de capitaine. Le témoin dira ainsi que Biguma portait « une étoile et une barrette » et qu’il le distinguait de Birikunzira notamment parce que ce dernier, étant capitaine, « avait trois étoiles ». Monsieur Lavergne l’interroge ensuite sur l’existence de barrière et sur sa présence sur ces dernières. Les descriptions qu’il en fait correspondent globalement, avec des éléments de repères un peu différents parfois, à ce qui a été présenté par les autres témoins. Monsieur Kabera a travaillé à la barrière de l’Akazu K’amazi. Interrogé sur ce point par le Président, il parlera du meurtre d’un jeune homme nommé Nzeyimana à la barrière dite « des Burundais ». Il dit ainsi « Biguma a tiré sur lui. On a entendu les bruits de balles et les gendarmes étaient en train de poursuivre les réfugiés dans le champ d’avocatiers [ce point de repère est souvent utilisé par les témoins. Il se situe à côté de la gendarmerie] ». L’audition se poursuit en évoquant la présence du témoin à une seconde barrière, celle de Bugaba, qui, selon lui, servait « juste à assurer la sécurité de nos domiciles car nos femmes avaient peur que les réfugiés qui fuyaient ne les tuent ». Il cite ensuite plusieurs personnes présentes avec lui à ce barrage. Il soutient que la construction de ce dernier a été ordonnée par « le capitaine de la gendarmerie et Biguma ». Il poursuit en parlant de l’existence de « réunions secrètes pour préparer le génocide ». Il évoque notamment un rassemblement qui aurait eu lieu au domicile de Pascal Barahira, sur ordre du capitaine. Il n’était pas lui-même présent à la réunion mais était sur place pour « transporter des planches de bois » et a eu les informations par Anastase Gatananzuzi qui a pu y assister. Il peut être intéressant de noter ici que, la veille déjà, le premier témoin de la journée, Damascène Bukuba, avait déjà évoqué ces réunions dans les « ménages ». Il situe ensuite la mise en place des barrières six jours après ce rassemblement, « quand Biguma a tué un certain Anastase Makuza qui était professeur. […] Makuza disait à Biguma que le PL allait gagner contre le MRND. Biguma est allé chercher un fusil, il sortait du bar ». Monsieur Lavergne continue en lui demandant de citer les responsables des différentes barrières. Monsieur Kabera cite les différents noms. « Musabyimana, Nyamugabo et Nzeyimana pour la barrière de Bugaba, Nakirende et Straton Rudahunga ». Il confirme également la présence de gendarmes à la barrière, il cite notamment trois noms : « Catcher, Havugimana et César ». Il évoquera ensuite le groupe des Tutsi qui ont été arrêtés et emmenés à la maison de Boniface. Sur interrogation du Président, il donne plus de précisions sur cet évènement. Ainsi, il affirme avoir joué un rôle dans le massacre de ces 28 personnes. Et il dit que Birikunzira et Biguma « sont arrivés sur place à bord d’un véhicule de la gendarmerie, de couleur blanche, ils ont donné l’ordre les tuer et ils sont repartis ». L’audition se poursuit et Monsieur Kabera est interrogé sur une attaque dont il a parlé précédemment, sur la colline de Nyamiyaga. Il dit ainsi : « L’attaque est venue de Nyarusange mais elle n’a pas réussi à accomplir sa mission. Puis la gendarmerie est arrivée avec Biguma qui avait une arme de haut calibre. Il