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Les gouvernants français ont des réactions d'une rapidité surprenante. Deux mois après le début des tueries au Rwanda, MM. Chirac, Pasqua, Juppé versent des larmes sur les gosses massacrés. Indignation et colère à retardement s'étalent dans certains médias préalablement informés de la « séquence émotion » décidée avant le voyage au siège de l'ONU du président du RPR par ailleurs candidat naturel à la présidentielle. Il aura fallu huit semaines de honte cachée, de contorsions diplomatiques pour que M. Juppé trouve une solution : les paras français, annoncent-ils, sont prêts à sauter sur Kigali pour sauver les enfants rwandais. Pour ne pas faire moins, le président du Parti républicain, Gérard Longuet, ajoute « qu'il faut y aller et y rester ».
Deux mois de tergiversations pour accoucher d'une nouvelle aventure ? La France pourtant a assez donné -- en mal -- au Rwanda. Soutien à une dictature, à son armée, aux tueurs d'hier et d'aujourd'hui et voici que, devant l'émotion de l'opinion publique, on nous annonce une « intervention humanitaire ». De nombreux Français applaudiront cette prétendue « noble » initiative. Sauront-ils que des officiers de l'armée rwandaise en stage en France ont été expédiés, il y a dix jours, via le Zaïre et à bord d'un appareil affrété par le ministère de la Coopération, vers Gitarama où siégeait le gang gouvernemental rwandais ? Les braves gens ne doivent pas savoir que les massacreurs d'enfants ont été financés et encadrés par des officiers français. Et surtout, ils ne doivent surtout pas apprendre que depuis le début des tueries, la France souterraine a multiplié les livraisons d'armes aux assassins et continué de former des militaires rwandais.
La France officielle aurait tout intérêt a reconnaître ses responsabilités et à modifier radicalement son attitude. Paris devrait appuyer toute initiative humanitaire de l'ONU et de l'OUA visant à la protection des populations en évitant soigneusement d'envoyer des soldats français. Ces derniers risqueraient sinon de servir de cible à tous les Rwandais qui ont eu à souffrir des tueries.
José Fort
