Fiche du document numéro 24665

Num
24665
Date
Mercredi 18 mai 1994
Amj
Auteur
Fichier
Taille
1084623
Pages
3
Titre
Réponse du ministre des Affaires étrangères à une question orale posée par Monsieur le Député Charles Millon [Sur la situation au Rwanda]
Tres
Alain Juppé : « Les troupes gouvernementales rwandaises se sont livrées à une élimination systématique de la population tutsie »
Nom cité
Mot-clé
Résumé
Faced with the offensive of the Rwandan Patriotic Front, the Rwandan government troops engaged in a systematic elimination of the Tutsi population, which then caused the generalization of massacres. France has firmly denounced this situation and called for an international investigation to be carried out to establish the facts and punish the culprits. She also wanted an international force to intervene in Rwanda and ensure the delivery of humanitarian aid. Finally, it supports efforts to encourage the belligerents to cease hostilities and to reconnect with the Arusha process.
Source
Commentaire
Before the National Assembly, Alain Juppé, Minister of Foreign Affairs, clearly condemns the genocide by designating the victims, the Tutsi, and the perpetrators, the Rwandan government troops. However, he insinuates that this "systematic elimination of the Tutsi population" was undertaken "in the face of the offensive of the Rwandan Patriotic Front". This is totally wrong. The systematic massacres of Tutsi began before the RPF engaged in combat. This is attested to by the Amaryllis operation order of April 8, 1994 and by Ambassador Marlaud's note of April 25, 1994 which recognizes that the exactions "gave a basis for the intervention of the RPF". Juppé says that France has requested an investigation from the United Nations Commission on Human Rights, "to establish the facts and punish the culprits". The problem is that when this report is published on June 28, 1994, France will not take it into account and its soldiers, provided with a UN mandate, will not arrest the culprits. Juppé asks that "an international force come to intervene in Rwanda". While the RPF is fighting the assassins, it would like to send peacekeepers to come between the RPF and the Rwandan government army, which amounts to protecting the assassins. The representative of the United States on the Security Council refused this mission of interposition to the Blue Helmets. These, according to Juppe, would deliver humanitarian aid. In short, instead of giving them the mission of fighting the assassins, he asked them to protect them against the RPF and to feed them, since at that date there were hardly any Tutsis left alive and they were in hiding. He also proposes to negotiate a ceasefire and to "reconnect with the Arusha process". He therefore considers it normal for the RPF to stop its fight against the assassins and for the organizers of the genocide to gain access to the negotiating table. Its ambassador to Rwanda, Jean-Michel Marlaud, trampled on the Arusha Accords by sponsoring a government that did not respect them, while witnessing the assassination by soldiers and militias of political leaders favorable to these peace accords. Alain Juppé will congratulate himself on having been the first to recognize the genocide. But the Amaryllis operation order of April 8, 1994 implicitly admitted the genocide of the Tutsi. Moreover, this recognition of the genocide of the Tutsi by the Rwandan government army is far from clear. Juppé's priority is to stop the RPF and not the genocide.
Type
Question d'actualité au Parlement
Langue
FR
Citation
(Paris, 18 mai 1994)

Assistance au Rwanda

Destruction systématique d'un groupe ethnique, telle est la définition
du génocide. C'est la raison pour laquelle, tout comme vous, Monsieur
Millon, j'ai moi-même utilisé ce terme il y a quelques jours, puisque
c'est bien de cela qu'il s'agit au Rwanda. Face à l'offensive du front
patriotique rwandais, les troupes gouvernementales rwandaises se sont
livrées à une élimination systématique de la population tutsie, ce qui
a provoqué ensuite la généralisation des massacres.

La France a dénoncé, avec la plus grande fermeté, cette
situation. Mais nous ne nous sommes pas contentés d'une dénonciation,
nous avons également demandé qu'une enquête internationale, conduite
par la commission des droits de l'homme des Nations unies, soit
diligentée dans les plus brefs délais, pour établir les faits et punir
les coupables.

Nous avons souhaité aussi qu'une force internationale vienne
s'interposer au Rwanda et y assurer l'acheminement de l'aide
humanitaire. Comme vous l'avez dit, Monsieur le président, tel n'a pas
été le point de vue de toutes les grandes puissances, et nous avons eu
beaucoup de difficultés à faire voter la résolution du Conseil de
sécurité qui a finalement été adoptée, il y a quarante-huit
heures. Elle prévoit l'envoi de 5.500 hommes au Rwanda pour favoriser
l'acheminement de l'aide humanitaire et protéger ceux qui sont
présents sur le terrain, au titre des organisations non
gouvernementales. Il a fallu beaucoup d'énergie de la part de la
diplomatie française pour faire adopter cette décision.

Par ailleurs, nous soutenons les efforts des Etats de la région -- la
Tanzanie, la Zaïre et l'Ouganda -- pour obtenir un cessez-le-feu. Nous
préconisons la tenue d'un sommet des chefs d'Etat de la région afin
qu'ils pèsent de tout leur poids sur les belligérants -- FPR d'un côté,
Forces rwandaises de l'autre -- dans le but de les inciter à cesser les
hostilités et à renouer avec le processus d'Arusha. Faut-il rappeler
que ce processus avait été mis en place en 1993 grâce à l'action de la
France et avait permis à l'époque la cessation des hostilités, avant
qu'elles ne reprennent après l'attentat commis contre l'avion
transportant les Présidents rwandais et burundais.

Enfin je crois que l'on peut dire sans immodestie que nous avons été
les plus présents sur le plan humanitaire : trois ponts aériens ont
été mis en place, 300 tonnes d'équivalent-blé sont également prévues
pour les populations du Rwanda. Nous avons, en quelques semaines,
affecté un crédit de 20 millions de francs à l'action
humanitaire. Aucune puissance n'a agi aussi vite que nous, et dans de
telles proportions.

Hier, le ministre de la Coopération, le ministre de la Santé et
moi-même avons proposé au Premier ministre, qui les a évidemment
acceptées, certaines mesures complémentaires.

Il a été décidé d'envoyer une antenne chirurgicale du SAMU mondial au
Burundi afin qu'elle se mette à la disposition des équipes qui sont
sur le terrain.

Il a également été décidé d'intervenir dans les camps de réfugiés de
Tanzanie où des problèmes d'assainissement se posent avec une gravité
exceptionnelle. L'urgence est extrême. Au reste, le ministre chargé
de la Santé partira demain ou après-demain au Burundi et en Tanzanie
pour accompagner les équipes que nous avons envoyées là-bas.

Enfin, le ministère de la Coopération vient d'augmenter encore son
aide en faveur des organisations non gouvernementales qui travaillent
au Rwanda, en particulier du comité international de la Croix-Rouge.

Voilà tout ce qui a été entrepris par la France. Je crois que l'on
peut dire que, de toutes les puissances, de tous les membres
permanents du Conseil de sécurité, la France a été le pays qui a été
le plus aux avant-postes. Dans le drame qui nous bouleverse tous, on
peut parler à bon droit, comme vous l'avez fait, Monsieur le Président
Millon, d'une exception française./.

copyright Ministère des Affaires étrangères
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