Fiche du document numéro 25993

Num
25993
Date
Lundi 16 janvier 2023
Amj
Auteur
Auteur
Fichier
Taille
194554
Pages
3
Titre
Lettre ouverte à la Présidente du Parlement européen et aux parlementaires de l’Union européenne [Dénonciation des discours de haine et de leurs conséquences en RDC]
Nom cité
Nom cité
Lieu cité
RDC
Mot-clé
Mot-clé
Type
Lettre
Langue
FR
Citation
PARLEMENT EUROPÉEN
Madame Roberta Metsola – Présidente
Paul-Henri SPAAK
09B011
60, rue Wiertz
1047
Bruxelles Belgium
Bruxelles, 16 janvier 2023,
Lettre ouverte à la Présidente du Parlement européen et aux parlementaires de l’Union européenne

Madame la Présidente,
Mesdames et messieurs les membres du Parlement,

Nous sommes des organisations de la société civile congolaise. Nous travaillons activement à dénoncer
les discours de haine et leurs conséquences en République démocratique du Congo.
Dans le cadre de ce travail, nous avons identifié les auteurs, coauteurs et complices des discours de
haine localisés en République démocratique du Congo, en Europe et notamment en Belgique, et en
Amérique du Nord.
Ce travail nous a aussi permis de recenser les dossiers des victimes des discours de haine, des éleveurs
tutsi de Minembwe et du Masisi, des militaires Tutsi membres des FARDC, des commerçants et civils
victimes de pogroms, d’assassinats et de torture en raison de leur appartenance à la communauté
Tutsi.
Nous avons même repéré des appels en Europe pour collecter des fonds en vue de financer des milices
et mouvements armés maï-maï.
Le résultat de cette situation est catastrophique pour les Tutsi de nationalité congolaise. Nous
n’hésitons pas à dénoncer un processus génocidaire qui frappe nos concitoyens en raison de ce critère
d’identité. Cette situation a d’ailleurs été dénoncée récemment par Madame Alice Wairimu Nderitu,
représentante spéciale du secrétaire général des Nations Unies pour la prévention des génocides, dans
son rapport récent au Secrétaire général des Nations Unies. Ces discours de haine et les coalitions
contre nature entre certaines unités FARDC et des groupes armés Maï-Maï et d’autres groupes armés
réunis dans une « coalition patriotique » avec les FDLR ont été mentionnés expressément par le groupe
des experts des Nations Unies dans leur dernier rapport.

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Nos organisations avaient été interpellées par le fait que votre Parlement n’attachait pas grande
attention à la situation vécue par les Tutsi de nationalité congolaise, les résolutions adoptées n’y
faisant pas référence.
Récemment, nous avons pris connaissance par la voie de la presse, de certaines dérives dont votre
Haute Institution semble la victime. Nous avons découvert qu’une enquête pour corruption et autres
infractions, était menée par un magistrat instructeur, le tout dans le respect des règles de procédure
pénale en vigueur en Belgique et notamment la présomption d’innocence dont bénéficient toutes les
personnes citées dans le cadre de ces enquêtes.
Notre attention a cependant été attirée par le fait qu’une association de droit belge, Fight Against
Impunity serait également sous enquête, association particulièrement bien introduite dans certains
milieux parlementaires.
En examinant le site de cette association, nous avons découvert que celle-ci dont la Présidence
d’honneur est assurée par le Docteur Mukwege, relayait très largement les thèses d’un mouvement
dénommé La Lucha, mouvement présent principalement au Kivu et dont les membres relayent
activement les messages de haine les plus virulents à l’encontre des personnes tutsi de nationalité
congolaise.
Le site de l’organisation Fight against impunity contient quasi exclusivement des messages de soutien
à la Lucha.
Nous pouvons vous faire tenir un dossier plus complet concernant les messages de haine des Tutsi
relayés par la Lucha au Kivu. D’ores et déjà vous trouverez ci-joint copie de messages de haine relayés
par la Lucha dans la Région des Grands Lacs. Il s’agit du document de présentation du collectif des
avocats en charge de la défense des Tutsi de nationalité congolaise, lors de la conférence de presse du
19 décembre dernier ainsi qu’un rapport rédigé par une personne de nationalité congolaise dénonçant
les discours de haine au péril de sa vie.
Savez-vous que ce sont des militants de la Lucha qui, le 15 juin 2022, ont poussé la population à
reprendre des chants utilisés par les militants Interhamwe avant le génocide des Tutsi au Rwanda en
1994, et ce lors d’une manifestation organisée à Goma ? Le même jour, des manifestants excités par
ces militants se sont rendus à la grande Barrière à la frontière entre la République démocratique du
Congo et le Rwanda et ont annoncé publiquement qu’ils allaient finir le travail, faisant allusion au
génocide de 1994.
Savez-vous que lors des fêtes organisées par Fight Against Impunity pour le 10ème anniversaire de la
Lucha, Madame Marie Arena a pris la parole aux côtés de personnes comme Bienvenu Matumo,
membre de la Lucha qui qualifie les Tutsi de félins qui veulent faire avancer leurs agendas territoriaux.
C’est une militante de la Lucha, madame Rebecca Kabuo, qui affirme qu’il n’y pas de Banyamulenge au
Congo. C’est Pascal Mirindi, militant de la Lucha, qui réclame publiquement le retour des tutsi au
Rwanda, reprenant les discours de certains extrémistes qui en 1994 réclamaient le départ des Tutsi du
Rwanda. A Bukavu, You You Muntu Mosi, chargée de la communication de la Kopax à la demande du
Docteur Mukwege, demande publiquement aux munyarwandais de se taire en disant « ils sont chez
eux » laissant entendre que les Tutsi ne le sont pas. C’est elle encore qui réagissant à une rencontre
entre le cardinal AMBONGO et une délégation de Banyamulenge, les traite de pseudo et traite la
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réunion de Bordel. C’est David Mubawa, militant de la Lucha, qui proclame qu’il n’y a pas de terre
appartenant aux Tutsi sur le sol congolais. Ce ne sont que quelques exemples parmi tant d’autres.
Pour notre part, cette organisation propage activement la haine du Tutsi et ses membres seront
poursuivis en justice par un collectif d’avocats.
Dans cette situation où des citoyens tutsi de nationalité congolaise, vivent les conséquences tragiques
de ces appels à la haine, nous nous demandons jusqu’à quel niveau ces personnes et organisations
sont financées par l’association Fight Against Impunity et quels sont les montants de cette association
provenant de fonds publics au sein de l’Union européenne.
L’intérêt de nos organisations est de faire cesser les messages de haine en République démocratique
du Congo.
Nous sommes convaincus que les membres du Parlement n’ont pas été éclairés sur l’usage des fonds
attribués à cette organisation et il est du devoir civique et moral de tous de faire toute la lumière sur
les flux financiers et les conditions d’utilisation de l’argent public. Il y va aussi des conditions de
collaboration de membres du Parlement voire d’autorités des institutions de l’Union avec les zélateurs
de la haine ethnique dont les Tutsi du Kivu souffrent quotidiennement.
Nous sollicitons dès lors votre haute institution pour que cette question soit mise à l’agenda de son
travail d’enquête.
Nos organisations se tiennent à votre disposition pour répondre à toutes vos questions et vous fournir
tous éclairages sur ce point.
Dans l’intervalle, veuillez croire, Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, les membres du
Parlement, à l’assurance de notre haute considération et de notre plus profond respect.

Ludovic KALENGAYI
Coordonnateur du Programme Multisectoriel
de Vulgarisation et Sensibilisation (PMVS)

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