Sous titre
En mars 2018, la journaliste Natacha Polony avait déclaré sur « France Inter » qu’il n’y avait pas eu lors du génocide au Rwanda « d’un côté les gentils et de l’autre les méchants ». Des propos pour lesquels elle est jugée ce mardi 1er mars 2022
Citation
La journaliste Natacha Polony sera jugée ce mardi 1er mars 2022 et mercredi devant le tribunal correctionnel de Paris pour contestation du génocide des Tutsis au Rwanda en 1994, une première en France selon les avocats du dossier.
Depuis janvier 2017, la loi sur la liberté de la presse punit le fait de nier, minorer ou banaliser de façon outrancière tous les génocides reconnus par la France, et pas seulement celui des Juifs pendant la Seconde guerre mondiale.
« Des salauds face à d’autres salauds »
Le 18 mars 2018 sur France Inter, Natacha Polony, également directrice de la rédaction de l’hebdomadaire Marianne, avait évoqué le génocide rwandais en estimant « nécessaire de regarder en face ce qui s’est passé à ce moment-là et qui n’a rien finalement d’une distinction entre des méchants et des gentils ».
« Malheureusement, on est typiquement dans le genre de cas où on avait des salauds face à d’autres salauds […] C’est-à-dire que je pense qu’il n’y avait pas d’un côté les gentils et de l’autre les méchants dans cette histoire », avait-elle ajouté.
Une plainte émanant d’une association de victimes du génocide
L’association de soutien aux victimes du génocide rwandais Ibuka avait porté plainte avec constitution de partie civile contre la journaliste. Le Mrap et la Communauté rwandaise de France l’ont rejointe sur le banc des parties civiles.
Fin 2020 et contre l’avis du parquet, un juge d’instruction avait renvoyé en procès la chroniqueuse pour « contestation de l’existence de crime contre l’humanité ».
La défense de Natacha Polony conteste les accusations
« Natacha Polony n’a absolument pas contesté le génocide. Ce qu’elle a seulement évoqué, c’est que du côté des dirigeants, que ça soit du côté du gouvernement intérimaire (hutu) ou du FPR (Front patriotique rwandais, tutsi), il y a eu des exactions », ont déclaré ses avocats Jean-Yves Dupeux et Florence Bourg. Elle sera présente à l’audience, ont-ils indiqué.
« À chaque génocide son négationnisme et dans celui-ci, systématiquement il s’agira de dire : il y a eu génocide, MAIS, changez le mot ’tutsi’ par ’juifs’ et personne ne tolérerait », a commenté l’avocate d’Ibuka, Rachel Lindon.
Plusieurs témoins ont été cités, notamment par la défense : Carla del Ponte, ancienne procureure du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), devrait témoigner en visioconférence. L’historien Stéphane Audoin-Rousseau a été cité par les parties civiles.
Le génocide avait fait 800 000 morts
Selon l’ONU, environ 800 000 personnes, essentiellement dans la minorité tutsie, ont été tuées en trois mois lors de massacres déclenchés après l’attentat contre l’avion du président rwandais Juvénal Habyarimana le 6 avril 1994.