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Le génocide des Tutsis en 1994 a marqué douloureusement l'histoire du Rwanda et a frappé les consciences du monde entier par l'ampleur du génocide. On sait moins qu'avant cette tragédie, il y eut à Noël 1963 d'importants massacres de Tutsis par des Hutus. Ils furent abondamment relayés dans la presse qui mit en cause le rôle de l'Eglise catholique dans ces tragiques événements. Vrai ou faux ? Pour le savoir, le Père Pichard est parti enquêter sur place. Il en a rapporté ce film.
Le documentaire commence par un rappel des faits à l’aide d’articles de journaux : le Rwanda était gouverné par les tutsis minoritaires. Les hutus, majoritaires mais opprimés, avaient reçu le soutien de l’église catholique soucieuse de leur promotion humaine. Ils prirent le pouvoir suite à la révolution de 1959.
120 000 tutsi émigrent dans les pays voisins, les autres reçoivent du gouvernement terres et maisons. En décembre 1963, des tutsis pénètrent en territoire rwandais. Les agresseurs sont stoppés par la garde nationale. Ce raid soulève la fureur des hutus et s’ensuit des massacres que la presse mal informée situa d’abord au Burundi. Des informations erronées circulèrent, mais la presse fit état d’un vrai massacre, évalué à 8000 morts, 700 selon Jean-Baptiste Gahamanyi, évêque de Butare.
Quels sont les responsabilités ? Absence de police, manque de soldats. Quelle est la responsabilité de l’Eglise ?
A l’occasion du Carême 1959, Mgr Perraudin fit une célèbre déclaration :
« L’Eglise n’est donc pas pour une race plutôt que pour une autre, l’Eglise est pour toutes les races qu’elle embrasse d’un égal amour et d’un égal dévouement.
Dans notre Ruanda les différences et les inégalités sociales sont pour une grande part liées aux différences de race, en ce sens que les richesses d’une part et le pouvoir politique et même judiciaire d’autre part, sont en réalité en proportion considérable entre les mains des gens d’une même race. Cet état de chose est l’héritage d’un passé que nous n’avons pas à juger. Mais il est certain que cette situation de fait ne répond plus aux normes d’une organisation saine de la société ruandaise et pose, aux Responsables de la chose publique des problèmes délicats et inéluctables. »
Mgr Joseph Sibomana (hutu) : « Si la déclaration de Mgr Perraudin avait été écoutée, la révolution n’aurait peut-être pas éclaté. »
Mgr Perraudin : « Ce n’est pas faire de l’opportunisme que de plaider pour la promotion sociale d’une masse dont la dignité humaine n’était pas suffisamment reconnue. L’Eglise reconnaît un gouvernement légitime, plébiscité par 85% de la population. Ces élections ont été contrôlées par l’ONU. »
Mgr Joseph Sibomana : « Il n’y a pas de recul du christianisme. Mon diocèse de Ruhengeri de 689 000 habitants, 123 000 catholiques sont pratiquants à 85%, 128 000 catéchumènes. La montée du catéchuménat date de deux ans. »
« Il n’y a pas eu de massacre dans mon diocèse car il n’y pas eu d’offensive venant de l’Ouganda, sauf une tentative de pénétration maîtrisée par les forces de l’ordre. Tous les Rwandais désirent la paix. S’il n’y avait pas eu d’attaques extérieures, il n’y aurait pas eu de fureur populaire intérieure. »
L'Abbé Massion(?), aumônier de Radio Ruanda :
« Un tiers de la population du Rwanda a reçu le baptême. Sans doute des chrétiens ont participé aux massacres (il donne trois exemples de missions où des païens sont en cause). L’opposition entre tutsi et hutu est plus sociale que raciale, due au régime de privilège établi par les tutsis. La révolution de 1959 est une prise de conscience des hutus des droits de la personne humaine. Parmi les tutis certains considèrent que les hutus sont incapables de responsabilité. »
« L’Eglise a rappelé par la voix des évêques les exigences de la justice et de la charité sociale. Elle n’a pas voulu une révolution violente. Qui oserait lui reprocher de vouloir répandre dans les pays neufs la doctrine sociale des Papes ?
Père Georges-Henri Lévesque, recteur de l’université nationale du Rwanda :
« 52 étudiants, la moitié de hutus, la moitié de tutsis, alors que les tutsis ne représentent que 14% de la population. Il ne serait être question de génocide. Cette université est nationale, au service de toute la population rwandaise. »
A propos de l’accusation de complicité au génocide du gouvernement rwandais faite par un professeur :
« Ce n’est pas à un moment aussi tragique qu’il faut abandonner ce pays à son sort, il faut l’aider plus que jamais. »
Mgr Sibomana :
« Le véritable génocide est fait par les journalistes mal informés ou dont la bonne foi a été surprise. Notre Rwanda qui accuse une montée démographique forte a besoin d’une aide extérieure. En exagérant les troubles survenus, on risque de faire peur à cette assistance extérieure. Qui nous aidera à nourrir nos trois millions de Rwandais ? »
Un ligue belge demande à son gouvernement de suspendre « toute assistance technique tant que le gouvernement rwandais ne respectera pas le droit à la vie de ses ressortissants ». Le reportage se termine dans une maternité de brousse où une accoucheuse témoigne : elle reçoit entre 7 à 10 personnes par jour, sans remèdes.
Conclusion : « il y a des enquêtes qui en découvrant la vérité contraignent à suivre le chemin de la charité. »