Abstract
- The repatriation of the 600 French people who resided in Rwanda, in the grip of a savage and deadly civil war, is about to end. There would be 70 people left to evacuate today. And a certain number have already arrived last night at Roissy airport after a stopover in the Central African Republic.
- Kigali airport yesterday morning [April 10]. Under the protection of French soldiers, foreign nationals prepare to leave the country. We will have to content ourselves with just these initial scenes to talk about Rwanda this morning. No image for the moment of the fighting that has bloodied the country for four days.
- Belgians, Germans, Americans, French, all foreign nationals living in Rwanda are in the process of leaving Kigali, most often evacuated by plane to the neighboring capitals, Bujumbura or Bangui.
- The first French evacuees from Rwanda pass through Bangui before returning to Paris. Last night, arrival at Roissy airport. The emotion and the joy of finding his family. All are tired but all are relieved. A French national testified: "We spent the night from Thursday [April 7] to Friday [April 8] which was under shellfire, mortar fire. We slept nothing all night, we were very scared".
- A hundred other French and Belgians fled Rwanda by road. This morning they are refugees in Zaire. A Belgian national testifies: "They took everything from us. Me, they put the machete in front of my nose to take my papers. But what especially scared us was when they knew that we were Belgians . They are angry with the Belgians".
- Philippe Boisserie: "This morning in Kigali the evacuations of foreigners, and in particular of the 70 French people still in Rwanda, are continuing. At the same time, violent fighting is taking place in the streets as well as summary massacres. 500 meters from the eight people were killed at the end of the morning, just as a convoy of evacuees flanked by armed French soldiers passed. When a Tutsi woman was murdered with machetes before their eyes, the soldiers did not have not budged. Their mission clearly specifies that they must not take sides with any of the belligerents. It is moreover this passivity which excites the anger of many foreigners on departure, and in particular those of international organizations. […] A Spanish Sister told us how 17 Rwandans from her congregation had been murdered: assembled in a room, the soldiers of the presidential guard threw a grenade before finishing the religious with gunfire. al of Kigali there are still 650 corpses. Other testimonies mention numerous mass graves. It is therefore in a very tense atmosphere that the military aircraft continue their rotations".
- This civil war which drags on in Rwanda deserves some explanation as to its origin. It does not go back to the mists of time but at least to the end of Belgian colonization. Two ethnic groups are fighting over the country and the conflict is spreading to a neighboring nation: Burundi, from where many refugees returned last year, changing the balance of power in this country.
- Horror image, inter-ethnic civil war images. These corpses which rest in the morgue of Kigali belonged to the Tutsi ethnic group, a minority, 10% of the seven million inhabitants of Rwanda with a Hutu majority. A tiny state in Central Africa. Like its neighbour, Burundi, five million inhabitants, 80% Hutu too. For 30 years, these two former Belgian colonies have acted as communicating vessels on either side of their border with their minorities. 600 to 900,000 refugees according to sources.
- In Rwanda the RPF guerrillas defend Tutsi and pro-democratic interests. Facing them, the soldiers of the Republican Guard who embody the radical wing of Hutu intransigence, supplier of volunteers for the anti-Tutsi death squads.
- But these soldiers don't just inflame inter-ethnic rivalries. They are also accused of the assassination last Wednesday [April 6] of their own President, Juvénal Habyarimana. Politically cornered, he declared himself in favor of the political integration of the Tutsi. The manhunt in the streets of Kigali hides badly the dictatorial will of the Hutu soldiers who totally refuse the multiparty system and the democratization of Rwanda.
Citation
[Daniel Bilalian :] Madame, Monsieur, bonjour. Le rapatriement des 600 Français qui résidaient au Rwanda, en proie à une guerre civile sauvage et meurtrière, est en passe de se terminer. Il resterait 70 personnes à évacuer aujourd'hui. Et un certain nombre sont déjà arrivés la nuit dernière à l'aéroport de Roissy après une escale en Centrafrique. Reportage Maryse Burgot, Luc Bachofen.
[Maryse Burgot :] Aéroport de Kigali hier matin [10 avril] [une incrustation "Kigali, Rwanda" s'affiche à l'écran ; on voit des paras français en file indienne sur l'aéroport de Kanombe]. Sous la protection de soldats français, les ressortissants étrangers s'apprêtent à quitter le pays [on voit des Blancs sur le parking de voitures situé devant l'aéroport]. Nous devrons nous contenter de ces seules scènes de départ pour parler ce matin du Rwanda. Aucune image pour l'instant des combats qui ensanglantent le pays depuis quatre jours [on voit des soldats français au béret rouge contrôler les bagages des civils en train d'évacuer].
