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ANNONCÉE les 16 et 17 juin à Kiev puis à Moscou, la « mission de paix » de six chefs d’Etat (Afrique du Sud, Congo-Brazzaville, Sénéal, Ouganda, Zambie et Egypte), flanqués du Comorien Azali Assoumani, président de l'Union africaine, aura du mal à convaincre de sa neutralité.
Le colosse sud-africain masque mal son tropisme kremlinophile. Accusé par Washington d’avoir livré en loucedé [douce] de l’armement à Moscou, îl a, en janvier, déroulé le tapis rouge au chef de la diplomatie Sergueï Lavrov et, le mois suivant, accueilli un exercice naval russo-chinois au large de Durban. A l’exception du Zambien Hakainde Hichilema, aucun des « missionnaires » n’a d’ailleurs condamné l’agression ordonnée par Poutine.
Posté à la faveur d’une visioconférence préparatoire des six, un tweet de l’Ougandais Yoweri Museveni révèle les visages de deux « chevilles ouvrières » de la médiation : celui du Français Jean-Yves Ollivier, lobbyiste zélé du Congolais Denis Sassou-Ngesso et celui de son vieux complice sud-africain Ivor Ichikowitz, philanthrope mais aussi président exécutif de Paramount Group, qui fournit blindés, hélicos et avions de combat à l’Arabie saoudite, au Gabon ou au Congo. Pacifique, non ?
Tous russophiles ?
Pilier de la Françafrique chiraquienne, enrichi dans les céréales et les hydrocarbures, coursier, dans sa jeunesse, pour l’OAS, Ollivier — alias « M. Jacques » — masque mal sa russophilie. Il fut un temps consultant chez Rosatom, geant du nucléaire made in Russia. Sa mission ? Œuvrer à la coopération Moscou-Pékin sur le marché des centrales atomiques civiles.
De même, la Fondation Brazzaville, qu’il dirige, scellera, en mai 2020, un partenariat avec l’institut de recherche Dialogue des civilisations, joujou de l’oligarque poutiniste Vladimir Yakounine. Bizarrement, le texte de l’accord a disparu du site de la Fondation, qui précise désormais que « le protocole envisagé n'a jamais été mis à exécution »...
Avec cette « médiation », Olivier poursuit la quête d’une vieille chimère : parer son ami Sassou-Nguesso — trente-neuf ans aux manettes du Congo — des atours d’un grand pacificateur. Jadis marxiste prosoviétique, l’autocrate a reconquis le pouvoir dans le sang en 1997, avec l’aide des réseaux françafricains et d’une poignée de mercenaires... ukrainiens.
En 2014, Ollivier a publié chez Fayard une complaisante autobiographie : « Ni vu ni connu ». Comme « ni vu ni connu j't'embrouille » ?
J. C.