Citation
Alors médecin gynécologue-obstétricien dans la préfecture de Butare, Sosthène Munyemana est accusé d’avoir participé à la mise en place d’un comité de crise local ayant organisé des barrages, des arrestations et la détention de civils tutsis. Il lui est également reproché d’avoir facilité la persécution de ses concitoyens depuis l’hôpital universitaire où il exerçait et contribué à l’établissement des listes des Tutsis à éliminer. Enfin, il détenait la clé d’un bureau du secteur de Tumba dans lequel les Tutsis étaient enfermés avant d’être exécutés. L’accusé, âgé de 68 ans, a toujours nié l’ensemble des faits, affirmant avoir au contraire protégé des personnes menacées.
Arrivé en France en 1995, Munyemana a longtemps travaillé comme médecin urgentiste dans le Sud-Ouest.
L’instruction, ouverte en 1999 à la suite de plaintes d’associations dont la FIDH, Survie et le Collectif des parties civiles pour le Rwanda, a duré plus de vingt ans, marquée par plusieurs demandes d’extradition du Rwanda refusées par la France.
Près de trente ans après le génocide des Tutsis au Rwanda, la justice française a condamné, le 12 décembre 2023, le médecin rwandais Sosthène Munyemana à vingt-quatre ans de réclusion criminelle par la cour d’assises de Paris pour génocide et crime contre l’humanité, constitué par des atteintes à la vie en tant qu’auteur ainsi que d’entente en vue de commettre un génocide. Il fut ainsi le premier à être condamné pour la participation à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation du crime de génocide et du crime contre l’humanité.
Au terme de cinq semaines de procès, la Cour d’assises de Paris, en formation d’appel, a confirmé cette condamnation le 23 octobre 2025, estimant qu’il « s’était inscrit dans la politique génocidaire en y adhérant, mais également en y prenant une part active intellectuellement et matériellement » et portant la peine de sureté de 8 à 12 ans. Elle l’a en revanche acquitté des chefs de crime de génocide constitué par des atteintes graves à l’intégrité physique ou psychique (en tant qu’auteur ou complice), de crime contre l’humanité constitué par des actes de torture ou actes inhumains (auteur ou complice), de crime contre l’humanité constitué par des exécutions sommaires, enlèvement de personnes suivis de leur disparition (auteur ou complice) et d’entente en vue de commettre un crime contre l’humanité.
Ce verdict constitue une nouvelle étape dans la reconnaissance du rôle de génocidaires réfugiés en France, après plusieurs procès similaires, et une victoire historique pour la mémoire des victimes.