Fiche du document numéro 34253

Num
34253
Date
Mercredi 21 septembre 2022
Amj
Auteur
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Fichier
Taille
83940
Pages
3
Urlorg
Titre
Bilan de la session du Rwanda – Perspectives pour la session de Paris
Source
Type
Conférence
Langue
FR
Citation
Le 21 septembre 2022,
Paris-Kigali-Huye

Chères et chers collègues, intervenantes et intervenants du Colloque international, session du Rwanda,

Les chercheuses et chercheurs qui repartent depuis lundi soir de Kigali le font le cœur gros, mais avec la promesse de revoir, « l’année prochaine à Paris », celles et ceux qui restent et de continuer à œuvrer en commun, en une communauté humaine et scientifique unie, pour la connaissance la plus approfondie et la plus décisive sur le génocide perpétré contre les Tutsi du Rwanda. Parce que cette connaissance est collective, internationale, et déterminée à la vérité.

La valeur de ce colloque international est ainsi qu’il a été un projet partagé, un temps de réalisation partagé, une organisation partagée, un financement partagé. Des conclusions partagées et prometteuses, ouvrant sur un avenir entre des sociétés et des nations mobilisées sur la connaissance du génocide perpétré contre les Tutsi du Rwanda, et la connaissance des génocides –tant leur phase paroxysmique que leur préparation (démontrant un processus – génocidaire –) et leurs conséquences (dont le négationnisme).

Nous remercions très chaleureusement toutes les participantes et tous les participants qui ont permis que :

-non seulement que le programme d’un colloque unique de neuf jours au Rwanda en différents lieux du pays (Mémorial de Gisozi, Campus de Huye de l’université du Rwanda, Mémorial de Murambi, Chez Lando, au Centre culturel francophone, au Lemigo conférence center, au mémorial de Nyanza-Kicukiro et centre de traitement des archives d’Ibuka, à la résidence de l’ambassadeur de France) soit intégralement tenu,
-mais de plus que ce programme déjà imposant soit même dépassé, avec notamment trois grands moments uniques d’échanges tout à fait exceptionnels, 1-pour la préfiguration de la session en France (début de soirée du dernier jour à Huye), 2-sur les rapports Muse et Duclert (au Lemigo avec Robert Muse en personne), 3-lors des dernières de nos tables rondes qui se sont révélées, sur la pelouse d’Ibuka au mémorial de Nyanza-Kicukiro, d’une remarquable qualité.

Nous remercions aussi avec beaucoup de gratitude : les deux Présidents du Rwanda et de France qui ont soutenu ce colloque et ont laissé toute liberté aux chercheurs de l'organiser et de le réaliser comme ces derniers le souhaitaient, avec le temps qu’il leur fallait et des moyens alloués importants ; les administrations gouvernementales des deux pays (dont ici au Rwanda le Porte-parolat du Gouvernement, le MINAFFET, le MINUBUMWE, le Ministère de l’Education) ; les services de l’Université du Rwanda et du Centre national de la recherche scientifique français ; toutes les compagnies rwandaises avec lesquelles le colloque a travaillé (Mediafix de Jean-Pierre Sagahutu, Mémorial-Aegis Trust, Chez Lando Hôtel, Lemigo Hôtel, Boni Consili Hôtel, Le Bistrot) ainsi que le Centre culturel francophone de Kigali et les services de l’ambassade de France au Rwanda.

Il faut continuer. Nous nous y sommes engagés, à Huye, à Kigali. Commencer par restituer l’ensemble des savoirs, des questionnements et des engagements qui se sont affirmés durant ces longues et denses journées auxquelles personne ne souhaitait renoncer.

Comme l’a relevé le Ministre Dr. Bizimana à l’ouverture du colloque à Huye, ce colloque aurait dû être tenu au lendemain du génocide. Près de trente ans ont été perdus, en particulier à cause des autorités françaises passées qui ont systématiquement refusé au Rwanda (à quelques exceptions dont celle du président français Nicolas Sarkozy) le droit à la vérité, le droit à la justice, et qui ont multiplié contre le nouveau Rwanda des actes d’agression sur lesquels, également, il faudra revenir en chercheurs armés des moyens de la recherche.