l’a installée à l’école de Mushirarungu pour tirer dans ces gens. Il y avait là-bas un militaire qui avait fui et qui avait lui aussi un fusil. Il a essayé de défendre ceux qui étaient avec lui mais quand il a constaté que l’autre arme était plus puissante, il a dit qu’il fallait se protéger. A ce moment-là, Biguma a commencé à utiliser le “mashinga” ». Monsieur Lavergne tente de comprendre l’arme qui a été utilisée. Si le témoin la désigne comme une mitrailleuse, il semblerait, au regard de ses descriptions, que cela correspond davantage à un mortier. Enfin, le témoin confirmera avoir été jugé par un tribunal Gacaca et avoir été condamné à 10 ans et 6 mois de prison. Maître Karongozi prendra ensuite la parole et interrogera Monsieur Kabera sur le meurtre de Narcisse Makuza. Maître Gisagara reviendra ensuite sur l’arme utilisée lors de l’attaque et le témoin confirmera que « seul un militaire peut différencier les armes, cela peut être l’un ou l’autre [une mitrailleuse et un mortier] ». Aussi, il demandera à l’intéressé s’il connaît la colline de Nyabubare. Ce dernier dira qu’elle est effectivement située dans le secteur de Mushirarungu et que c’est effectivement le nom qui est actuellement donné à la localité de Nyamiyaga. Il semblerait en effet que le témoin parle de l’attaque de Nyabubare car la description qu’il en fait correspond aux éléments survenus à cet endroit. Maître Philippart demandera une précision au témoin, qu’il sera en incapacité de donner. Le Parquet est ensuite invité à poursuivre l’interrogatoire. L’avocate générale posera plusieurs questions, visant à confirmer les déclarations faites précédemment par Monsieur Kabera. Elle l’interrogera notamment sur la couleur des véhicules utilisés par Biguma. Rouge et blanc. Enfin, c’est l’une des avocates de la défense, Maître Duque, la collaboratrice de Maître Guedj, qui procédera au contre-interrogatoire du témoin. Cette dernière reviendra sur les contradictions entre les différentes auditions antérieures de Monsieur Kabera et les déclarations faites ce jour. Elle évoque aussi un certain manque de concordance entre les déclarations du témoin et celles des autres assaillants, notamment Straton Rudahunga et Callixte Munyabeyo. L’avocate poursuit en expliquant que certains faits évoqués par l’intéressé ont fait l’objet d’un non-lieu définitif par la Chambre de l’instruction, notamment pour le meurtre du jeune Muzeyimana et de Jean Simungwa. Enfin, Maître Duque l’interrogera sur la procédure de remise de peine pour les condamnés qui acceptent de sensibiliser la population à plaider coupable. Monsieur Kabera dira qu’effectivement une loi prévoit que les personnes qui acceptent de sensibiliser la population à dire la vérité sur leurs exactions ne pourront être condamnées qu’à des peines d’emprisonnement comprises entre 10 et 12 ans. Le Ministère public prend la parole et l’avocate générale fait observer à la Cour et aux parties que Maître Duque a interrogé le témoin sur les déclarations de Callixte Munyabeyo, sans procéder à la lecture de ce document. Le principe étant l’oralité des débats, il conviendrait que la défense fasse attention par la suite. L’audition ayant été plus longue que prévue, le Président suspend l’audience pour une pause méridienne.
