Fiche du document numéro 34504

Num
34504
Date
Mercredi 4 septembre 2024
Amj
Auteur
Fichier
Taille
970572
Pages
2
Urlorg
Titre
François Mitterrand, à l'avant-garde de la Françafrique
Sous titre
Thomas Deltombe exhume une facette méconnue du président socialiste : le partisan déterminé, dans les années 1950, de la présence française en Afrique.
Nom cité
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Mot-clé
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
François Mitterrand, ministre de l’Outre-mer (au centre), passe les troupes en revue lors de l’inauguration du nouveau port d’Abidjan, en Côte d’Ivoire, le 5 février 1951.

L'Afrique d'abord ! Quand François Mitterrand voulait sauver l'Empire français

Thomas Deltombe

La Découverte, 340 p., 22 €.

Une nouvelle fois, Thomas Deltombe lève le voile sur un refoulé et un déni collectifs touchant à la relation si singulière -- et si enjolivée -- de la France avec le continent africain. Livre après livre, il exhume des archives et des mémoires, l'histoire sans fard de cette relation empoisonnée, dessinant le contour d'un visage sidérant caché au plus grand nombre. Après son travail novateur avec Manuel Domergue et Jacob Tatsitsa, sur la guerre secrète de la France au Cameroun, publié par La Découverte en 2011, puis sa co-direction de la somme consacrée à l'histoire de la Françafrique, parue en 2021 au Seuil, le voici poursuivant son travail d'élucidation en se penchant, cette fois, sur le rôle et la vision que François Mitterrand s'est forgés de la France en Afrique -- et de l'Afrique pour la France -- dans les années 1950.

Changer l'empire français en Afrique pour le sauver



Étoile montante de la IVe République, le futur président socialiste a été dans ces années-là trois fois ministre, dont celui de la France d'Outre-mer (le nouveau nom donné alors au ministère des Colonies), mais aussi chef de parti, député, sénateur, et même sur le point d'être élu président du Conseil avant d'en être empêché par le coup de force des gaullistes et des ultras de l'Algérie française en faveur du général de Gaulle, en mai-juin 1958. Dans cette décennie qui a précédé les indépendances, François Mitterrand n'a pas été le décolonisateur qu'il a prétendu être et comme l'ont répété à l'envi ses principaux biographes et hagiographes. Bien au contraire, le futur président socialiste, nous montre Thomas Deltombe, était un défenseur fervent de l'empire français.

Son calcul ? Face aux deux blocs constitués par l'URSS et les États-Unis, la France pour maintenir sa position de grande puissance devait absolument garder son empire colonial. « Sans l'Afrique il n'y aura pas d'Histoire de France au XXIe siècle », dit-il à plusieurs reprises. Non pas en se mobilisant pour l'Indochine, il la savait perdue pour l'ambition et la place de l'Hexagone dans le nouvel ordre mondial post 1945, mais en arrimant son flanc africain. Il était encore temps, à ses yeux, de réformer les liens pour s'assurer du lien.

Un programme appliqué par la Ve République



Pour lui, résume Thomas Deltombe, celui-ci « ne pourra se perpétuer que si Paris répond à temps aux exigences des élites africaines, repousse intelligemment les tentations séparatistes et déjoue les manœuvres des puissances concurrentes ». A cela s'ajoute un autre calcul pour François Mitterrand : se servir de ce champ politique pour parvenir, en as des manœuvres qu'il était, au fauteuil de président du Conseil. Une ambition contrariée, de très peu, par les gaullistes, nous rappelle l'auteur.

Revisitant ses actions, ses discours, ses livres, ses actions dans les années 1950, rappelant les épisodes tunisien, algérien, ivoirien dans l'élaboration de sa pensée et de sa politique africaine, l'auteur montre comment François Mitterrand a amorcé le processus qui aboutit à partir de 1960 au trompe-l'œil des indépendances octroyées par la France à ses colonies subsahariennes. « Garder l'Afrique et y rester, n'était-ce pas d'abord confier le soin aux Africains qui sauraient fermer les yeux devant les mirages d'un nationalisme illusoire ? », écrivait-il en 1957. Un programme suivi à la lettre par le général de Gaulle et son conseiller Afrique, Jacques Foccart, les années suivantes. Et que François Mitterrand reprendra à son compte pendant ses deux septennats, entre 1981 et 1995.
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fgtquery v.1.9, 9 février 2024