Fiche du document numéro 10261

Num
10261
Date
Mardi 28 juin 1994
Amj
Taille
106757
Titre
Note. A/S : Compte-rendu de l'entretien avec l'ancien directeur de cabinet du Président Habyarimana
Nom cité
Cote
No 1745/DAM
Source
Type
Langue
FR
Citation
MINISTERE R E P U B L I Q U E F R A N C A I S E
DES
AFFAIRES ETRANGERES Paris, le 28 juin 1994

DIRECTION DES AFFAIRES
AFRICAINES ET MALGACHES .

Sous—Direction d'Afrique
Centrale et Orientale

N° 1745 /DAM



-- N 0 T E —

A/S ; Compte—rendu de l'entretien avec l'ancien directeur
de cabinet du Président HABYARIMANA.

D'un entretien avec M. Enoch RUHIGIRA, ancien
directeur de cabinet du Président HABYARIMANA, de passage à
Paris après un séjour en Belgique (au cours duquel il a été
reçu par le directeur—adjoint d'Afrique), je retiens les
points suivants :

1 - circonstances de l'attentat

Pour M. RUHIGIRA, la responsabilité du FPR ne fait
aucun doute. Il souligne la présence dans l'avion du Général
NSABIMANA (chef d'état—major FAR) et du Colonel SAGATWA
(commandant la garde présidentielle). Il rappelle le désarroi
qui a frappé l'armée et le gouvernement après l'attentat, qui
ne se serait pas produit dans l'hypothèse d'une tentative de
prise du pouvoir de leur part. Il attribue l'attentat au fait
que le FPR avait pris conscience que le chef de l'Etat était
capable, en jouant sur les factions au sein des partis
d'opposition, d'obtenir la minorité de blocage d'un tiers et
de l'empêcher ainsi de manipuler les accords d'Arusha. Or, la
bonne application de ces accords laissait le FPR sans pouvoir
après les élections.

En revanche, mon interlocuteur ne voyait aucun
élément permettant d'incriminer les Belges.

2 - Situation militaire

M. RUHIGIRA ne semblait pas très au courant. Il a
relevé le charisme du chef d'état—major (le Général Augustin
BIZIMUNGU), souligné le problème de munitions (c'est selon lui
pour cette raison qu'a été évacué le camp de Kanombe) et
exprimé sa certitude qu'en l'absence de règlement politique
acceptable, la guerre continuerait, sous une forme différente
(harcèlements, guerrilla).

.../..:

3 - Perspectives politiques

Pour l'ancien directeur de cabinet, le FPR est
actuellement dominé par les durs, notamment Théogène
RUDASINGWA (secrétaire général), Tito RUTAREMARA et le futur
ministre de la Santé. Leur objectif est de prendre totalement
le pouvoir, d'exclure le MRND tout entier pour responsabilité
dans les massacres et de bâtir un soit-disant gouvernement
d'union nationale avec les seuls opposants ralliés à leur vue,
avec le soutien de la communauté internationale qui verra en
eux des "Hutus modérés" en s'aveuglant sur leur manque total
de représentativité.

D'ores et déjà, M. TWAGIRAMUNGU l'aurait approché
pour lui demander de s'associer à lui et à son comité de
coordination des forces démocratiques du changement.
M. RUHIGIRA a refusé : bien qu'il n'ait pas rejoint le
gouvernement intérimaire en raison des massacres, il estime
qu'une solution ne réside pas dans le débauchage individuel de
personnalités.

Le MRND devra être associé à une solution politique.
Il lui revient d'écarter les responsables qui paraissent
impliqués dans les tueries et de présenter des interlocuteurs
acceptables. Il est prêt à le faire, de même que le chef de
l'Etat a.i. et plusieurs ministres sont prêts à démissionner
(si cela n'apparaît pas comme l'aveu de leur responsabilité
dans les exactions). L'opposition à M. TWAGIRAMUNGU y reste
toutefois très forte.

Pour accélérer cette évolution au sein du MRND (et
du MDR, principal parti d'opposition), M. RUHIGIRA pense qu'il
serait souhaitable que M. François NZABAHIMANA, directeur des
banques populaires et ancien ministre du Commerce,
actuellement réfugié à Bruxelles (010454096) puisse se rendre
à Gisenyi car il est respecté et saurait encourager les
évolutions nécessaires au sein du gouvernement. Encore
faudrait—il que son voyage lui soit financé...

4 — Initiative française

M. RUHIGIRA a porté un jugement positif sur notre
initiative, en l'assortissant d'une mise en garde (éviter une
présentation ethnique) et d'un appel (à une action en faveur
d'un règlement de fond)./.

Jean—Michel MARLAUD

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