Sous titre
L'indignation cessera-t-elle de nous harceler ? Le Dr Alexis N., directeur du centre hospitalier de Kigali (1), a lancé sur Europe 1 un appel désespéré pour qu'une ambulance soit mise à la disposition de son hôpital.
Citation
J'étais à Kigali de septembre à décembre 1994, et j'ai bien connu le Dr Alexis N. pour avoir travaillé, en qualité de biologiste, à la réhabilitation des laboratoires du CHK. Nous étions à la mi-décembre, lorsque l'unique véhicule de l'hôpital, seul rescapé des pillages du mois d'avril (un vieux modèle militaire de 1975), rendit l'âme pour avoir trop servi. Un mois plus tard, le problème reste entier. Réapprovisionnement, transport des malades, évacuation des morts sont plus que jamais à la merci des circonstances, des occasions. On consulte, on hospitalise beaucoup au CHK et on meurt encore des séquelles de la terrible guerre, mais aussi des épidémies que, faute de moyens, les autorités sanitaires ont du mal à juguler (méningite, tuberculose, dysenterie...).
Ces autorités, comme les autres tous ministères confondus, ne cessent d'affronter de consternantes réalités quotidiennes. Les nombreuses agences onusiennes, auxquelles viennent s'ajouter une centaine d'ONG, se déploient partout dans la ville d'une façon ostentatoire. Aucune d'entre elles n'a donc pu, n'a su, n'a voulu trouver de véhicule en réponse à la requête du Dr Alexis. Scandaleux et anachronique constat dans un contexte humanitaire où l'ampleur des moyens logistiques tend insidieusement à se substituer aux élémentaires besoins des structures médicales.
Va-t-on laisser longtemps encore agoniser les services publics du Rwanda ?
Va-t-on laisser longtemps encore les responsables de cet Etat se battre contre l'indécente indifférence de la communauté internationale ?
L'heure ne serait-elle pas enfin venue d'apporter un soutien sans réserve à la reconstruction de ce pays rendu exsangue par l'horrible tragédie d'hier ?
Anne Urtubia, Paris
(1) Le CHK est la principale structure hospitalière du Rwanda. Il est toujours considéré comme l'hôpital de référence nationale.
