Attention : ce document exprime l'idéologie des auteurs du génocide contre les Tutsi ou se montre tolérant à son égard.
Date
Mercredi 22 juin 1994
 
Titre
Conseil des ministres (extraits Rwanda) [Déclaration de François Mitterrand]
 
Sous titre
Déclaration de François Mitterrand
 
Tres
François Mitterrand : « Si ce pays devait passer sous la domination tutsie, ethnie très minoritaire, qui trouve sa base en Ouganda […] il est certain que le processus de démocratisation serait interrompu »
 
Résumé
During this Council of Ministers, the President of the Republic recalls in particular that Rwanda, like Burundi, is mainly populated by Hutu. And to continue: "The majority of the inhabitants therefore naturally supported the government of President Habyarimana. If this country were to come under Tutsi domination, a very minority ethnic group which finds its base in Uganda where some are in favor of the creation of a 'Tutsiland' encompassing not only the latter country but also Rwanda and Burundi, it is certain that the democratization process would be interrupted".
 
Commentaire
During this Council of Ministers, the day before the entry of French troops into Rwanda, Alain Juppé, Minister of Foreign Affairs, did not utter the word "genocide" (page 2). He remains in the same state of mind as in his column in Liberation of June 16, 1994 stating that: "massacres were perpetrated both on the Hutu side and on the Tutsi side". He forgot his recognition of the genocide of the Tutsi made before the National Assembly on May 18, 1994. Mrs. Simone Veil, Minister of Health, is worried about a risk of confrontation between the RPF and the French forces. François Léotard, Minister of Defence, speaks of outward and return operations and specifies that there will be no lasting occupation of Rwanda. François Mitterrand, President of the Republic, recalls that Rwanda "is populated mainly by Hutus" and he pronounces these words heavy with meaning: "If this country were to come under Tutsi domination, ethnic very minority, which finds its base in Uganda where some are favorable to the creation of a ‘Tutsiland’ encompassing not only the latter country but also Rwanda and Burundi, it is certain that the process of democratization would be interrupted". Does the preservation of this democratic process imply the extermination of the Tutsi? Will the French military operation that will be launched therefore aim to prevent this "ethnic group" Tutsi to hunt down his executioners? We can believe it but he does not want losses in the ranks of the French army: "We must not make our soldiers take too many risks. Our goal is only to save lives". Another astounding statement, he suggests that the assassination of President Habyarimana "may have been ordered by Hutu extremists", while his advisers Christian Quesnot and Bruno Delaye claimed that the attack was perpetrated by the RPF.
 
Type
Procès-verbal de réunion
 
Citation
Communication du ministre des affaires étrangères sur la situation
 internationale.
 
 
 
 M. JUPPE évoque tout d'abord la question du Rwanda.
 
 Après l'assassinat du président HABYARIMANA, la France s'est
 bornée à rapatrier du Rwanda ses propres ressortissants ainsi que d'autres
 Européens. À l'égard des belligérants, elle a encouragé les négociations dans
 le cadre des accords d'Arusha et a mené une action humanitaire. Mais
 l'Organisation de l'unité africaine a été incapable d'obtenir et de faire respecter
 un cessez-le-feu. L'ONU, pour sa part, a été incapable de mettre en place la
 MINUAR. Des massacres ont été perpétrés tant du côté hutu que du côté
 tutsi, la Communauté internationale s'est révélée dans l'incapacité de faire
 cesser ces massacres. C'est ce qui explique le projet d'intervention de la
 France. Il s’agit d'une opération patronnée par l'ONU. Un projet de résolution
 fondé sur le chapitre 7 de la Charte est en discussion en ce moment même au
 Conseil de sécurité. Il y a une majorité pour le soutenir, dont font notamment
 partie les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la Russie. Deux Etats seulement
 y sont opposés : la Nouvelle-Zélande et le Nigéria ; le Pakistan et la Chine sont
 hésitants. Il s'agit également une opération limitée dans le temps : le projet de
 résolution fixe à la mission une durée maximum ; mais la France conserve sa
 liberté de se retirer à tout moment avant le terme de cette mission. C'est
 aussi une opération limitée dans son objectif : il s'agit de protéger les
 individus: nos forces n'auront aucune mission d'interposition. Enfin c'est une
 opération qui doit être menée en coopération avec d'autres Etats européens
 et africains.
 
