Fiche du document numéro 12411

Num
12411
Date
Lundi 22 octobre 1990
Amj
Hms
09:01:00
Auteur
Fichier
Taille
86628
Pages
2
Urlorg
Sur titre
Rwanda réfugiés
Titre
Expulsés de leur patrie, les réfugiés sont acculés à la guerilla
Source
AFP
Type
Dépêche d'agence
Langue
FR
Citation
CAMP DE RÉFUGIÉS D'ORUCHINGA (Ouganda) 22 oct - Quelque deux millions
de Rwandais chassés de leur patrie et plongés dans le cauchemar de la
vie de réfugié sont acculés à la guerilla avec la colère du désespoir.
Le camp de réfugiés d'Oruchinga - Oruchinga Refugee Camp - étale ses
huttes de boue recouvertes de feuilles de bananiers dans une vallée
aride ou près de dix mille Rwandais mènent une existence précaire de
paysans.

Il n'est qu'à 20 kilomètres du poste-frontière de Kagitumba par lequel
des réfugiés basés en Ouganda ont envahi le Rwanda il y a trois
semaines.

Etre réfugié, c'est pire que la mort , déclare Andrew Buzene, 60
ans. Il a fui le Rwanda pour échapper aux massacres tribaux de 1959
lorsque la majorité Hutu a enlevé le pouvoir à la minorité Tutsi: l'humiliation de perdre le contrôle de sa propre vie est bien pire que
les difficultes matérielles
, ajoute-t-il.

Tout le monde ici veut rentrer au Rwanda. Nous avons attendu toutes
ces années dans l'espoir de rentrer chez nous. Vous ne pouvez rien
prévoir ni pour vos vieux jours ni pour vos enfants. Vous ne pouvez pas
construire une maison car vous ne savez pas quand vous serez déplacé.
Vous ne pouvez même pas contracter un prêt.
" a-t-il souligné.
Plusieurs des réfugiés d'Oruchinga, privés d'eau courante et d'electricité, sont trop pauvres pour pouvoir s'offrir une lampe au
kérosène.

Une épidémie de méningite a fait 320 morts au début de l'année, déclare
Josephine Rwebasira, une sage-femme du dispensaire dont le frère se bat
de l'autre côté de la frontière.

Une autre vague de réfugiés, en majorité des Tutsis, est arrivée en
Ouganda en 1973 lors de la prise du pouvoir par le président Juvenal
Habyarimana, à la suite d'un coup d'Etat sans effusion de sang.
Mais en 1982 le gouvernement de Milton Obote chasse les réfugiés
rwandais d'Ouganda. Ils rentrent chez eux mais pour être à nouveau
chassés par les autorités rwandaises. Des milliers d'entre eux vont
alors vagabonder pendant des mois, le long de la frontière entre l'Ouganda et le Rwanda.

Plusieurs, affaiblis par la faim et l'absence d'abri, mourront de
maladie tandis que d'autres se suicideront.

C'est à cette époque que des réfugiés rwandais s'enrôleront dans l'Armée de Résistance Nationale, une organisation de guerilla dirigée par
Yoweri Museveni qui entame en 1986 sa lutte pour le pouvoir après avoir
passé des années dans le maquis.

Pas de haines tribales



La route poussiéreuse et sale qui traverse la vallée d'Oruchinga est
bordée de cactus et de fourmillères presqu'aussi grandes que les huttes
de boue circulaires des réfugiés qui n'ont qu'une pièce.

Quelques réfugiés qui ont grandi dans les camps ont pu aller à l'université avec des bourses des Nations-Unies. Parmi eux, le major
Peter Bayingana du RPF, un médecin, le lieutenant Alphonce Furuma, un
économiste dont les parents vivent encore dans le camp de Nakivale.
George Kagarma, un vétérinaire de 38 ans élevé à Oruchinga a fait ses
études à l'université de Makerere à Kampala, avant de retourner au camp
comme fonctionnaire, chargé de la coordination des services
vétérinaires. Il réfute les allégations du gouvernement rwandais selon
lesquelles de vieilles haines tribales seraient à l'origine du problème
des réfugiés. La plupart d'entre nous sont des Tutsis mais il y a
aussi des Hutus parmi nous. Nous nous sommes rendus compte que ces
différences étaient imaginaires. Nous parlons la même langue, avons les
mêmes coutumes et les mariages mixtes étaient courants par le passé
,
souligne-t-il.

Les chefs du RPF (front patriotique rwandais) affirment vouloir
enterrer à tout jamais la discrimination Hutu-Tutsi. Les cartes d'identité rwandaises qui portent la mention de la tribu à laquelle on
appartient rappellent les procédés de ségrégation raciale en Afrique du
Sud
, explique l'un d'entre eux.

Un homme sage et grisonnant d'Oruchinga, lui, fait porter aux Belges la
responsabilité des violences récentes: Les Belges ont encouragé et
exagéré les différences tribales. C'était leur politique de diviser
pour régner
.

dc/dv.
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fgtquery v.1.9, 9 février 2024