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Son nom, son travail d’investigation, sa personnalité même, resteront attachés à son livre consacré au passé de François Mitterrand, en 1994, alors que ce dernier allait arriver à la fin de son second mandat, Une jeunesse française, 1934-1947. Le journaliste Pierre Péan, âgé de 81 ans, est décédé jeudi dernier à l’hôpital d’Argenteuil, dans le Val-d’Oise. Dans Une jeunesse française, il avait amené le président à évoquer son appartenance à la droite pétainiste qui allait engager la France dans la collaboration avec l’occupant, avant de revendiquer son appartenance à la Résistance sous le nom de Morand. Cette part trouble de son parcours restera, marquée par la persistance de ses liens amicaux avec René Bousquet, l’un des principaux responsables de la rafle du Vél’d’Hiv.
Une grande figure d’un journalisme ambitieux et exigeant
Après des études de droit et de sciences politiques, un travail de coopérant en Afrique, Pierre Péan avait débuté à l’AFP puis à l’Express, avant sa première grande enquête qui fait scandale, publiée en 1979 dans le Canard enchaîné, sur l’affaire dite des diamants que l’empereur de Centrafrique aurait offerts à Valéry Giscard d’Estaing, suscitant de vives controverses sur la nature du cadeau en question. En 1983, dans Affaires africaines, il s’attache aux relations entre la France et le Gabon, son premier succès en librairie, et évoquera de nouveau les affaires africaines en 2005 avec Noires fureurs, blancs menteurs,?sur le génocide rwandais, où certains de ses propos relèvent de la négation du caractère génocidaire des massacres contre les Tutsis.
Au total Pierre Péan a publié une vingtaine d’ouvrages, s’intéressant également aux médias, comme TF1, un pouvoir, écrit en collaboration avec Christophe Nick, ou la Face cachée du Monde, avec Philippe Cohen. On lui doit également des enquêtes sur l’affaire dite des avions renifleurs, la corruption dans les pays du Sud (l’Argent noir), les affaires étouffées (Manipulations africaines), sur des personnages troubles comme le Suisse François Genoud, exécuteur testamentaire d’Hitler et financier de certains groupes terroristes, ou encore sur les conditions de l’arrestation de Jean Moulin (la Diabolique de Caluire). Parfois contesté pour son empathie avec certains des personnages qu’il a pu évoquer (Jean-Marie Le Pen), il n’en reste pas moins une grande figure d’un journalisme ambitieux et exigeant, préférant le temps long aux coups médiatiques. Il était revenu ces dernières années sur son parcours dans son livre Dernières volontés, derniers combats, dernières souffrances.