 La France est soutenue avec détermination par le secrétaire général
 de l'ONU, tant pour des raisons morales qu'en raison de l'impossibilité dans
 laquelle se trouve l'ONU de mettre sur pied, pour le moment, la MINUAR. La
 France est également soutenue par les Etats-Unis qui ont promis une aide
 logistique. Le conseil de l’Europe occidentale a apporté son soutien unanime
 à l'opération. Sept Etats sur neuf ont manifesté leur intention de contribuer à
 notre initiative. La position de l'Italie doit être cependant clarifiée car son
 intention de participer a été démentie ce matin même par le ministre des
 affaires étrangères de ce pays. Plusieurs Etats africains soutiennent l'initiative
 française. Le Sénégal offre, pour l'instant, 250 hommes. La Guinée-Bissau et
 le Ghana donneront des contingents symboliques. La position de l'OUA est
 difficile à cerner. Son secrétaire général conteste, en tout cas, l'interprétation
 donnée à sa position par une dépêche de l'agence France presse déclarant
 l'hostilité de l'OUA à cette opération. En tout cas, la réserve de l'OUA peut
 s'expliquer par sa rancœur à constater sa propre incapacité à décider quoi que
 ce soit.
 
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 Les organisations non gouvernementales sont partagées. Le FPR est
 pour sa part radicalement hostile à notre initiative en raison du soutien apporté
 par la France au gouvernement du président HABYARIMANA et aux forces
 gouvernementales et en raison de sa volonté de parachever sa victoire au
 Rwanda. L'hostilité du FPR à notre opération doit être levée. Nous avons
 envoyé deux diplomates à Kampala pour y rencontrer des représentants du
 FPR.
 
 Le ministre des affaires étrangères pour sa part s'apprête à recevoir
 un membre influent de ce mouvement politique. De toute façon un FPR
 vainqueur au Rwanda aura bien besoin de la France.
 
 Dans l'ex-Yougoslavie, le calme règne sur le terrain sauf dans le nord-
 est de la Bosnie Herzégovine. Sur le plan diplomatique le groupe de contact
 a bien avancé sur le tracé de la carte de la Bosnie et sur la question des
 sanctions en cas de refus des propositions par les deux parties antagonistes.
 Deux nouvelles réunions sont prévues, l’une début juillet, la seconde après le
 G7.
 
 
 
 Le ministre des affaires étrangères rend compte de son voyage en
 Afrique. Il a rendu visite à la Côte d'Ivoire et au Sénégal. En Côte d'Ivoire la
 situation économique se stabilise. La dévaluation du franc CFA a relancé
 l'économie, relance également favorisée par le cours élevé du café et du cacao
 sur le marché international. Nos relations bilatérales sont bonnes.
 
 Avec le Sénégal nos relations bilatérales sont excellentes. La
 situation politique intérieure est plus agitée qu'en Côte d'Ivoire. Le ministre
 des affaires étrangères a profité de ce voyage pour réunir les vingt
 ambassadeurs de France dans la région.
 
 Au Yémen, le cessez-le-feu n'est pas respecté. L’Arabie Saoudite
 exerce des pressions pour faire reconnaître la scission entre les deux Yémen.
 
 Après la visite de l'ancien président CARTER en Corée du Nord et en
 Corée du Sud, la Corée du Nord a fait des propositions nouvelles sur son
 industrie nucléaire et le contrôle de l'AIEA. Mais la Maison Blanche considère
 que cette nouvelle attitude ne fait pas obstacle à ce que des sanctions soient
 prises à l'égard de ce pays. Toutefois les négociations ont été reprises.
 
