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Que peuvent bien peser trois morts de plus au regard des 800 000
victimes du dernier génocide du XXe siècle ? Pour les proches de ces
trois Français assassinés à Kigali en avril 1994, quelques jours après
l'attentat contre l'avion du président rwandais Juvénal Habyarimana -
deux gendarmes et la femme de l'un d'eux -, la question ne se pose
évidemment pas de cette sinistre manière. Du point de vue de la vérité
historique, il y a également fort à parier que ces trois morts, de
nationalité française, occupent une place très singulière. Et que,
près de vingt ans plus tard, ils pointent le doigt, de façon inédite,
vers notre capitale. C'est en tout cas ce que semble penser le juge
Marc Trévidic, qui a su relancer une véritable enquête, et auquel un
médecin militaire a confié que son identité avait été usurpée sur le
certificat de décès d'au moins une des trois victimes. Ce faux
grossier et la pression des autorités françaises sur des familles
sommées à l'époque de renoncer à toute demande d'explication oblige
désormais à s'interroger autrement sur les motifs et les circonstances
de ces assassinats. Ces deux gendarmes, chargés des transmissions
radio entre l'ambassade de France et l'armée rwandaise, ont-ils écouté
des conversations qu'ils n'auraient jamais dû entendre et qui
concernaient l'attentat déclencheur du génocide ? Après tant d'années
perdues par le juge Bruguière, la justice est peut-être enfin en
mesure de répondre un jour prochain à ces questions. Et, du même coup,
de préciser l'implication et donc la responsabilité de notre pays dans
la tragédie rwandaise.