Citation
Le Parquet national antiterroriste (Pnat) a fait appel vendredi d’une ordonnance motivant le refus de mettre en examen Agathe Habyarimana, veuve de l’ancien président rwandais hutu assassiné, dans le génocide des Tutsi en 1994, a-t-il indiqué lundi, sollicité par l’AFP.
Placée depuis 2016 sous le statut intermédiaire de témoin assisté dans cette enquête ouverte en 2008, Agathe Habyarimana, 82 ans, échappe à ce stade à un procès.
Les investigations avaient déjà été clôturées en 2022, mais le Pnat, qui comprend un pôle Crimes contre l’humanité, avait demandé en août de la même année de nouvelles investigations, puis il avait pris, début septembre 2024, un nouveau réquisitoire supplétif en vue de sa mise en examen pour entente en vue de la commission du génocide des Tutsi en 1994.
Le 16 mai, les juges d’instruction ont rendu une ordonnance de refus d’actes, estimant qu’il « n’existe pas à ce stade d’indices graves et concordants contre Agathe Kanziga (Habyarimana) qu’elle ait pu être complice d’acte de génocide » ou pu « participer à une entente en vue de commettre le génocide ».
« Si la rumeur est tenace, elle ne peut faire office de preuve en l’absence d’éléments circonstanciés et concordants », poursuivent-elles, soulignant que les « témoignages à charge se révèlent contradictoires, incohérents, voire mensongers », et évoquant un « délai raisonnable déjà largement dépassé ».
Les investigations ont été clôturées le même jour.
Sollicité par l’AFP, Me Philippe Meilhac, avocat de Mme Habyarimana, a indiqué « regretter le "déni" du Pnat ».
« Face à un dossier vide, comme analysé par les dix juges qui se sont succédé, il s’entête encore dans une stratégie purement dilatoire qui ne vise qu’à tenter de retarder le non-lieu inéluctable dont ma cliente va bénéficier, ceci pour satisfaire de intérêts diplomatiques », a insisté le conseil.
Selon les associations parties civiles, Mme Habyarimana était l’une des dirigeantes de l’« akazu » -- le premier cercle du pouvoir hutu qui aurait orchestré le génocide --, ce qu’elle réfute.
Le 9 avril 1994, elle était exfiltrée en Europe avec sa famille à la demande du président François Mitterrand, proche de son mari.
La France a refusé de l’extrader au Rwanda, sans toutefois lui accorder l’asile. Installée en France depuis 1998, elle y vit sans statut légal.
D’avril à juillet 1994, le génocide au Rwanda a fait selon l’ONU 800.000 morts, membres de la minorité tutsi ou Hutu modérés, tués par les Forces armées rwandaises et les milices extrémistes hutu Interahamwe.