Belges, Allemands, Américains, Français, tous les ressortissants étrangers vivant au Rwanda sont donc en train de quitter Kigali, le plus souvent évacués par avion vers les capitales voisines, Bujumbura ou Bangui [diffusion d'une carte de la région des Grands lacs montrant deux lieux d'évacuation : Bangui en Centrafrique et Bujumbura au Burundi].
Eux viennent d'ailleurs tout juste d'arriver de Kigali [une incrustation "Bangui, Centre-Afrique" s'affiche à l'écran]. Ils transitent donc par Bangui avant de regagner Paris. Ils sont les premiers Français évacués du Rwanda. Avec eux, une petite fille qui échappe à la guerre [on voit des civils sortir d'un bâtiment et marcher sur une piste en latérite].
[Une femme : Ah nous, on se…, on n'est pas du tout résident, hein. On est allé pour…, juste, seulement une semaine pour une adoption. Donc on est dans un cas très particulier. Et nous on fait partie des gens qui ont beaucoup de chance. On est allé pour adopter une petite fille et on la ramène. Et on rentre dans notre pays retrouver les autres enfants. Donc pour nous tout est bien [sourire]".
Et cette nuit enfin, l'arrivée à l'aéroport de Roissy. L'émotion et la joie de retrouver les siens [on voit des gens débarquer du terminal d'arrivée et tomber en pleurs dans les bras de leurs proches]. Tous sont fatigués mais tous sont soulagés [on entend une femme dire : "Vous reculez, là, maintenant !" Un homme surenchérit : "Laissez-les passer !"].
[Une femme répond aux journalistes : "C'est un petit peu égoïste de dire qu'on est soulagé vu le nombre de morts qui…, qu'il y a là-bas… Des gens qu'on connaissait, des…, des amis rwandais, quoi, qui…, qui travaillaient avec nous".
Un homme témoigne à son tour, une enfant noire assise à ses côtés : "On a passé une nuit de jeudi [7 avril] à vendredi [8 avril] qui était…, sous les…, sous les obus, les tirs de mortiers et tout ça, euh… On n'a rien dormi de la nuit, quoi, on a eu très peur. On s'était blotti les uns contre les autres et on a attendu que ça passe".
Une femme : "On a été très heureux de l'arrivée de l'armée française. Ils ont eu un accueil superbe… à Bangui".]
Et sur ces images que nous venons de recevoir, une centaine de Français et de Belges. Ils ont fui le Rwanda par la route, ils sont ce matin réfugiés au Zaïre [on voit un bâtiment jaune sur lequel est inscrit "Office des douanes et accises" ; des Blancs attendent tout près, sur le bord de la route].
[Un ressortissant belge témoigne : - "Ils nous ont tout pris : vidéos, appareils photos, tout, tout est parti". Question d'un journaliste : - "On vous a menacé ?". Réponse : - "Euh… lui, lui on l'a menacé [il désigne de la main une personne]. Moi personnellement, on…, on m'a mis la machette devant…, devant le nez pour me prendre mes papiers. Mais, euh, ce…, ce qui nous a surtout fait, euh…, peur, c'est que…, quand…, quand on a…, ils ont su qu'on était Belges… Ils en veulent aux Belges".]
Les derniers Français restant au Rwanda devraient arriver demain à Paris [une barrière se lève devant le poste-frontière].
[Daniel Bilalian interviewe à présent en duplex Philippe Boisserie.]
Daniel Bilalian : Alors…, notre envoyé spécial Philippe Boisserie se trouve actuellement sur l'aéroport de Kigali, la capitale du Rwanda. Philippe, pouvez-vous simplement nous raconter ce qui se passe ce matin dans la capitale ?
