Fiche du document numéro 1432

Num
1432
Date
Mardi 3 mai 1994
Amj
Auteur
Fichier
Taille
177151
Pages
2
Sur titre
Rwanda
Titre
Les réfugiés continuent d'affluer en masse vers la Tanzanie
Sous titre
Fuyant les massacres qui se produisent dans leur pays depuis trois semaines, les Rwandais continuent de se diriger en masse vers la Tanzanie. Les organisations humanitaires estiment qu'entre deux cent cinquante mille et un demi-million de réfugiés avaient déjà franchi la frontière dimanche 1er mai.
Source
Type
Article de journal
Langue
FR
Citation
Des centaines de milliers de personnes ont fui le sud-est du Rwanda ces
derniers jours devant la progression des combattants du Front
patriotique rwandais (FPR) pour se réfugier en Tanzanie, déclenchant ce
que le Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR) qualifie
de « plus vaste et plus rapide exode jamais constaté ». Selon les
estimations des milieux humanitaires, leur nombre varie entre 250 000 et
un demi-million, mais d'autres Rwandais continuent d'arriver dans le
district tanzanien de Ngara.

Les rebelles du FPR contrôlent, depuis samedi 30 avril, le
poste-frontière de Rusumo et le pont qui enjambe la rivière Akagera.
Selon un responsable du Comité international de la Croix-Rouge, ils ont
empêché, dimanche, le passage d'une équipe du CICR qui s'apprêtait à
distribuer des vivres aux déplacés dans le sud-est du Rwanda. « Ils nous
ont demandé d'attendre jusqu'à lundi pour leur donner le temps de
vérifier que toutes les conditions de sécurité sont remplies
 », a-t-il
ajouté.

Des négociations seraient en cours actuellement entre le FPR et les
responsables d'organisations humanitaires pour rouvrir la frontière et
permettre aux réfugiés de se déplacer librement. Le FPR pour sa part
dément avoir bloqué la route d'accès à la Tanzanie et demande aux civils
rwandais de rentrer de leur plein gré au pays.

Cet exode massif fait mauvais effet pour le mouvement rebelle, créé par
des réfugiés tutsis chassés du Rwanda par les massacres de 1959 et de
1973 et qui affirme, depuis le début de sa lutte, que cette guerre
civile n'est pas un conflit ethnique. « Il est erroné d'y voir des Hutus
tuant des Tutsis, ou l'inverse,
  expliquait encore récemment Théogène
Rudasingwa, secrétaire général du FPR.  Il s'agit de forces
gouvernementales s'accrochant au pouvoir par tous les moyens, et
attisant la haine ethnique.
 »

Un pacte avec le diable



Même si dans la bande frontalière avec l'Ouganda (contrôlée par le FPR
depuis près de quatre ans) et dans la zone démilitarisée qu'il a envahi
dès la reprise de la guerre civile le 7 avril dernier, on constate que
la population (majoritairement hutue) n'a pas fui en masse, les paysans
hutus, qui forment le gros des réfugiés en Tanzanie, semblent craindre
d'éventuelles représailles du FPR, perçu comme un mouvement tutsi
assoiffé de revanche.

Il est vrai que les événements de ces derniers mois au Burundi voisin ne
peuvent les rassurer. Malgré les élections démocratiques de l'an
dernier, l'armée (dominée par les Tutsis) contrôle à nouveau la vie
politique, à la suite de la tentative de coup d'Etat d'octobre 1993, qui
a décapité le parti FRODEBU, porté au pouvoir, cinq mois plus tôt, par
la majorité hutue du pays.

Au Rwanda, le FPR compte depuis le début de sa lutte sur la rivalité
entre Hutus du Nord, qui monopolisent le pouvoir depuis 1973, et Hutus
du Sud, progressivement écartés depuis cette date. Mais si dans la
population certains sudistes se disent prêts à « s'allier avec le diable »" pour chasser les nordistes, il ne semble pas que le clivage sur des
bases régionales au sein des forces armées souhaité par le FPR qui
appelle les soldats à se désolidariser de la garde présidentielle soit
avéré.

L'unité hutue contre une menace extérieure semble avoir prévalu, ce qui
explique les déboires du FPR, qui s'attendait à prendre Kigali
facilement. Aujourd'hui, le FPR contrôle la voie tanzanienne
d'approvisionnement du pays. Il contrôle aussi la frontière nord et la
frontière sud est fermée par l'armée burundaise, il ne reste que le
Zaïre pour permettre au forces gouvernementale de poursuivre le combat.
Selon des responsables d'organisations humanitaires, le FPR a fermé
momentanément le poste-frontière de Rusumo pour montrer aux milliers de
civils qui tentent encore de fuir leur pays qu'ils peuvent rester en
sécurité au Rwanda. D'autres estiment que les maquisards ont l'intention
de nettoyer la région de ses « éléments hostiles » : les soldats
gouvernementaux et les miliciens hutus.
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fgtquery v.1.9, 9 février 2024