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Un juge d’instruction parisien a récemment ordonné la prise en compte d’un rapport sur le rôle de la France pendant le génocide au Rwanda dans l’information judiciaire, pourtant close depuis 2018, sur les massacres de Bisesero fin juin 1994, a appris l’AFP mardi de source proche du dossier.
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Dans cette information judiciaire ouverte en décembre 2005, le juge devait prendre une décision finale, un probable non-lieu, après la fin de l’information judiciaire prononcée en juillet 2018, sans mise en cause, puis les réquisitions de non-lieu du parquet de Paris d’avril 2021.
Mais dans une ordonnance du 3 juin, dont l’AFP a eu connaissance de source proche du dossier, le juge Michel Raffray évoque l’exploitation du rapport de la commission présidée par l’historien Vincent Duclert, publié fin avril 2021.
« Il apparaît nécessaire à la manifestation de la vérité de poursuivre l’instruction en exploitant dans un premier temps ce rapport », considère M. Raffray.
Le magistrat a saisi un assistant spécialisé pour procéder à une synthèse du rapport. Versé le 23 juin, ce résumé détaille sur sept pages les conclusions de la commission, qui avait notamment pointé « l’échec profond » de la France lors des massacres de Bisesero.
Ce dossier reflète la controverse historique sur les objectifs de la mission militaro-humanitaire française Turquoise, déployée au Rwanda sous mandat de l’ONU pour faire cesser le génocide des Tutsi.
Selon l’ONU, les massacres ont fait plus de 800.000 morts entre avril et juillet 1994, essentiellement au sein de la minorité tutsi.
Dans cette affaire, les associations Survie, Ibuka, la FIDH et six rescapés de Bisesero, parties civiles, accusent l’armée et la France de « complicité de génocide » pour avoir, selon eux, sciemment abandonné pendant trois jours les civils tutsi réfugiés dans les collines de Bisesero, dans l’ouest du pays, laissant se perpétrer le massacre de centaines d’entre eux par les génocidaires, du 27 au 30 juin 1994.
Pour Eric Plouvier, avocat de l’association Survie, l’« intérêt de ces nouveaux actes pourrait être "dans un premier temps" de constituer un appui -- avec les pistes éventuellement ouvertes par le rapport Duclert ou ses omissions -- pour procéder à de nouvelles investigations ».
Ce que cet avocat qualifie de « réouverture de l’instruction » commande, selon lui, de « procéder à l’audition détaillée du général (Christian) Quesnot, dirigeant l’Etat-major particulier du chef de l’Etat, et à l’audition d’Hubert Védrine coordonnant en sa qualité de secrétaire général les activités diplomatiques durant le génocide rwandais ».