Philippe Boisserie : Eh bien, Daniel, ce matin à Kigali les évacuations d'étrangers, et notamment des 70 Français encore au Rwanda, se poursuivent. Dans le même temps se déroulent dans les rues des combats violents ainsi que des massacres sommaires. À 500 mètres de l'aéroport huit personnes ont été tuées en fin de matinée, au moment même où passait un convoi d'évacués encadré par des militaires français en armes. Lorsqu'une femme tutsi a été assassinée à coups de machettes sous leurs yeux, les soldats n'ont pas bougé. Leur mission spécifie clairement qu'ils ne doivent prendre parti pour aucun des belligérants. C'est d'ailleurs cette passivité qui excite la colère de beaucoup d'étrangers sur le départ, et notamment ceux des organisations internationales. Un membre de la Croix-Rouge, qui préfère garder l'anonymat, se demandait ce matin à quoi servant une mission de l'ONU payée 700 000 dollars par jour si elle laissait se produire de tels massacres [diffusion d'une vue aérienne de Kigali à titre d'images d'illustration]. Une Sœur espagnole, sa valise à la main, nous a raconté comment 17 Rwandais de sa congrégation avaient été assassinés [diffusion d'une carte de l'Afrique localisant le Rwanda et le Burundi] : réunis dans une pièce, les soldats de la garde présidentielle ont jeté une grenade avant d'achever les religieux à coups de fusil [diffusion d'une carte de la région des Grands lacs puis d'une carte du Rwanda et du Burundi]. À l'hôpital central de Kigali, d'après les témoignages que nous avons eus, il reste encore 650 cadavres. D'autres témoignages font état de très nombreuses fosses communes. C'est donc, vous le voyez, dans une ambiance très tendue que les avions militaires continuent leurs rotations. Et si le soulagement prévaut chez ceux qui peuvent enfin quitter enfin le Rwanda, ils partent tous la gorge nouée.
Daniel Bilalian : Philippe…
Philippe Boisserie : Voilà ce qu'on peut dire en fait, Daniel, ce matin.
Daniel Bilalian : Philippe, juste un petit mot.
Philippe Boisserie : Oui.
Daniel Bilalian : Euh…, encore sur, euh…, les Français qui résident à Rwanda [sic]. On dit que leur évacuation va se terminer aujourd'hui. Est-ce qu'elle est déjà finie ? Est-ce qu'elle va se terminer ?
Philippe Boisserie : Eh bien, écoutez, il y a en gros une demi-heure, un convoi est enfin parvenu de l'ambassade de France. Donc parmi tous les gens à l'intérieur des voitures, il y avait… bien entendu des Français. Donc ces derniers… Français encore au Rwanda. En ce moment même, ils sont en train de remplir les fiches d'embarquement pour pouvoir monter dans un Transall de l'armée française et rejoindre Bujumbura, où là ils pourront soit gagner Paris soit attendre peut-être un petit peu pour voir s'ils peuvent revenir au Rwanda, parce que certains veulent revenir au Rwanda.
Daniel Bilalian : Merci Philippe.
Cette guerre civile qui s'éternise au Rwanda mérite quelques explications tout de même quant à son origine. Elle ne remonte pas à la nuit des temps mais au moins à la fin de la colonisation belge. Deux ethnies se disputent le pays et le conflit s'étend à une nation limitrophe : le Burundi, d'où beaucoup de réfugiés sont rentrés l'année dernière, changeant le rapport de force dans ce pays. Bernard Lebrun.
[Bernard Lebrun :] Image d'horreur, images de guerre civile interethnique [une incrustation "Kigali (Rwanda), Février 94" s'affiche à l'écran ; on voit une pile de cadavres entassés dans une morgue]. Ces cadavres qui reposent à la morgue de Kigali appartenaient à l'ethnie tutsi, minoritaire, 10 % des sept millions d'habitants du Rwanda à majorité hutu. Un minuscule État de l'Afrique centrale. Comme son voisin, le Burundi, cinq millions d'habitants à 80 % Hutu lui aussi [rediffusion de la carte d'Afrique et de celle du Rwanda et du Burundi, projetées ci-avant]. Depuis 30 ans, ces deux anciennes colonies belges jouent les vases communicants de part et d'autre de leur frontière avec leurs minorités. 600 à 900 000 réfugiés selon les sources [diffusion d'images d'archives de réfugiés].
Au Rwanda les guérilleros du FPR -- le Front patriotique rwandais -- défendent les intérêts tutsi et pro-démocratiques [diffusion d'images d'archives de soldats à l'entraînement]. Face à eux, les soldats de la garde républicaine qui incarnent l'aile radicale de l'intransigeance hutu, pourvoyeur de volontaires pour les escadrons de la mort anti-Tutsi [on les voit en train de répéter un défilé].
Mais ces militaires ne font pas que d'embraser les rivalités interethniques. Ils sont aussi accusés de l'assassinat mercredi [6 avril] dernier de leur propre Président, Juvénal Habyarimana [diffusion d'images d'archives du Président Habyarimana]. Acculé politiquement, il s'était déclaré favorable à l'intégration politique des Tutsi. La chasse à l'homme dans les rues de Kigali cache mal la volonté dictatoriale des militaires hutu qui refusent en bloc le multipartisme et la démocratisation du Rwanda [diffusion d'images d'archives montrant notamment des militaires rwandais mettre en joue un civil].