Fiche du document numéro 28785

Num
28785
Date
Lundi 8 octobre 1990
Amj
Taille
1050892
Titre
Déclaration du ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale à l’occasion de la réunion avec les chefs de missions diplomatiques et consulaires accrédités à Kigali
Nom cité
Lieu cité
Mot-clé
Fonds d'archives
Type
Déclaration
Langue
FR
Citation
DECLARATION DU MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES ET DE LA
COOPERATION INTERNATIONALE À L'OCCASION DE LA REUNION AVEC LES
CHEFS DE MISSIONS DIPLOMATIQUES ET CONSULAIRES ACCREDITES A
KIGALI KIGALI, LE 8 OCTOBRE 1990,


Dans la matinée du 1er octobre 1990, le Rwanda a fait l'objet d'une agression extérieure par des assaillants comprenant des réfugiés rwandais membres de l'armée ugandaise qui se sont ralliés des éléments ugandais membres de cette même armée. Ces agresseurs sont venus équipés d'armements lourds et sophistiqués comprenant entre autres des véhicules blindés, des auto-mitrailleuses, des mortiers et des canons sans recul. Ces envahisseurs ont attaqué par Kagitumba, dans la région du Mutara, au Nord-Est du pays, où ils ont commencé à détruire des infrastructures économiques et assassiner des civils innocents.

Ces agresseurs dont le nombre est actuellement estimé à 10.000 personnes - chiffre qui pourrait doubler ou tripler si les recrutements à partir de l'armée ugandaise se poursuivent et des informations à ce sujet sont abondantes - sont dirigés par le Général-Major Fred RWIGEMA, l'une des personnalités les plus gradées de l'armée ugandaise et leader de l'organisation Rwandaise Patriotic Front (RPT) - INKOTANYI.

Cette organisation terroriste n'a d'autre visée que l'instauration d'un régime minoritaire, incarnant un féodalisme à visage moderne. Le peuple rwandais n'acceptera pas une marche arrière de l'histoire ramenant les forces vives de la nation aux corvées et à l'asservissement féodal.
C'est pourquoi il est résolu à défendre courageusement les acquis de la révolution sociale de 1959 et ceux de la IIème République dont particulièrement l'Unité et la Paix. La presse internationale a été inondée par la propagande du mouvement des agresseurs qui prétendent lutter pour ramener la démocratie et la justice sociale au Rwanda.

Cette campagne médiatique du mouvement INKOTANYI ne doit tromper personne puisque l'abondante littérature qu'il a rendu public est bien claire et explicite sur les buts poursuivis. Et s'il n'était que question d'asseoir la démocratie et la justice sociale au Rwanda, tout observateur avisé connaît les mérites de la IIème République en la matière et est conscient de l'ouverture récemment faite par le Chef de l'Etat vers la mise en place d'un pluralisme politique qui s'exprimera essentiellement par voie du MULTIPARTISME. Ainsi donc, la Communauté Internationale doit comprendre qu'il ne s'agit pas d'un conflit interne mais plutôt d'une agression extérieure menée par des forces à plusieurs visages.

- 2 -

Il est vrai qu'après cette attaque, le Gouvernement Rwandais n'a pas tardé à remarquer qu'il ÿ avait des complices à l'intérieur du pays. C'est ce qui explique les arrestations de certaines personnes dans le pays, soupçonnées d'être soit des terroristes, soit des complices de ces terroristes. Les services compétents sont en train d'établir la part de responsabilité de chaque personne arrétée de manière à prendre les mesures indiquées et dans le strict respect de nos lois.

Pour ce qui est de la situation qui règne dans le pays aujourd'hui, je me dois de vous informer qu'un calme règne sur la très grande partie du territoire, la capitale Kigali incluse. Des combats se poursuivent au Mutara et pour l'instant l'ennemi semble perdre la pédale.

Le Gouvernement Rwandais a été informé de la volonté du
Gouvernement ugandais de mettre fin à toute infiltration au Rwanda
de maquisards provenant de son propre territoire. Il souhaite qu'il
y ait une véritable matérialisation de cette promesse de manière à
ce que les recrutements de nouveaux assaillants à partir de l'armée
ugandaise ainsi que leur infiltration vers notre pays prennent immédiatement fin.

Je saisis cette occasion pour informer ceux des réfugiés qui intoxiquent l'opinion internationale en disant que le Gouvernement Rwandais a depuis belles lurettes décidé d'ignorer le problème de ses réfugiés que les responsables politico-administratifs rwandais placent cette question au centre de leurs préoccupations. Ceci est d'autant plus vrai que les concertations rwando-ugandaises à ce sujet étaient à la veille de déboucher sur des solutions politiques réalistes et durables. Nous remercions vivement le Haut Commissaire des Nations Unies pour les Réfugiés pour le rôle important qu'il joue à cet effet. Le Gouvernement Rwandais reste convaincu qu'aucune violence, aucune agression, voies condamnées par ailleurs par la Convention des Nations Unies sur les Réfugiés de 1951 et son protocole de 1967 ainsi que la Convention de L'OUA de 1969, ne peuvent permettre de trouver une solution heureuse et durable à la question.

Qu'il me soit permis à cette occasion de remercier les pays amis qui nous ont appuyé et continuent de le faire dans ces moments particulièrement difficiles. Je ne doute pas que ceux qui n'ont pas encore posé un geste de soutien matériel sont également à nos côtés du moins sur les plans moral et politique. Nous savons donc gré aux pays amis pour ces témoignages éloquents d'une amitié profonde et d'une solidarité agissante.



Dans des moments aussi dramatiques que ceux-ci, la capacité d'un pays aux ressources fort limitées de subvenir à ses besoins vitaux s'effonde très rapidement. Ainsi, je vous demanderais de ne pas perûre de vue dans la variété des aides dont notre pays a besoin l'aide alimentaire et l'aide en médicaments.



Cette heureuse occasion me permet de demander aux pays amis, aux organismes internationaux et à la Communauté Internationale de condamner énergiquement cette agression qui n'a d'autre but

-3 -

que l'installation d'un Gouvernement minoritaire et d'un régime féodal sous le voile de slogans libérateurs et démocratiques.

L'Organisation des Nations Unies et l'Organisation de l'unité Africaines sont invitées à leur tour à ne rien ménager, pour. condamner cette agression barbaré, ä suivre de près l'évolution de la situation et à veiller à ce que l'intégrité territoriale et la coexistence pacifique telles qu'incarnées dans les chartes de ces deux Organisations soient sauvegardées.

Je terminerai mon propos en réitérant l'appel lancé par le Chef de l'Etat rwandais lors de Son adresse à la Nation le 5 octobre 1990 pour demander que le peuple rwandais garde la cohésion nationale et coopère avec les autorités civiles et militaires pour traquer l'ennemi ./.

Haut

fgtquery v.1.9, 9 février 2024