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Le 22 juin 1994, nos militaires français sont projetés dans l’une des opérations les plus difficiles de la décennie : Turquoise. La France est la seule à intervenir au Rwanda alors que la communauté internationale peine à assumer ses responsabilités. Confrontés à une violence extrême, au chaos et à l’omniprésence de la mort, les soldats présents n’ont qu’une idée en tête : comprendre la lettre et l’esprit de la mission qui leur est confiée pour surmonter une situation si confuse qu’aujourd’hui encore seule une vérité complexe semble à portée.
Certains propos — accusatoires — sèment le doute et jettent parfois l’opprobre sur l’action des militaires français qui étaient présents au Rwanda. La vérité simple n’existe pas, il faut s’enquérir d’une vérité complexe, une réalité bien plus enchevêtrée : d’une part, car l’accès restreint aux archives nous empêche de prendre connaissance des faits et des processus décisionnels de l’époque, et qu’il est donc hasardeux, voire impossible, d’en juger. D’autre part, car ceux, dont je suis, qui demandent que la lumière soit faite sur le génocide des tutsis au Rwanda doivent se rappeler que dans notre République, les militaires sont soumis à l’autorité politique qui décide de leur emploi, leur assigne leur mission et leur donne les moyens propres à sa réalisation.
C’est pourquoi, je salue la décision prise par le président de la République de créer une commission d’historiens et de chercheurs sous l’égide du Pr Vincent Duclert. Cette commission aura accès à tous les fonds d’archives des ministères au sujet du Rwanda sur la période 1990-1994. Son travail sera déterminant pour l’indispensable devoir de mémoire et la transmission aux plus jeunes. La transparence, alors, devra être totale, quelles qu’en soient les conséquences. Si des erreurs ont effectivement été commises, il reviendra à nous, responsables politiques, de les assumer pleinement, au nom de nos prédécesseurs.
La France a démontré plusieurs fois sa capacité à faire la lumière sur son passé, à faire émerger la vérité afin de dépasser les approximations simplistes à l’envie de la suspicion permanente et se libérer de l’idéologie
Responsabilité. En aucun cas, cette responsabilité n’incombe à nos 2500 soldats qui ont effectué un travail remarquable, en sauvant des milliers de vies dans des conditions particulièrement difficiles, aux côtés de 500 soldats africains. Le travail des historiens, j’en suis convaincu, révélera cette vérité nécessairement complexe et contribuera à laver l’honneur des soldats de Turquoise et à travers eux de tous leurs frères d’arme qui observent, sans doute stupéfaits, le sort réservé à leurs anciens qui ont fait leur devoir comme eux le font aujourd’hui sur les théâtres d’opérations.
La France a démontré plusieurs fois sa capacité à faire la lumière sur son passé, à faire émerger la vérité afin de dépasser les approximations simplistes à l’envie de la suspicion permanente et se libérer de l’idéologie. Il nous faut, aujourd’hui, retrouver cette exigence d’exhaustivité et de clarté. Car cette vérité, nous la devons à nos Armées, aux victimes malheureuses du génocide, à leurs familles, aux survivants mais aussi aux Français et aux générations futures.
Vingt-cinq ans après, nos soldats n’ont rien oublié de l’horreur des massacres, de l’odeur des charniers ou du regard des victimes. Ils ont porté l’honneur de la France, seul pays occidental à s’être engagé pour mettre fin au génocide, reconnaissons leur professionnalisme et leur abnégation.
Jean-Michel Jacques est député LREM du Morbihan. Ancien infirmier dans la Marine nationale, il a servi pendant dix-sept ans au sein des commandos marine.