Citation
Dr. Philibert Gakwenzire
Université du Rwanda
Le colloque international qui s’est tenu au Rwanda en septembre dernier a été organisé par l’Université du Rwanda et l’Equipe française de Recherche sous le thème général portant sur les « Savoirs, sources et ressources sur le génocide perpétré contre les Tutsi, la recherche en acte ». Comme celui qui nous occupe aujourd’hui, ce colloque, où les connaissances, les réflexions et les perspectives ont été partagées endéans de neuf jours, c’est-à-dire du 11 au 19 septembre 2022, a été une marque de renouvellement des relations entre le Rwanda et la France qui avaient été gelées depuis une trentaine d’années.
A part cette question d’ordre politique et diplomatique, ce colloque de septembre 2022, me semble-t-il, a inauguré un processus de renouvellement de l’historiographie du génocide commis contre les Tutsi. Issue de la Commission de Recherche sur les Archives Françaises relatives au Génocide commis contre les Tutsi au Rwanda, cette rencontre scientifique témoignage d’une volonté de stimuler le corps scientifique d’aller même au-delà du rapport Duclert. Rappelons que l’un des objectifs de ladite commission consistait à contribuer au renouvellement des analyses historiques sur les causes du génocide des Tutsi en explorant tous les axes pertinents possibles. Plus important encore, le colloque de 2022 faisait suite à une injonction du Président Macron du 27 Mai de la même année à Gisozi où il demandait de partir de ce rapport pour poursuivre l’œuvre de connaissance et de vérité grâce à la rigueur du travail de recherche et des historiens. Effectivement, ce colloque de 2022 a réuni une centaine d’intervenants comprenant des chercheurs, des académiques et d’autres experts en histoire, droit, linguistique, sociologie et journalisme ainsi que des rescapés du génocide perpétré contre les Tutsis en 1994.
Ces chercheurs ont développé des sujets variés et riches au tour des sous-thèmes regroupé en 19 conférences plénières et 29 tables rondes précédés par des messages vidéo de Son Excellence Paul Kagame, Président de la République du Rwanda et de Son Excellence Emmanuel Macron, Président de la République Française. Le colloque a été aussi caractérisé par des discours des autres autorités politiques comprenant Son Excellence l’Ambassadeur de France au Rwanda ainsi que le Ministre Rwandais de l’Education et celui de l’Unité Nationale et engagement Civique.
Une grande partie du colloque du Rwanda a eu lieu à l’Université du Rwanda, une institution qui a un lien fort avec l’objet qui nous occupe, qu’est le génocide commis contre les Tutsi. Mise en place un an après l’indépendance, l’Université Nationale du Rwanda a défailli de participer au développement inclusif de la nation. En effet, au lieu de remplir sa mission humaniste, elle a été le laboratoire de la haine et de l’ethnisme mortifère qui a fini par emporter plus d’un million de Tutsi. Comme les participants l’ont témoigné, aujourd’hui, l’Université du Rwanda s’engage à ressouder le tissu social et participe activement à la reconstruction du pays d’une façon général.
A part les discours politiques et les présentations scientifiques, le colloque du Rwanda a été caractérisé par les gestes mémoriels en rendant hommages aux victimes du génocide commis les Tutsi. Ainsi, les participants ont visité les sites mémoriaux de Gisozi et Nyanza de Kicukiro dans la Ville de Kigali ainsi que ceux de l’Université du Rwanda au Campus de Huye et celui de Murambi dans la Province du Sud. Lors des visites, des allocutions ont été centrés sur la préparation de longues dates du génocide contre les Tutsis entachés de stéréotypes et plusieurs formes de deshumanisation.
Lors des visites aux sites mémoriaux, les intervenants ont souligné l’importance de mieux comprendre l’engagement des états occidentaux et de la communauté internationale en général dans la préparation et de l’accomplissement du génocide des Tutsi ainsi que de sa négation qui prolifère dans le monde.
Nous pouvons affirmer que les chercheuses et chercheurs spécialistes du sujet en question ainsi que les praticiens et les témoins ont fait une grande contribution à la construction des savoirs scientifiques au niveau collectif et international. Ce fut une tâche importante, vu que le sujet du génocide perpétré contre les Tutsis au Rwanda est confronté au négationnisme d’une part. D’autre part, il existe une nécessité de documentation y relative par le biais d’exploration et l’exploitation des sources nombreuses et parfois difficiles à l’accès.
Les discussions en plénières et au sein des tables rondes ont dégagé au moins trente réflexions qui peuvent servir de pistes de recherche dans le futur. Ces idées portent sur toutes les disciplines concernant la problématique du génocide des Tutsi dans sa préparation, son exécution et la gestion de ses conséquences. Les questions épistémologiques, méthodologiques et pédagogiques ont été aussi évoquées.
Il a été constaté que des discussions au cours du colloque du Rwanda en 2022, se sont déroulées de manière animée et participative avec l’échange des connaissances, des expériences et des compétences scientifiques. Les participants ont souligné l’importance de sources et ressources ainsi que de leurs défis, vu que le bourreau travaille toujours pour les supprimer. En plus, ils ont considéré que ce colloque était un début d’un immense travail qui doit se poursuivre sans relâche. Pour ce faire, il s’est avéré important de faire des recherches minutieuses pour dégager des travaux scientifiques objectifs et fiables.
Dans la même veine, et en conclusion du colloque, les participants ont exprimé fermement la volonté de mettre en place un centre institutionnel de recherche sur le génocide contre les Tutsis, avec un siège au Rwanda. Cet institut sera considéré comme le noyau de recherche sur le génocide commis contre les Tutsi. Il a été aussi souhaité que ce genre de rencontre soit pérennisé et, de ce fait, organisé périodiquement.
© Philibert Gakwenzire