Rattraper tout ce temps perdu a exigé que la recherche se mette en acte, mobilise ses chercheuses et chercheurs, en particulier ses plus jeunes, et agisse depuis le Rwanda devenu le haut lieu de l’investigation et de la réflexion sur le génocide perpétré contre le génocide des Tutsi. Durant ces neuf jours de colloque, l’événement scientifique était bien là, à Kigali, Huye, à Murambi, à Kicukiro. Et ce fut un événement humain par la langue, les mots, les concepts et les sentiments exprimés. Par la capacité de tous à réaliser un programme dont on disait avant de débuter le colloque qu’il était trop volumineux, trop dense, trop fatiguant. Doit-on vraiment se préoccuper d’être fatigués ? Cela n’a pas été le cas puisque des journées de colloque se sont prolongées, même au-delà de l’horaire fixé ainsi qu’il a été précisé plus haut ! De fait, nous sommes passés, comme je l'ai dit après le Ministre, du temps perdu à l'esquisse d'un temps retrouvé.

Il faut continuer. Nous continuerons. La session de Paris est d’ores déjà programmée à partir du 11 septembre 2023, pour une durée qui dépendra des moyens financiers et des disponibilités des chercheurs. Il faut organiser matériellement cette session. J’y travaille déjà, en premier lieu sur le financement qui reste à concevoir. Mais une grande cause appelle toujours de grands efforts pour la faire exister. Nous en ferons notre affaire, particulièrement pour la prise en charge de nos collègues d’Afrique. Il faudra que du côté de l’Europe et de l’Amérique, les collègues mobilisent les fonds de recherche de leur université ou de leur centre car le comité d’organisation ne pourra pas tout prendre en charge.

Il faut aussi organiser intellectuellement cette session de Paris. Elle devrait repartir des séries de conclusions dressées à Huye et à Kicukiro (dont, par l’honorable Antoine Mugesera et le professeur Joseph Nsengimana), et elle devrait comprendre cinq volets précisément définis :

1-présentation des ressources produites par la session du Rwanda, sous différentes formes, transmissions et médiations. Je m’en occuperai personnellement avec l’équipe de recherche (ERE) : il importe que toutes et tous nous fassent remonter tous les développements liés au colloque ou qui pourraient s’y rattacher. Parmi cette restitution, les actes du colloque et la bibliothèque des captations vidéo qui comme je vous l’ai dit, peut constituer un cours en ligne de grande qualité. Cette première séquence sera l’occasion de remettre les exemplaires des actes et de présenter les ressources en ligne générées par le colloque.

2- pérennisation du dispositif scientifique. Pour que cette phase de restitution ne soit pas un acte isolé, il convient d’envisager une pérennisation du dispositif, avec par exemple une rencontre internationale de haut niveau au Rwanda tous les deux ans à partir de 2024 (pour la trentième commémoration), ce dispositif pouvant s’ancrer sur un programme international de travail pluri-annuel, pluri-disciplinaire, sur le génocide perpétré contre les Tutsi du Rwanda. Ce programme sera préparé en amont par une équipe jeune recherche, cette dernière étant déjà très présente lors de cette session. Le programme de travail devra s’articuler sur les initiatives en cours (Rwandamap, RESIRG asbl, MINUBUMWE, CESPRA-Mémorial, etc.). Il sera formulé lors du colloque de Paris et connaîtra un début de réalisation dès ces jours de septembre 2023 sous forme de communications individuelles ou collectives fondées sur un travail de terrain en cours ou récemment achevé.

3-poursuite de l’enquête sur les sources (orales, archivistiques, documentaires, audio-visuelles, matérielles,…), lancement d’initiatives dans ce domaine (mission conjointe d’archivistes, campagne de numérisation des photographies, portail fédérant les archives orales..), à l’initiative de l’équipe jeune recherche élargie (notamment à des chercheurs seniors, à des professionnels des archives, des bibliothèques, etc.)

4-poursuite de la réflexion sur la perspective d’un Centre international de recherche et de ressources (contrairement au programme de travail, il sera beaucoup compliqué d’avancer en distanciel, et il est nécessaire de reprendre la réflexion en présentiel, sur la base de propositions émanant de celles et ceux qui sont les plus impliqués dans le dossier).

5-approfondissement du lien recherche-éducation autour d’une demi-journée (par exemple le mercredi 13 septembre lorsque les professeurs sont disponibles), approfondissement du lien recherche-justice, et approfondissement du lien recherche-lutte contre le négationnisme

Pour le comité organisateur*, Vincent Duclert

*Prof. Vincent Duclert, Prof. Charles Mulinda Kabwete, Dr. Chantal Morelle, Dr. Alphonse Muleefu.
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