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 Des élections présidentielles viennent d’avoir lieu en Colombie. Le
 candidat libéral l’a emporté à la suite d'une campagne qui n'a pas donné lieu
 à des incidents majeurs.
 
 Mme VEIL estime qu'à la veille du déclenchement de l'opération
 française au Rwanda il y a lieu d'obtenir des renseignements complémentaires
 notamment sur les deux questions suivantes : comment cette opération se
 présente-t-elle sur le plan européen et y a t-il un risque d'affrontement entre
 le FPR et les forces françaises ?
 
 
 
 M. LEOTARD lui répond que la situation politique et militaire est
 confuse. Beaucoup de questions ne sont pas encore résolues. Sur le plan
 militaire les préparatifs de l'opération sont en train. Un élément précurseur est
 ainsi arrivé sur les sites retenus comme base de l'opération : Goma et Bukavu
 au Zaïre, à proximité immédiate de la frontière occidentale du Rwanda. 2 500
 hommes participent à l'opération dont 1 500 prélevés sur nos forces
 stationnées en Afrique et 1 000 venant de France. Demain les opérations
 conçues comme des opérations aller-retour sur le territoire rwandais
 commenceront. Notre souci est de ne pas occuper durablement une partie du
 territoire du Rwanda.
 
 
 
 M. PASQUA estime pour sa part que nos compatriotes sont très
 choqués par les images qu'ils ont vues des massacres inter-ethniques. La
 France doit intervenir et cette intervention est à son honneur, dès lors que les
 précautions nécessaires sont prises pour qu'elle ne soit pas suspectée de néo-
 colonialisme. Mais l'opération ne doit durer que le temps nécessaire à la
 mission humanitaire.
 
 Le Premier ministre relève la versatilité de l'opinion. Hier, on nous
 pressait d'intervenir, aujourd'hui on dénonce l'aventurisme du Gouvernement.
 La France est isolée. Mais ce ne sont pas là des raisons de renoncer.
 L'opération doit se faire, limitée dans le temps et annoncée comme telle.
 
 
 
 Le Président de la République rappelle que le Rwanda, comme le
 Burundi, est essentiellement peuplée de Hutus. La majorité des habitants a
 donc soutenu naturellement le gouvernement du président HABYARIMANA.
 Si ce pays devait passer sous la domination tutsie ethnie très minoritaire qui
 trouve sa base en Ouganda où certains sont favorables à la création d'un
 "Tutsiland” englobant non seulement ce dernier pays mais aussi le Rwanda et
 le Burundi, îl est certain que le processus de démocratisation serait interrompu.
 
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 La France n'a pas de responsabilité historique dans cette région
 d'anciennes colonies allemandes ou belges. Le Rwanda s'est tourné vers la
 France au nom de la francophonie. Il était dirigé par M. HABYARIMANA
 considéré comme un modéré menant son pays vers la démocratie et combattu
 lui-même par les Hutus extrémistes. Des forces tutsies sont entrées au
 Rwanda venant de l'Ouganda avec toutes les apparences d'une agression
 extérieure. Nous avons apporté notre aide au gouvernement légal mais à
 condition qu'il négocie avec les rebelles. Nous avons essayé de favoriser une
 “entente entre Tutsis et Hutus à la conférence d'Arusha. Les accords conclus
 ont semblé satisfaire les Tutsis qui se voyaient accéder au pouvoir mais
 l'assassinat du-président, peut être commandité par des extrémistes hutus, a
 rejeté les Tutsis et le FPR dans une attitude de violence. C'est ainsi que les
 massacres inter-ethniques ont été déclenchés. Notre intervention doit être
 menée avec la plus extrême prudence. Il ne faut pas faire prendre trop de
 risques à nos soldats. Notre objectif n'est que de sauver des vies.
 
 Communication du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur
 les formations technologiques supérieures.
 
 M. FILLON présente la communication dont le texte est annexé.
 
 Communication du ministre de l’environnement sur l'action internationale en
 matière de lutte contre la désertification. ô
 
 M. BARNIER présente la communication dont le texte est annexé.