Citation
De notre envoyé spécial au Rwanda.
REFUGIE depuis 1973 au Zaïre, Pascal Munyampirwa avait acquis la nationalité de ce pays. A partir d'octobre 1990, pour le compte du HCR (Haut-Commissariat aux réfugiés de l'ONU) et de l'Eglise du Christ au Zaïre, il anime un programme d'assistance à plusieurs centaines de réfugiés (dont de très nombreux Soudanais) établis dans le nord-est du pays, non loin de la frontière avec le Rwanda.
« Le 25 mai 1991, raconte Pascal, deux Rwandais se présentent à mon domicile. Un caporal, Sanvura Safari, tireur d'élite de la 4e région militaire, et un civil nommé Dieudonné Muhima. Ils me disent avoir été contactés par un certain Fidèle Muhirwa, originaire de Ruhengeri, afin d'organiser mon assassinat. Montant du « contrat »: 70 millions de zaïres » (environ 400 francs). « Ils m'ont dit être prêts à confirmer leurs dires devant la sûreté zaïroise. Je crois que ce qui m'a sauvé, c'est que le premier s'était pris d'affection pour mon fils aîné, qui avait alors treize ans. Lorsque j'avais le dos tourné, mon fils pillait nos réserves de bière pour ravitailler le caporal. Il n'y avait pas que ça: évidemment, les deux m'ont demandé de l'argent.»
« Un piège a été monté par la sûreté zaïroise pour prendre le commando en flagrant délit. Je m'y suis prêté, ce qui m'a amené à rencontrer maintes fois mon tueur, Muhirwa, au cours de réunions organisées par Safari qui nous prévient que l'attentat devait avoir lieu le 6 juin. Muhirwa et ses complices devaient se rendre à mon domicile afin de m'inviter à une « promenade ». Le commandant Bizimana, des forces armées rwandaises, leur avait fait passer une mitraillette UZI, 28 cartouches et une grenade. Un bidon d'essence avait également été prévu, afin de simuler un accident en faisant brûler mon corps dans ma voiture.»
« Le commando arrive chez moi et se fait cueillir avec son arsenal par la sûreté zaïroise. Les terroristes passent des aveux immédiats, affirmant même que les 70 millions de zaïres avaient été fournis par les services de la présidence rwandaise.» Les terroristes ont été emprisonnés puis transférés à Kinshasa, le 9 juin 1991. Le temps passant, le général Habyarimana fait très officiellement demander la libération de ses tueurs maladroits. Satisfaction lui sera donnée et les membres du commando regagneront tranquillement le Rwanda.
Quant à Pascal, il sera relevé de ses responsabilités au HCR. Le gouverneur zaïrois du Nord-Kivu l'a félicité par écrit des « services inestimables » qu'il avait rendus à ce poste.
J. C.