À 13h30, Madame Sabine Uwase, rescapée du génocide constituée partie civile auprès de Maître Karongozi, entre dans la salle. Elle commencera son audition par une déclaration spontanée dans laquelle elle présentera son histoire et celle de sa famille pendant ces trois mois de 1994. Troisième enfant d’une famille de huit originaire de Nyanza, elle a expliqué que les persécutions ont commencé bien avant 1994. Elle se rappelle l’arrestation de son père quand elle était enfant, accusé d’être un « complice des Inkotanyi ». Cependant, elle se rappelle aussi que, dans la ville de Nyanza, les relations entre les Hutu et les Tutsi étaient plutôt bonnes, « ils étaient même nos amis, on vivait ensemble ». Malgré ce vivre-ensemble, Madame Uwase décrit un changement radical au 7 avril 1994 : la peur s’est installée dans les familles tutsi et son père les a obligés à dormir dehors, craignant d’être tués durant la nuit. Le témoin explique que la situation s’est complètement dégradée le 22 avril, quand les gendarmes et les militaires sont arrivés à Nyanza. Toute sa famille a décidé de se séparer, pour se donner plus de chances de survie. Elle est allée se réfugier chez sa grand-mère à Kavumu. Deux jours après, les Interahamwe sont arrivés munis de différentes armes traditionnelles. Ils ont fait sortir tout le monde de la maison et les ont emmenés ailleurs. Sur la route, à une barrière, un jeune homme sauve son petit frère, lui donnant un gourdin et l’intégrant à un groupe de miliciens. Madame Uwase et les autres sont conduits à la brigade de Nyanza et enfermés dans un cachot. Plusieurs dizaines de personnes seront ensuite tuées au stade de Nyanza. Le témoin confirme que ce sont bien les gendarmes qui gardaient le cachot et que ces derniers refusaient de leur donner à boire et à manger. « Je pensais que les gendarmes de Nyanza étaient là pour assurer la sécurité de la population. C’était le cas avant ». Un gendarme dénommé Hassan la fait sortir du cachot et la cache dans une autre cellule, lui permettant ainsi de survivre. Tous les autres Tutsi qui avaient été enfermés ont été conduits au stade de Nyanza et massacrés sur place. Elle a par la suite été cachée dans la maison d’une femme de militaire. Après le génocide, Madame Uwase est revenue à Nyanza, pensant peut-être retrouver des membres de sa famille. Elle est la seule survivante. Le Président Lavergne prend la parole et, après avoir remercié le témoin pour son récit, lui pose diverses questions, lui demandant notamment le nom des membres de sa famille qui sont décédés et le nom du gendarme qui l’a sauvé. Maître Tapi prend la suite et demande à l’intéressée, étant donné qu’elle a été sauvée par un gendarme, si ces derniers « avaient vraiment le choix de tuer ou faire tuer », s’il était « possible de ne pas tuer quand on était gendarme ». Madame Uwase répondra que « c’est parce qu’il avait ce cœur là que j’ai pu survivre. Si nous avions eu d’autres Hassan, beaucoup de gens auraient pu survivre ». Le Ministère public ne souhaitera pas poser de questions et Maître Duque, pour la défense, demandera simplement combien de personnes le cachot pouvait accueillir. Le témoin dira qu’au moment où elle y était enfermée, « nous étions peut-être 500 personnes ». Madame Uwase n’ayant pas de photographies de sa famille sur elle, le Président propose qu’une projection soit tout de même réalisée le lendemain matin.
Le troisième témoin de la journée, Monsieur Emmanuel Kamugunga, s’avancera vers la Cour et déclarera qu’il souhaite se constituer partie civile. Monsieur Lavergne décide de suspendre l’audience afin que le témoin puisse se rapprocher des différents conseils présents. Après une vingtaine de minutes, c’est finalement Maître Gisagara qui sera désigné et qui déposera la constitution. Monsieur Kamugunga ne prêtera donc pas serment et commencera sa déposition par une déclaration spontanée. Ce dernier déclare avoir 10 ans au moment du génocide. Le Président s’étonne car le témoin avait dit aux enquêteurs du TPIR être né en 1977. Les questions se poursuivent et le témoin est très flou dans ses réponses. La Cour a du mal à comprendre ses déclarations. Il dira tout de même que « l’adjudant Biguma nous a trouvés dans un bois. Il a lancé un obus sur notre groupe et nous nous sommes séparés. Cet obus m’a touché la tête. Je suis parti m’abriter plus loin dans un bâtiment à côté d’un champ de manioc ». Il soutiendra également avoir vu des gendarmes aux barrières, notamment à bord d’un véhicule Toyota rouge. Enfin, il parviendra à identifier un mortier sur une planche photographique. Monsieur Lavergne lui demandera combien de personnes de sa famille sont décédées pendant le génocide. « Ma sœur, mon grand-frère, mon