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Un collectif d’avocats représentant environ 70 victimes d’actes criminels dans les Hauts et Moyens Plateaux du Sud-Kivu en République Démocratique du Congo (RDC) a rédigé plusieurs plaintes qui ont été déposées auprès de l’auditeur général et du Procureur de la République au Congo, ont expliqué vendredi deux membres du collectif, Bernard Maingain et Jean-Paul Shaka, lors d’une conférence de presse à Bruxelles.
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La communauté banyamulenge est victime, depuis mars 2017, d’atrocités commises entre autres par des officiers de l’armée congolaise (FARDC), sur les territoires de Fizi, Mwenga et Uvira, dans les Hauts et Moyens Plateaux de la province du Sud-Kivu, ont dénoncé les avocats. « C’est une épuration ethnique qui se met en place », a dénoncé Me Bernard Maingain, du barreau de Bruxelles. « Il y a une montée des discours de haine, aussi grave et aussi puissante que celle des années 1990 dans la région des Grands Lacs. Ce discours est fondamentalement illégal, puisque les personnes qu’il vise sont de nationalité congolaise. Même ici en Belgique, des appels à tuer sont lancés. Certaines personnes affirment qu’il faut tuer ‘tous ces banyamulenge qui se trouvent au Congo’ », a-t-il affirmé.
« Nous avons collecté de nombreux témoignages sur place. Nous avons plus de 10 heures de témoignage enregistrées », a poursuivi Me Jean-Paul Shaka, du barreau de New-York. « Nous avons ensuite rédigé des plaintes et les avons adressées à l’auditeur général et au Procureur de la République. Nous avons rencontré ces autorités en septembre et avons insisté pour qu’ils poursuivent les auteurs des pillages, des destructions massives et des crimes », a déclaré l’avocat. « Nous n’avons pas encore reçu de réponse formelle de leur part, mais elles nous ont promis d’examiner le dossier ».
Les avocats ont affirmé « avoir dans le viseur » deux généraux de la FARDC en particulier, Dieudonné Muhima et Akili Mundos. « Il y a des preuves de collaboration de l’armée avec les tueurs », a précisé Me Shaka. « Nous appelons la Belgique et l’Europe à ne pas rester indifférents, et le gouvernement congolais à arrêter cette spirale infernale en rétablissant l’autorité de l’État ».
Vendredi, lors de la conférence de presse à Bruxelles, deux femmes, représentant les victimes, ont relaté ce qu’elles ont pu observer sur place. « J’étais encore à Mwenga au mois d’août et je porte la voix des mamans. Il y a quelque temps, deux femmes ont disparu après s’être rendues aux champs. Depuis, les autres ont peur de retourner travailler aux champs. La suite logique de cette peur qui est générée est la famine. Les seules denrées alimentaires sont larguées par avion. Il n’y a aucune aide du gouvernement », a relaté Béatrice Gisaro. « Des femmes ont aussi été tabassées alors qu’elles faisaient un ‘sitting’ pour protester contre les exactions dont elles sont la cible. Et encore en juin dernier quatre femmes ont été tuées. Nous sommes allés à Kinshasa avec deux mamans pour dire que c’est assez », a-t-elle exprimé.
Estelle Ruhimbika a quant à elle fait part de ce dont elle a été témoin dans un camp de réfugiés à trois heures de route d’Uvira. « Plusieurs centaines de personnes ont fui leurs maisons à Uvira, car la situation devenait trop dangereuse. Là où elles sont maintenant, c’est la plaine, entourée de brousse. Il n’y a rien. Elles sont arrivées là au bout de quatre jours de marche et ne vivent que de l’assistance de la communauté. Cela ne peut pas être une situation permanente. Il y a tellement de déplacés que ce n’est plus possible d’agir en ne se basant que sur les aides spontanées », a-t-elle raconté.