Titre
Interview du ministre des Affaires étrangères, M. Alain Juppé, à la radio Africa n° 1
Tres
Alain Juppé : « le rôle de la France n'est pas de rétablir l'ordre par des soldats sur l'ensemble du continent africain »
Cote
Pol. Etr. mars-avril 1994 pp. 149-150
Résumé
Alain Juppé, Minister of Foreign Affairs, believes that France's role is not to restore order through its soldiers throughout the African continent. We cannot replace the responsibility of African actors themselves.
Commentaire
At a time when the Minister of Foreign Affairs Alain Juppé is justifying his refusal to send soldiers to "re-establish order" in Rwanda, French soldiers are standing by in Kigali, weapons drawn, watching innocent people being massacred. While he calls for a "return to the logic of the Arusha Accords", a French military officer refuse to protect Boniface Ngulinzira, the Rwandan government's chief negotiator of these accords. The French abandoned him to the killers, who executed him on April 11, 1994. On the same day, the French ambassador sent to Paris a request for military support to the organizers of the massacres.
Citation
Q : Dernière question, la situation qui prévaut à l'heure actuelle au Rwanda et au Burundi inquiète énormément les Africains. Beaucoup d’observateurs avertis pensent que les dernières mesures prises par la France constituent un désengagement de la France dans cette zone. Ne craignez-vous pas justement que ces mesures laissent le champ libre aux adversaires de la démocratie ?
R : Il faut bien s’entendre. La situation au Rwanda est une tragédie qui nous touche profondément. La France a fait des efforts considérables depuis des mois et des mois pour faciliter le retour de la stabilité dans le cadre des accords d’Arusha. Nous avons pris tout récemment les mesures destinées à protéger nos ressortissants. Mais, là encore, excusez-moi d’une certaine franchise : le rôle de la France n’est pas de rétablir l’ordre par ses soldats sur l’ensemble du continent africain. Nous ne pouvons pas nous substituer à la responsabilité des acteurs africains eux-mêmes. Nous les appelons aujourd’hui à se ressaisir pour revenir à la logique des accords d’Arusha et retrouver la voie d’une concorde nationale.
Cela peut paraître paradoxal alors que les combats font rage un peu partout, mais c’est cela notre rôle, plutôt que de nous transformer à nouveau en une puissance interventionniste qui enverrait ses soldats partout. Ce n’est pas le rôle de la France.