Fiche du document numéro 2307

Num
2307
Date
Samedi 16 avril 1994
Amj
Fichier
Taille
113175
Pages
2
Urlorg
Titre
La guerre continue au Rwanda
Sous titre
Malgré la poursuite des combats, l'ONU tente une médiation entre les deux belligérants. Révélations sur le rôle de la France.
Nom cité
Cote
no 15449
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
LES combats ont repris vendredi à Kigali, où tout espoir de trêve
rapide s'est de nouveau évanoui avec l'annulation, jeudi, d'une
rencontre entre les deux belligérants. Par le biais de Radio-Rwanda,
le gouvernement, réfugié en province, a appelé hier la population « à
se coaliser contre le Front patriotique » (FPR). Dans le même temps,
l'exode se poursuit, le Haut-Commissariat de l'ONU indiquant que
20.000 personnes ont déjà fui le pays depuis le début des
affrontements.

Le général Romeo Dallaire, commandant de la Mission des Nations unies
(MINUAR), poursuit sa médiation entre les deux camps. Selon le général
canadien, « la non-reconnaissance du gouvernement par le FPR reste un
problème majeur ». Même si les rebelles gagnent du terrain de jour en
jour, les observateurs notent que les troupes de l'armée leur opposent
une résistance inattendue. « Il y a des mouvement de troupes, a ajouté
le général Dallaire. Dans toute la ville, il y a des poches
d'activité. Il est difficile de savoir combien de rebelles se trouvent
à Kigali : peut-être 1.500, 2.000 ou 3.000. »

La tâche des quelque 2.500 casques bleus ne s'annonce pas facile après
la décision belge de rapatrier son contingent. Le général Dallaire a
estimé que la récente attaque contre l'aéroport - où sont basées des
troupes de l'ONU - marquait « un changement dans l'échelle » des
événements. A New York, le Conseil de sécurité de l'ONU hésite
toujours quant à la décision à prendre sur l'avenir de la MINUAR. A
savoir : rester en place, se replier dans un pays voisin ou partir.

Seule éclaircie sur le front, ce vendredi, les Nations unies ont
annoncé être parvenues à un accord avec le FPR afin de prolonger de
vingt-quatre heures les opérations d'évacuation des derniers étrangers
bloqués à Kigali. Afin d'éviter toute provocation, la MINUAR a décidé
d'informer les deux camps de l'itinéraire de l'évacuation. Mais, signe
de la tension actuelle, le Comité international de la Croix-Rouge
(CICR) a décidé la suspension de ces activités après le massacre de
civils qui étaient placés sous sa protection. Des responsables du CICR
ont précisé que des hommes armés avaient arrêté un véhicule de
l'organisation à un barrage et avaient fait sortir six civils blessés
avant de les abattre de sang-froid. A Genève, on précise que trente
des employés rwandais du CICR ont été abattus depuis le début des
affrontements. De son côté, l'UNICEF a indiqué que sept de ses
employés locaux avaient, eux aussi, été tués.

« L'horrible violence qui s'est emparée de la minuscule République
rwandaise n'est pas le fruit du hasard. Pour les hommes de l'Akazu, le
clan dirigeant du défunt président Habyarimana, le seul moyen de
préserver leur pouvoir sans partage vieux de vingt et un ans était de
tuer leurs ennemis le plus vite possible. Et, jusqu'à mercredi,
lorsque les rebelles ont investi Kigali, cette clique brutale recevait
l'aide venant d'un endroit inattendu : la France. » Ces révélations
sont parues sous le titre « De l'argent français derrière le
surarmement du Rwanda », vendredi, dans l'« International Herald
Tribune ».

L'auteur, membre de l'organisation Human Rights Watch, Frank Smyth,
précise qu'en 1975 Paris signait un accord de coopération militaire
avec le régime de Kigali. « Lorsque, en 1990 et encore l'an dernier,
les rebelles se trouvaient aux abords de la capitale, ce fut la France
qui accourut avec ses troupes et son artillerie », ajoute-t-il. En
1992, un contrat d'achat d'armes, de plus de 30 millions de francs,
effectué auprès de l'Egypte, a été ainsi garanti par le Crédit
lyonnais. « L'horreur de la tuerie au Rwanda devrait servir d'horrible
leçon sur les dangers de la mainmise par une puissance impériale »,
conclut l'auteur.
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fgtquery v.1.9, 9 février 2024