Avec notre correspondante à Bruxelles, Laure Broulard
Lors de l’instruction, la femme de Séraphin Twahirwa avait raconté, avec des détails déchirants, comment il l’avait violée, épousée de force, maltraitée et menacée de mort, parce qu’elle était Tutsie. Un récit corroboré par un de ses proches, déjà entendu au procès.
Mais une fois arrivée devant la cour d’assises jeudi, la témoin nie tout en bloc. «
Nous nous aimions, il m'appelait "ma chérie", il n’y avait pas de problème », assure-t-elle devant ce mari dont elle est séparée, qu’elle n’a pas vu depuis des années, assis sur le banc des accusés.
Elle explique qu’elle a subi des pressions au cours de l’instruction pour accuser Séraphin Twahirwa à tort et évoque un agent des renseignements rwandais venu l’intimider au Kenya, où elle réside. Face aux jurés, elle assure désormais que son mari ne possédait pas d’arme, n’a pas organisé de meetings de miliciens à leur domicile en 1994. Elle ne sait pas s’il a participé à des violences pendant le génocide.
«
Un témoignage très fort et important », a estimé Vincent Lurquin, l’avocat de l’accusé jeudi soir. De son côté, Michèle Hirsch, qui représente les parties civiles évoque une «
audience surréaliste ». «
Cette femme est une victime, de Séraphin Twahirwa et du génocide des Tutsis. La seule personne qui a un intérêt à ces nouvelles déclarations, c'est son mari », conclut-elle.
La veille, alors que la témoin demandait un huit-clos, la procureure avait rappelé que Séraphin Twahirwa a envoyé des messages à sa femme avant son audition préliminaire il y a trois ans pour tenter de la dissuader de témoigner. La présidente de la cour d’assises avait ensuite ordonné la saisie du téléphone de l’accusé afin de déterminer s’il y a eu d’autres pressions de ce genre ces derniers temps.