petit frère et ma mère qui est morte à la barrière. Mon père était mort avant ». Après quelques questions de la part de Maître Gisagara, le Ministère public prendra la parole. L’avocate générale demandera notamment au témoin de confirmer que l’audition le concernant, présente au dossier, a bien été réalisée par les enquêteurs du TPIR, qui se sont déplacés au Rwanda. La magistrate, par ses interrogations, permet de rappeler à la Cour que lors de ces auditions, les questions ne sont pas toujours retranscrites, pouvant laisser penser qu’il s’agit de déclarations spontanées alors que le témoin est effectivement guidé par les enquêteurs. Maître Duque est ensuite invitée à prendre la parole. Elle commencera par dire à la Cour que le témoin n’a été « entendu qu’une seule fois par le TPIR, en 2001 », et qu’il ne mentionne Philippe Hategekimana que dans un très court paragraphe. Selon elle, il est « indispensable que la défense puisse avoir du temps pour exercer ses droits », et que la situation actuelle en constitue une violation. Après que le Président lui a rappelé que l’audition du témoin était présente au dossier et que les autres parties ne disposaient pas de plus d’éléments, soutenant donc que les droits de la défense étaient respectés, il demande à l’avocate de poser ses questions au témoin. Elle lui pose les mêmes questions qu’aux témoins précédents, à savoir l’aspect physique de Monsieur Hategekimana, « une personnes grosse et petite », la description de son uniforme, « un béret rouge avec un uniforme kaki », les insignes cousus à ce dernier, « deux étoiles mais différentes de celles des officiers ». L’avocate de Monsieur Manier soulèvera ainsi quelques légères contradictions, les insignes étant composés, selon d’autres témoins, d’une étoile et « d’une barrette ». Les questions posées reviendront sur des éléments d’une grande précision. Aussi, Maître Duque demandera à Monsieur Kamugunga pourquoi ce dernier n’a pas évoqué le meurtre de sa mère devant les gendarmes du TPIR soutenant que c’est étonnant car « on dirait pourtant que cela représente un évènement important ». Le témoin rappellera, comme l’avait fait la magistrate du Parquet, qu’il s’est contenté de répondre aux questions qui lui avait été posées, même si ces dernières ne sont pas retranscrites dans le document. L’audition de ce témoin se termine finalement.
L’avant dernier témoin de la journée, Monsieur Emmanuel Rubagumya, est invité à s’avancer vers la barre. Il ne souhaitera pas faire de déclaration spontanée et préfèrera répondre aux questions de la Cour. Il décrit l’accusé comme une personne « de teint noir, grand et gros ». Il poursuit en disant qu’il portait « un uniforme kaki avec un béret rouge et une étoile sur l’épaule, ce qui correspondait au grade d’adjudant ». Etonnement, il dit connaître ce dernier sous le nom de Biguma et « Ndigimana ». Le Président lui demande s’il ne confond pas avec le nom Hategekimana, ce que le témoin confirmera. Monsieur Lavergne précise tout de même que le témoin avait déjà désigné Monsieur Manier sous ce nom lors de sa précédente audition. Il poursuit en déclarant ne connaître personne d’autre portant le nom de Biguma. Quand il est interrogé sur le rôle de ce dernier dans les tueries, Monsieur Rubagumya parlera du meurtre d’un jeune homme dans le champ d’avocatiers des gendarmes. Il parlera aussi du meurtre du bourgmestre de Ntyazo, Narcisse Nyagasaza. Cependant, il semblerait que le témoin mélange différents évènements. En effet, la description qu’il fait de la mort du bourgmestre ne correspond pas du tout aux déclarations des autres témoins, qui concordent entre elles. En réalité, il s’avère qu’il n’a pas vraiment assisté au meurtre et qu’il a conclu que c’était le bourgmestre parce qu’il a entendu, depuis sa cachette dans un bois, des passants dire : « Ah, c’est Nyagasaza ! ». Aussi, le Président poursuit son interrogatoire et demande des précisions au témoin. Il y aura énormément de divergences avec les premières déclarations qu’il a pu faire. Il affirme aujourd’hui qu’il était caché seul, alors qu’il soutenait avant qu’il était avec sa femme et ses deux enfants. Il dit ce jeudi qu’à ce moment il ne pleuvait pas, alors qu’il avait déclaré antérieurement qu’« il y avait une petite pluie ». Si ces confusions sont tout à fait compréhensibles, il est important de les notifier car l’appréciation qui pourra en être faite par les jurés est certainement le manque de crédibilité du témoin. Les contradictions et les manques de précision se poursuivront dans le reste de l’audition rendant ses déclarations difficilement audibles par la Cour. Le Président demande tout de même au témoin s’il a des problèmes de mémoire. Ce qu’il confirmera.
