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[René Galinié lit un texte face caméra] En juillet 1991, je n'accepte pas la prolongation de séjour au Rwanda qui m'est proposée. Au Rwanda j'exerce les fonctions suivantes : attaché de défense, chef de la Mission d'assistance militaire -- la MAM --, commandant de l'opération Noroît depuis que les hostilités ont été ouvertes. Bien que cette prolongation fut souhaitée par Monsieur Martres, l'ambassadeur, avec lequel j'ai les meilleures relations fondées sur la confiance réciproque. Pourquoi ce refus ? Pourquoi ? Parce que dès novembre -- fin novembre, fin novembre -- 1990, je perçois clairement que je ne pourrai plus accomplir ma mission sans des accommodements que, on…, que je refuse d'accepter. Parce que je les juge non seulement contraires à l'éthique, à la lettre et à l'esprit de la mission mais encore à sa réussite. Dans ces conditions, il m'est rendu impossible de prolonger une présence devenue inefficace malgré les alertes opiniâtrement réitérées portées par de nombreux messages adressés à des autorités dont certaines, parmi les plus influentes, n'ont pas voulu tenir compte. Au moment de mon départ donc, je choisis de rédiger non pas le message…, non pas le rapport habituel de fin de stage mais un message car ce procédé me permet de multiplier les destinataires. Malheureusement, cette ultime précaution a été inutile. L'état-major particulier, euh, du président de la République française -- bien que je ne sois pas placé directement sous son autorité -- me fait savoir sans ménagement que ce message sera considéré comme non advenu. La commission Quilès en 1998 me déclare qu'il est introuvable. Ce message fait un point précis de la situation de mille neuf cent quatre-vingt…, de juillet 91. Il dénonce les erreurs d'orientation dans le soutien qui est accordé aux Rwandais, dénonce les responsables des mesures d'élimination engagées et qui vont croissantes. Il propose enfin des solutions possibles pour que soient écartés du pouvoir les plus extrémistes des dirigeants, militaires en particulier. Je multiplie cependant encore les avertissements relatifs à la préparation de ce que je pense être à ce moment-là la possibilité d'un crime de masse. [Il ne semble plus lire ses notes] À ce moment-là je n'envisage pas -- je le dis franchement -- le génocide, pas encore. Le fait que la menace sur la population, euh, me semblait…, m'a semblé rapidement éminente, a fait que… cet aspect de ma mission… m'a paru devenir quasi-exclusif… et qu'il ne convenait pas que… je… prenne en compte des considérations diverses, d'ordre technique, qui pouvaient m'éloigner de la réalité profonde du problème.
