Fiche du document numéro 33104

Num
33104
Date
Vendredi 27 octobre 2023
Amj
Auteur
Fichier
Taille
34115
Pages
3
Urlorg
Titre
A Kinshasa, Jean-Luc Mélenchon affirme sa « fraternité » avec la RDC face aux « exactions » du Rwanda
Sous titre
En visite en République démocratique du Congo, le leader de gauche a apporté un soutien appuyé aux autorités et fustigé les « visées expansionnistes » de Kigali.
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Mot-clé
M23
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
A 6 000 km de Paris, très loin des débats qui déchirent la gauche française, Jean-Luc Mélenchon a entamé mardi 24 octobre une tournée de six jours en République démocratique du Congo (RDC). Une visite – sa deuxième sur le continent africain en moins d’un mois, après le Maroc – placée sous le signe du soutien aux autorités congolaises face aux « visées expansionnistes » du Rwanda.

« Les Européens, qui ont souvent l’habitude de donner des conseils aux autres, doivent faire preuve d’humilité devant un monde aussi neuf en dynamisme, tandis que nous, la vieille Europe, sommes un peu plus lents à comprendre », a lancé l’« insoumis » à son arrivée à Kinshasa. Pas de conseils, donc, mais quelques certitudes, que Jean-Luc Mélenchon a répétées sous les marbres blanc et rose de la salle des banquets de l’Assemblée nationale, aussi chaleureuse qu’un hall de gare.

Il s’y est exprimé jeudi en fin d’après-midi devant une vingtaine de députés triés sur le volet, membres du bureau de l’Assemblée ou présidents de commissions parlementaires. « L’Afrique n’est pas inscrite dans le futur de l’humanité, elle est le futur, vous êtes le futur », a-t-il clamé en appuyant sa démonstration sur la jeunesse de la population et la force du nombre.

Emmanuel Macron n’est jamais critiqué nommément, comme le veut l’usage pour une personnalité politique française à l’étranger, mais c’est bien à lui que Jean-Luc Mélenchon fait référence quand il répète ne pas vouloir « donner des conseils ». Lors de son passage à Kinshasa, le 4 mars, dans le cadre d’une tournée en Afrique centrale, le président français avait froissé son auditoire sur un sujet explosif : la responsabilité du Rwanda dans la permanence de la crise dans l’est de la RDC depuis trente ans.

Proposition de résolution au Parlement français



Alors que le groupe d’experts des Nations unies dénonçait en 2022 l’implication de l’armée rwandaise sur le sol congolais, Emmanuel Macron avait suggéré au président Félix Tshisekedi, présent à ses côtés lors d’une conférence de presse, de se remettre en question. « Depuis 1994 [date du génocide des Tutsi au Rwanda, qui allait ensuite déstabiliser toute la RDC et l’est du pays en particulier], vous n’avez pas été capables de restaurer la souveraineté [de votre pays]. Il ne faut pas chercher des responsabilités à l’extérieur », avait-il déclaré. Evitant de nommer le Rwanda, redevenu un allié français dans la région, il invitait aussi Kinshasa à faire en sorte que les responsables congolais d’atrocités soient traduits devant la justice.

Rien de tel avec le coprésident de l’Institut La Boétie (un think tank affilié à La France insoumise), alors que les violences dans l’est de la RDC connaissent un nouveau pic d’intensité ces derniers jours. « J’ai voulu réaffirmer la fraternité qui est la nôtre à l’égard du peuple congolais, dans un moment où nous savons qu’il rencontre une difficulté qui est totalement importée et dans laquelle il n’a aucune responsabilité, puisque pour sa part, il a respecté tous les engagements de cessez-le-feu », a dit Jean-Luc Mélenchon au sortir d’une heure d’entretien, jeudi midi, avec le président Tshisekedi.

Le trait est un peu grossi. Peu auparavant, en effet, le média congolais Radio Okapi avait fait état de « tirs à l’arme lourde » aux environs de Goma, la capitale du Nord-Kivu, par les Forces armées de RDC (FARDC) sur les rebelles du Mouvement du 23-Mars (M23), soutenus par Kigali.

Jean-Luc Mélenchon a remporté un certain succès auprès des députés en leur rappelant que les élus de La France insoumise (LFI) sont depuis juillet « signataires d’une proposition [de résolution] devant le Parlement français qui condamne les intrusions et les exactions faites par le Rwanda sur le territoire de la RDC ». Le leader de gauche a dénoncé « la reprise des activités militaires d’agression au moment où la RDC organise ses élections ». Des scrutins présidentiel, régionaux et législatifs doivent se tenir le 20 décembre. « J’attends que la condamnation de la France, par la résolution que présentent mes collègues, fasse ressaisir le Rwanda. Le plus grand pays francophone du monde [la RDC, forte de 100 millions d’habitants] aspire à la paix et à organiser ses élections comme il l’entend », a-t-il dit.

Une partie de la délégation se rendra à Goma



Selon Jean-Luc Mélenchon, le Rwanda a clairement affiché son intention de déranger la tenue des élections en RDC : « On voit bien que c’est une volonté délibérée de perturber le mécanisme du fonctionnement de la démocratie, et ce n’est qu’une manière de prolonger la remise en cause de sa souveraineté, parce que la souveraineté d’une nation s’exprime par les élections. » Un développement qui fait dire à un diplomate européen qu’« il est sur la même ligne que le président congolais ». « C’est sûr, ça change de Macron », lâche un député présent également lors du dernier voyage présidentiel.

Jean-Luc Mélenchon aura l’occasion de répéter ces propos lors de son séjour, qui prévoit un échange avec des étudiants de l’Université de Kinshasa (Unikin), à l’invitation de laquelle il effectue ce déplacement. Il y présentera son dernier livre, Faites mieux ! Vers la Révolution citoyenne. « Mais sans ingérence dans la politique congolaise », a-t-il affirmé. Une partie de sa délégation, composée notamment de trois députés LFI – Carlos Martens Bilongo (originaire de RDC), Nadège Abomangoli (originaire du Congo-Brazzaville) et Arnaud Le Gall (membre de la commission des affaires étrangères à l’Assemblée nationale) –, se rendra à Goma.

Enfin, outre un détour prévu par le parc marin des Mangroves, à Muanda (ouest), le leader insoumis prendra la parole au tout nouveau mémorial Patrice-Emery-Lumumba, à Kinshasa, consacré à l’ancien premier ministre, héros de l’indépendance et martyr de la décolonisation, torturé puis assassiné en janvier 1961.

Christophe Châtelot (Kinshasa, envoyé spécial)
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fgtquery v.1.9, 9 février 2024