Enfin, le dernier témoin de la journée, le général Jean Varret, entre dans la salle. Ce dernier a été convoqué par le Président Lavergne la semaine précédente car son nom et certaines de ses déclarations étaient revenues à plusieurs reprises lors des auditions des experts. En effet, Monsieur Varret a rencontré le colonel Pierre-Célestin Rwagafilita quand ce dernier était chef d’état-major de la gendarmerie au début des années 1990. L’échange privé entre les deux militaires a beaucoup été évoqué lors des audiences. En effet, le général Varret explique dans son livre Souviens-toi. Mémoire à l'usage des générations futures qu’à ce moment déjà, Rwagafilita lui a demandé une livraison d’armes lourdes afin de « participer avec l’armée à la liquidation du problème. Le problème, il est très simple : les Tutsi ne sont pas nombreux, on va les liquider ». Il a semblé pertinent à la Cour d’entendre ce témoin afin de pouvoir l’interroger sur cet évènement et éviter que des propos ne lui soient prêtés. Le militaire ne fera pas de déclaration spontanée, il dira simplement qu’il est toujours tenu au droit de réserve et qu’il ne connaît pas l’accusé. Le Président lui confirme qu’il n’est là que pour parler du contexte rwandais. Le général expliquera donc dans quelles conditions il a été envoyé au Rwanda en 1990. Lorsqu’il arrive sur place, ses inquiétudes sont confirmées, il « découvre des tensions internes très graves et des relations difficiles entre les Hutu et les Tutsi ». Le chef d’état-major de la gendarmerie de l’époque, Monsieur Rwagafilita, lui demande rapidement un rendez-vous avec l’ensemble des gendarmes. Lors de cet entretien, il dit avoir besoin d’armes, notamment des mortiers et des mitrailleuses. Etonné, le général Varret répondra qu’il ne peut fournir que des équipements de gendarmerie et non pas des armes lourdes. Le colonel Rwagafilita demande alors aux autres personnes de sortir et s’entretient en tête à tête avec son homologue français. Il lui explique que ces équipements lourds serviront à régler le problème des Tutsi. Enfin, il termine en faisant savoir à la Cour qu’il a reçu un fax du gendarme Michel Robardey, qui soutenait que cet échange n’avait pas eu lieu, et qui, dans ce courrier, revient sur cette position, soutenant que ces propos de Rwagafilita étaient probablement réels. Les avocats des parties civiles poseront ensuite plusieurs questions au témoin, notamment sur l’organisation de l’intervention française au Rwanda, avant et pendant le génocide. Finalement, c’est Maître Duque qui prendra la parole. Elle commencera par dire qu’il est « difficile pour la défense de faire un contre-interrogatoire adéquat » et qu’elle se contentera donc de questions de contexte. Après plusieurs questions sur le FPR, elle terminera en demandant au général Varret s’il est bien certain que Rwagafilita parlait des Tutsi et non pas des membres du FPR. Ce dernier lui répondra par la négative : « Non, il m’a parlé des Tutsi. Il a même précisé “les Tutsi au total”. Il voulait supprimer les femmes, les enfants et les vieillards ».
Par Emma Ruquet
Commission juridique d’Ibuka France