Fiche du document numéro 13817

Num
13817
Date
Samedi 11 juin 1994
Amj
Hms
19:14:00
Taille
87177
Titre
Rwanda - nouveaux massacres malgré les pourparlers
Cote
reutfr0020011106dq6b00vjk
Source
Fonds d'archives
Type
Dépêche d'agence
Langue
FR
Citation
KIGALI, 11 juin, Reuter - Des miliciens hutus ont enlevé et
probablement massacré 170 personnes, en majorité des Tutsis, qui
avaient cherché refuge dans une mission religieuse du quartier de
Nyamirambo à Kigali, ont déclaré vendredi deux prêtres européens dans
la capitale rwandaise.

Le père Henri Blanchard, un Français de 58 ans, et le père Otto Mayer,
un Allemand de 47 ans, ont précisé qu'une trentaine de miliciens
conduits par un certain Kigingi avaient fait irruption vendredi dans
leur mission en affirmant qu'ils devaient évacuer les réfugiés.

Les deux prêtres ont refusé d'ouvrir la porte du bâtiment où étaient
regroupés les civils. Les miliciens ont alors ouvert le feu sur la
porte et l'ont frappée à coups de hache.

Ils ont ensuite lancé une grenade dans la cuisine et forcé les réfugiés
à sortir. Les civils ont été embarqués de force à bord d'un camion qui
a fait plusieurs allers et retours jusqu'à ce que tous les réfugiés
soient emmenés.

Le père Mayer a déclaré qu'il avait tenté de chercher du secours au
collège Saint-André, non loin de là, où des soldats gouvernementaux
sont casernés et où des centaines de civils, en majorité des Tutsis,
sont réfugiés. Mais un soldat l'a arrêté à un barrage et lui a ordonné
de faire demi-tour.

Alors qu'il revenait en courant vers la mission, un obus de mortier
tiré des lignes rebelles a explosé près de lui, le blessant au bras.
Les deux religieux ont ensuite voulu chercher un médecin mais ils ont
été bloqués à un barrage de la milice.

Un fonctionnaire du gouvernement est enfin venu à leur aide, et ils ont
pu franchir le barrage. Ils ont alors aperçu le camion qui avait
évacué les réfugiés de leur mission.

Il y avait dix cadavres sur le sol et dans le camion. On en a reconnu
quelques-uns (...) Les miliciens étaient comme fous, très en colère
, a
dit le père Mayer.

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Les miliciens étaient comme fous
---

Le camion se trouvait à environ 150 mètres d'un poste de police. Les
deux prêtres ont toutefois précisé qu'aucun policier et aucun membre
des forces régulières n'avait participé à l'enlèvement des réfugiés.

Ces dernières semaines, des miliciens s'étaient rendus à plusieurs
reprises à la mission en menaçant de tuer les civils qui s'étaient
placés sous leur protection, ont-ils dit.

Les deux religieux ont souligné que des centaines de personnes se
trouvaient encore dans des bâtiments religieux de Nyamirambo, où de
violents combats opposent gouvernementaux et rebelles du Front
patriotique du Rwanda.

Les miliciens pensent que s'ils tuent tous les Tutsis, ils règleront
le problème et mettront fin au conflit
, a dit le père Mayer, qui a par
ailleurs accusé le FPR de bombarder sans discrimination les quartiers
résidentiels.

Quelque 2.300 civils ont été évacués jusqu'ici par les forces des
Nations unies de part et d'autre des lignes de front à Kigali, en
majorité des Tutsis menacés de mort par les miliciens.

Mais les 450 membres de Mission des Nations unies d'assistance au
Rwanda (Minuar) ne peuvent pénétrer dans Nyamirambo en raison du
danger.

Pendant ce temps, les discussions se poursuivent pour tenter de
parvenir à un cessez-le-feu. Le colonel Frank Mugambage, du FPR, a de
nouveau rencontré samedi des représentants de l'armée gouvernementale.

Il a souligné la volonté de paix de son mouvement mais a affirmé que
les combats se poursuivraient tant qu'il n'aura pas été mis fin aux
massacres qui auraient fait 500.000 morts en huit semaines. Les
discussions doivent reprendre lundi. /GK

(c) Reuters Limited 1994

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