Avec notre correspondante à Kigali, Lucie Mouillaud
Des réactions officielles pourraient tomber au cours du week-end du 6-7 avril 2024, pendant la visite de la délégation française à Kigali à l’occasion, ce dimanche, du 30
e anniversaire du génocide contre les Tutsis au Rwanda.
Une partie des officiels français sont déjà arrivés ce vendredi matin, dont le secrétaire d’État à la mer et à la biodiversité Hervé Berville. Pour ce dernier, la présence de la délégation ministérielle française marque la continuité du rapprochement engagé par la visite du président Emmanuel Macron en mai 2021 à Kigali. «
Être ici présents, c'était essentiel. Ça démontre l'attachement de la France et du président à la mémoire, à la transmission et à la reconnaissance de ce génocide des Tutsis. »
Après avoir reconnu en 2021 la responsabilité «
accablante » de Paris, l’Élysée a rapporté ce jeudi que le chef d’État Emmanuel Macron estimait que la France, «
qui aurait pu arrêter le génocide avec ses alliés occidentaux et africains, n’en a pas eu la volonté ». Une déclaration, selon le secrétaire d’État, en cohérence avec le message porté par le gouvernement depuis trois ans.
«
Il a au fond fait un pas supplémentaire qui vise à reconnaître que dans la mécanique qui s'est enclenchée, dans l'engrenage diplomatico-militaire qui s'est enclenché, nous aurions pu avoir les capacités avec la communauté internationale d'éviter ce génocide. Reconnaître ses torts, c’est toujours être à la hauteur de l’histoire. »
Un rapprochement entre les deux pays que le secrétaire d’État souhaite «
irréversible ». Le ministre des Affaires étrangères Stéphane Séjourné doit le rejoindre dans la capitale rwandaise dès samedi en fin d’après-midi pour rencontrer son homologue, Vincent Biruta, avant la cérémonie de commémoration prévue ce dimanche.
Le rôle de Paris pendant le génocide a longtemps terni les relations entre les deux capitales, jusqu’au rapprochement lancé par la visite du président Emmanuel Macron au Rwanda, en mai 2021. Un déplacement marqué par son discours du mémorial de Gisozi où il avait reconnu la responsabilité française. «
Un discours puissant », avait commenté le chef de l’État Paul Kagame, qui avait salué «
le courage immense » de son «
ami ».
Deux visites officielles au Rwanda avaient suivi la même année : l’ancien ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian et le ministre délégué chargé du Commerce extérieur, Franck Riester. Un signe du réchauffement diplomatique, illustré par la nomination, toujours en 2021, et après six ans de vacance, d’un ambassadeur français au Rwanda.
La France «
aurait pu arrêter le génocide » avec ses alliés mais n'en a «
pas eu la volonté », a affirmé l’Élysée ce 4 avril. C’est ce que le président français, Emmanuel Macron, doit déclarer dans une vidéo qui sera diffusée ce 7 avril à l’occasion du 30
e anniversaire du génocide contre les Tutsis au Rwanda.
« Nous espérons que la justice aura enfin tous les éléments pour se prononcer », insiste la FIDH
La position d'Emmanuel Macron sur les responsabilités de la France dans le massacre des Tutsis continue de faire réagir. La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), qui dès 2005 a porté plainte contre X en France pour «
complicité de génocide », salue cette nouvelle avancée de la France. Le président d'honneur de la FIDH, Patrick Baudoin, espère que cela permettra des poursuites judiciaires contre des responsables militaires et politiques de l'époque.
«
Nous avons observé ce qui s'est passé à Bisesero pendant trois journées : alors que l'armée française était présente sur place, il y a eu un massacre de milliers de Tutsis, indique Patrick Baudoin, au micro de Sidy Yansané. Et ce qu'on observe, c'est qu'il y a eu un rapport d'historiens de la Commission Duclert qui a conclu à des responsabilités lourdes et accablantes de la France, qui a obtenu la communication de documents qui n'ont pas été donnés à la justice, ce qui est quand même un comble. C'est-à-dire que les historiens ont obtenu des documents classifiés alors que la justice, qui les a réclamés, ne les a pas obtenus. Et la justice, elle est là pour la vérité et pour les victimes ».
Il conclut : «
Ce que nous espérons, c'est que la justice, effectivement, ait enfin tous les éléments pour pouvoir se prononcer en connaissance de cause, c'est-à-dire la possibilité d'obtenir des documents classifiés qui ont été refusés jusqu'à présent, et puis aussi la possibilité d'entendre, ce qui n'a pas été le cas jusqu'à présent, des responsables politiques qui ont fui leurs responsabilités. »