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Le retrait des troupes françaises du sud-ouest du Rwanda est en train
de provoquer un mouvement important de population vers la frontière
zaïroise. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) évalue
entre 250 et 300 le nombre de personnes par kilomètre se dirigeant
actuellement vers la ville rwandaise de Cyangugu, à la frontière du
Zaïre, face à la ville de Bukavu. Ce déplacement de population se fait
essentiellement sur l'axe Gikongoro-Cyangugu, long de 130 km, et de
Kibuye-Cyangugu (100 km), traversant la « zone humanitaire sûre »
(ZHS) établie par la France. L'opération « Turquoise » devra avoir
retiré l'ensemble de ses troupes du Rwanda - qui y sont présentes
depuis le 23 juin - au plus tard le 21 août à minuit, conformément au
mandat que lui a fixé le Conseil de sécurité des Nations unies.
Nombre de Hutus sont inquiets du départ des troupes françaises qui,
selon eux, sera immédiatement suivi de l'entrée de celles du Front
patriotique rwandais (FPR). Le PAM (Programme alimentaire mondial)
chiffre à 4 millions le nombre de réfugiés à l'extérieur du Rwanda
dont plus d'un million au Zaïre entre Goma et Bukavu.
Le commandement français a suscité sur place l'émergence de « comités
préfectoraux intérimaires » ou de « groupes d'initiative » selon les
régions, composés pour la plupart de fonctionnaires de l'ancien
régime, afin d'amorcer un dialogue avec les nouvelles autorités de
Kigali. Ces dernières se sont déplacées dans la zone de protection
française, à Kibuye et Gycongoro notamment, pour tenter de convaincre
les populations de rester sur place. Les déplacés font tous part de
leur crainte de se faire tuer par le FPR après le départ des
Français. Peur accentuée par d'innombrables rumeurs selon lesquelles,
notamment, la frontière avec le Zaïre sera définitivement fermée dès
le 22 août au matin, c'est-à-dire dès la fin officielle de la mission
française au Rwanda.