Citation
Une plainte pour crime de guerre a été déposée lundi à Paris concernant la mort par balle de deux militaires français, René Maïer et Alain Didot, et de l’épouse de l’un d’eux, Gilda Didot, début avril 1994, peu après le déclenchement du génocide des Tutsi au Rwanda, selon le récépissé de dépôt.
Cette plainte contre X avec constitution de partie civile, qui permet d’obtenir quasiment systématiquement des investigations, est déposée au nom de l’association française Survie et de deux membres de la famille de l’épouse d’Alain Didot.
Ce document, consulté par l’AFP, dénonce les infractions de crime de guerre, homicide volontaire et usage de faux en écriture.
Au début des années 1990, la France soutient le président Juvénal Habyarimana, un hutu en butte à la rébellion tutsi du Front patriotique rwandais (FPR), basée en Ouganda et menée par Paul Kagame.
Après une offensive du FPR déclenchée le 1er octobre 1990, Paris envoie dans le cadre de l’opération « Noroit » jusqu’à 600 soldats.
Dans ce cadre, l’adjudant-chef Alain Didot, mécanicien radio, arrive à Kigali à l’été 1992 avec son épouse, Gilda. « Conseiller auprès des FAR » et assurant « la sécurisation des communications de l’ambassade de France », il avait installé à son domicile une station radio, selon la plainte. Il « occupe donc une fonction aussi centrale que sensible ».
L’adjudant-chef René Maïer arrive, lui, à Kigali en septembre 1993 comme assistant militaire technique.
Alors que débutent les massacres contre la minorité tutsi déclenchés au lendemain de l’attentat contre l’avion du président Habyarimana le 6 avril 1994, l’adjudant-chef Didot n’est plus joignable par radio à partir du 8 avril à 14H00. Il était chez lui avec son épouse.
« Le 8 avril à 17H00, le couple Didot est signalé mort par des témoins », selon la plainte.
Des Casques bleus belges récupèrent dans le jardin de la villa les dépouilles du couple et de leur jardinier rwandais le 12 avril, puis celle de René Maïer le lendemain.
Les corps des trois Français sont rapatriés en France après un passage à Bangui (Centrafrique), où sont établis les certificats de décès.
Mais ces certificats -- au nombre de huit pour les trois victimes -- sont des faux, estiment les plaignants : les dates et les motifs sont « variables », mort « accidentelle » ou par « des armes à feu ».
Aucune autopsie n’a été pratiquée et aucune enquête n’a été diligentée sur ce triple homicide.
La mort des trois Français a néanmoins été abordée lors des investigations à Paris sur l’attentat contre l’avion présidentiel, dans lequel sont morts trois membres d’équipage français, et qui ont abouti à un non-lieu.
S’est alors posée la question du « lien » entre l’attentat et la mort des deux militaires qui ont pu « entendre un message révélateur des circonstances de l’attentat » via la station radio, selon la plainte.
lp-mk/fal