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Espérance Patureau, qui a perdu une grande partie de sa famille lors du génocide, est la présidente de la cellule locale de l’association Ibuka.
Avril 1994-avril 2024 : 30 ans se sont écoulés depuis le début du massacre des Tutsi du Rwanda. Comment trois décennies plus tard ce petit pays d’Afrique s’est relevé du dernier génocide perpétré au XXe siècle, ayant conduit à la mort d’au moins un million de personnes.
Victimes et bourreaux doivent vivre ensemble
La Châlettoise Espérance Patureau a perdu une grande partie de sa famille durant cette période, et elle est rentrée tout récemment du Rwanda afin de préparer la trentième commémoration dimanche 21 avril, dans sa ville. Espérance s’est battue avec son mari Bernard Patureau (aujourd’hui décédé) pour que les victimes de ce génocide s’étant déroulé du 7 avril à juillet 1994 ne soient pas oubliées. Et elle continue à se battre au sein d’Ibuka, dont elle préside la cellule locale du Montargois.
Ibuka, qui signifie « Souviens toi » en kinyarwanda a plusieurs missions : la mémoire, la justice, l’aide aux rescapés, la lutte contre le négationnisme et le révisionnisme, l’éducation et la transmission. « À ce titre, je me rends régulièrement au Rwanda pour observer les résultats concrets de l’aide apportée par notre association. Nous venons d’achever la restauration d’une maison pour une rescapée. Nous avons également pris en charge une trentaine de jeunes orphelins matériellement dans leur quotidien et dans leurs études supérieures », explique-t-elle.
Localement, Ibuka informe et sensibilise notamment le jeune public par des interventions dans le milieu scolaire, dans les collèges et lycées.
Les chantiers, au propre comme au figuré, sont immenses et les traumatismes béants dans un pays ou victimes et bourreaux ne peuvent faire autrement que de vivre ensemble. Aussi, Ibuka apporte sa pierre à l’édifice de la reconstruction totale de la société rwandaise. « Trente ans après, c’est l’heure du bilan pour toute une génération qui n’a pas connu le génocide. Ils sont fils de parents rescapés, comme de bourreaux, ou sont nés d’un viol et ne comprennent pas le comportement de leurs parents traumatisés, qui demeurent silencieux ou les rejettent. Ces jeunes apprennent le génocide à l’école », développe Espérance Patureau.
Toutefois, cette Châlettoise originaire de Butare (Huye aujourd’hui) se trouve revigorée par le redressement spectaculaire opéré par son pays natal : « Aujourd’hui, tous les jeunes rwandais sont scolarisés et l’ensemble de la population est pris en charge sur le plan santé. L’État du Rwanda c’est un miracle ! Même dans mes rêves les plus fous, je ne l’aurais imaginé ni espéré. »